retrorocket / 123rf

Les avocats Éric Lemay, du cabinet Dussault Lemay Beauchesne et associés et Isabelle N. Tremblay, avocate pour l’organisation Le droit chemin, en ont recensé quelques-unes à l’occasion d’une conférence présentée au 12e Colloque de conformité du Conseil des fonds d’investissement du Québec qui se déroule à Montréal, mardi.

1. Ne pas lire son contrat

Cela peut sembler une évidence, mais le contrat d’assurance responsabilité donne des renseignements importants sur les activités couvertes et les personnes physiques et morales qui sont couvertes ainsi que sur l’étendue de la couverture d’assurance et sur les exclusions du contrat.

Les polices d’assurance responsabilité auront des protections différentes selon l’assureur retenu. Toutefois, généralement, les protections couvrent les coûts de la représentation devant les tribunaux, l’Autorité des marchés financiers (AMF) ou la Chambre de la sécurité financière (CSF) ainsi que les coûts afférents à la défense. « Il peut y avoir une limite de frais, par exemple de 40 000 $ ou de 75 000 $ », a noté Éric Lemay.

La couverture comprend aussi généralement les frais d’avocat, les honoraires extrajudiciaires, et les coûts relatifs à l’enquête de la CSF ou de l’AMF.

Toutefois, la franchise payable par l’assuré, les amendes, les pénalités administratives et les dommages découlant d’une fraude ne sont pas couverts, tout comme les autres exceptions prévues à la police.

« Dans les polices d’assurance, on va dire souvent que celui qui a fraudé, il ne peut pas obtenir une protection d’assurance parce que c’est un geste intentionnel. Cependant, le cabinet, qui pourrait ne pas être au courant, va être couvert, parce qu’il ne le savait pas. Les polices d’assurance, il faut les lire. Ce n’est pas nécessairement parce qu’il y a une fraude qu’elle n’est pas couverte », a dit Éric Lemay.

2. Ne pas aviser son assureur à temps

 Pour savoir quand aviser l’assureur responsabilité d’un cas, la clé est de lire le libellé de la police. C’est souvent l’officier de conformité qui avise, mais cela peut être un représentant.

« La première question qu’on va vous poser par la personne qui s’occupe de votre dossier à l’assureur responsabilité est : “Quand est-ce que vous l’avez su?” S’il y a un long délai, ils vont se demander : “Qu’est-ce que [vous avez] pu faire en ayant ce bébé-là sans nous aviser” », a indiqué Éric Lemay.

Le moment d’appeler l’assureur responsabilité dépend de plusieurs facteurs, comme la facilité ou non de régler le dossier dans le cours normal des affaires, selon Isabelle N. Tremblay : « Lorsqu’on n’est pas capable de régler le dossier dans le cours normal des affaires et qu’on doit consigner la plainte et qu’il y a une réclamation pécuniaire, c’est le temps d’appeler votre assureur responsabilité. Il faut regarder s’il y a un risque financier ou s’il y a un risque réputationnel. Si la réponse est oui, alors j’appelle mon assureur responsabilité. »

Si un client se plaint uniquement par téléphone, cette plainte peut avoir autant de valeur que s’il a écrit à son courtier ou son cabinet, a souligné Éric Lemay : « Pour certaines personnes, écrire peut être très difficile. C’est plus facile d’appeler. Dans ce cas, il faut se référer au libellé de la police d’assurance. »

Il faut faire preuve de discernement. S’il y a un conflit de personnalités entre un représentant et un client ou si le montant réclamé est inférieur à celui de la franchise, il n’y a peut-être pas lieu d’aviser l’assureur responsabilité, a indiqué Isabelle N. Tremblay.

En cas de doute, il vaut mieux aviser son assureur responsabilité pour éviter de se faire reprocher d’avoir trop attendu, a souligné Éric Lemay. Or, généralement, il n’y a pas de doute dans les cas de réception de mise en demeure ou de menace verbale du genre : « Si vous ne réglez pas le dossier, je vais vous poursuivre pour 500 000 $. »

Évidemment, lorsque l’assureur a ouvert un dossier de réclamation et qu’un conseiller ou qu’un cabinet s’apprête à appeler le client afin de lui offrir une compensation, il vaut mieux aviser l’assureur responsabilité de cette initiative. « Vous pourriez avoir une perte de protection si l’assureur responsabilité n’est pas d’accord avec [les gestes que vous comptez poser] », a dit Isabelle N. Tremblay.

 3. Admettre une faute sans l’accord de l’assureur

Les représentants et les cabinets veulent tous avoir un règlement définitif et ne plus entendre parler d’une situation litigieuse. Toutefois, pour ce faire, c’est une mauvaise idée de ne pas réfléchir et être en mode panique, ont indiqué les juristes.

Une erreur serait d’admettre une faute ou une erreur sans l’accord de l’assureur responsabilité́, car cela peut résulter d’une possible perte de couverture.

« Parfois, les polices nous demandent de ne pas faire d’admission ou de ne pas faire de règlement. Si vous devez faire une admission [de fait ou de responsabilité]: parlez à votre assurance responsabilité », a mentionné Isabelle N. Tremblay.

« Voici une situation à proscrire : vous faites un règlement avec quelqu’un et vous dites : “J’ai dit qu’on allait lui payer 250 000 $ et j’envoie la facture à l’assureur responsabilité.” Votre assureur responsabilité va vous dire que ça ne se passera pas comme cela », a illustré Éric Lemay.

Offrir de rembourser le client ou offrir un autre avantage sans l’autorisation de l’assureur responsabilité est aussi une erreur qui pourrait coûter à l’assuré une perte de protection.

4. Exiger que le client ne porte pas plainte auprès d’un régulateur

En conférence, les avocats ont souligné qu’il est interdit de régler un dossier conditionnellement à l’absence du dépôt d’une plainte ou à l’abandon de la plainte devant la CSF ou l’AMF.

« N’essayez pas de régler à la condition que le client ne dépose pas de plainte. Premièrement, vous n’avez pas le droit. Et deuxièmement, ce que vous venez de dire à la personne est : “Si je fais une plainte auprès du régulateur, je vais avoir plus d’argent. Parce que [le représentant ou l’entreprise] a peur” », a dit Éric Lemay. Celui-ci a également rappelé qu’on ne doit jamais sous-estimer l’acharnement d’un client envers son représentant ou son cabinet qui a en tête : « Lui, il va payer! »