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«On va prioriser des changements qui sont de quick wins à coût-bénéfice très élevé. On s’applique beaucoup à des redondances qu’il y a à travers les différents documents de divulgation des fonds d’investissement. On va aussi donner une certaine couleur sur des phases subséquentes dans le projet [au moment de la publication des orientations, en juin]», a indiqué Hugo Lacroix, directeur principal des fonds d’investissement à l’Autorité des marchés financiers (AMF), lors du 12e Colloque de conformité du Conseil des fonds d’investissement du Québec qui se déroulait à Montréal le 24 avril.

Hugo Lacroix indique que son groupe de travail a fait une cartographie complète de l’ensemble des obligations et que les changements proposés viseront d’abord les principales redondances. Dans une deuxième phase, le groupe de travail entend proposer une rationalisation réglementaire plus ambitieuse. Toutefois, étant donné que celle-ci touchera entre autres la façon dont on communique avec le client et la façon dont on obtient son consentement, la rationalisation devra être bien réfléchie.

«C’est facile de faire un changement en profondeur, mais tout changement vient avec un coût. Le but est de réduire le fardeau administratif à coût nul pour la protection de l’investisseur», a-t-il indiqué en marge du colloque, en entrevue avec Finance et Investissement.

«Il faut prendre en compte l’accessibilité aux technologies de l’information et le fait que, généralement, les gens sont plus habiles à utiliser les technologies de l’information, mais ce n’est pas tout le monde. Il y a beaucoup de détails. Ça demande une consultation de grande haleine», a-t-il dit.

Bientôt un cadre pour les fonds alternatifs

Les ACVM devraient publier un cadre réglementaire concernant les fonds alternatifs d’ici la fin de l’été, a par ailleurs noté Hugo Lacroix lors du colloque.

En 2016, les ACVM avaient lancé une consultation à cet effet afin d’établir les restrictions en matière de concentration de placement, de même qu’en matière de limites sur les actifs non liquides et sur les emprunts de fonds, donc de l’effet de levier des fonds.

Les changements au règlement 81-102 devraient faciliter la création de produits dits alternatifs pour un segment de la clientèle qui n’était pas en mesure d’accéder à ce genre de produits par le passé.

Parmi les propositions qui ont été mise sur la table, les fonds alternatifs permettraient un levier allant jusqu’à trois pour un.

«On a proposé une méthodologie pour calculer l’effet de levier. On va la présenter. Il y a aussi une initiative à l’internationale avec l’Organisation internationale des commissions de valeurs pour développer une méthode pour calculer l’effet de levier. On se rend compte qu’il y a un manque de ce côté : lorsqu’un fonds présente un levier de 3 pour 1, un autre fonds pourrait présenter un levier de 4 pour 1 et un autre, de 2 pour 1», a indiqué Mathieu Simard, conseiller expert, direction principale des fonds d’investissement, à l’AMF.

Mathieu Simard a par ailleurs souligné que « les fonds alternatifs ne s’adressent pas à Monsieur et Madame tout le monde. Il va y avoir un lien entre le règlement 31-103, les pratiques de distribution, les réformes ciblées. La connaissance du client, convenance, connaissance du produit seront aussi tenues en compte. »

Par ailleurs, le cadre proposé traitera des restrictions en matière de titres illiquides qui feront partie des actifs d’un fonds.

«Les REIT ou les fiducies de placements immobiliers, si elles sont utilisées comme il faut, êtes-vous prêt à dire que c’est un mauvais investissement? Regardez comment la Caisse de dépôt et placement du Québec gère les deniers pour les fonds de pension québécois : elle fait des investissements dans les aéroports, l’immobilier et l’infrastructure. Tout cela est illiquide. Est-ce que ce sont de mauvais investissements?» a dit Hugo Lacroix.

Selon lui, plusieurs stratégies alternatives peuvent aussi être liquides. «Le fait de pouvoir faire du long/short dans le marché volatile ou de pouvoir prendre du levier dans certaines périodes peut pouvoir parfois réduire la volatilité de portefeuille d’un client donné dans une période où il a besoin de contrôler sa volatilité», a-t-il noté.

«Une stratégie long-short consiste à combiner au sein d’un même portefeuille l’achat d’une action sous-évaluée (la position dite longue) et la vente à découvert d’une action surévaluée (la position dite courte). Cette stratégie repose donc sur le talent du gestionnaire à déterminer les titres sous-évalués et surévalués, en se basant sur l’analyse fondamentale», indique la Banque Nationale concernant ce type de stratégie.

La distribution de fonds alternatifs aux investisseurs de détail viendra avec des obligations de formation pour les firmes de courtage, a souligné Hugo Lacroix : «Est-ce que ça va demander de l’effort des firmes de bien former leurs représentants, et comprendre le fonctionnement de ces produits-là? Certainement. Il faut avancer. Les investisseurs québécois doivent-ils rester dans les fonds long only pour le reste de leur vie? Ce n’est peut-être pas cela l’approche la plus prudente.»