«J'aimerais atteindre ma cible de 200G$ en 2020 avant de passer le flambeau»
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Si l’on considère que les actions se trouvent en marché haussier depuis près de dix ans et que les obligations prospèrent depuis trois décennies, Nathan Thooft, directeur général principal de Gestion d’actifs Manuvie à Boston, pense que les rendements des placements dans cinq ans seront la moitié de ce qu’ils étaient.

« La plupart des gens pensent que le rendement des actions est de 8 à 10 % sur de longues périodes. Toutefois, dans l’environnement actuel, la plupart des rendements d’actions devraient être à l’avenir de 4% à 6% », dit M. Thooft, ajoutant que les résultats les plus élevés devraient être le fait de l’Europe et des marchés émergents. Les rendements projetés des placements à revenu fixe sont dans les 1 % à 2%.

M. Thooft est aussi co-chef de l’Équipe des solutions de portefeuille (ESP) de la Manuvie et dirigeant de l’équipe mondiale de 35 professionnels du placement qui supervise environ 140 milliards de dollars (G$) d’actifs sous gestion pour des clients au Canada, aux États-Unis et en Asie. Au Canada, leurs responsabilités comprennent la gestion de quatre portefeuilles de répartition d’actifs qui ont été lancés en mai et ont actuellement environ 550 M$ d’actifs sous gestion.

Avec une orientation qui va de la prudence à la croissance, ces portefeuilles de fonds de fonds emploient une combinaison variable d’actions et de titres à revenu fixe. Leurs avoirs sous-jacents sont essentiellement composés d’une combinaison de fonds maison de la Manuvie et de fonds négociés en bourse. La construction des portefeuilles repose fortement sur l’analyse quantitative et qualitative. « Un des principaux points de départ pour nous est d’avoir des attentes prospectives de risque et de rendement pour chacune des catégories d’actifs », dit M. Thooft, qui note que cette vision prospective s’étend sur cinq ans.

Environ 10 % des portefeuilles sont détenus dans des positions soi-disant opportunistes qui reflètent où l’équipe de gestion détecte certaines de meilleures valeurs. L’exécution de ces positions varie selon l’objectif de chaque portefeuille, avec les actions recevant le feu vert dans le portefeuille de croissance, par exemple, et les titres de créances de sociétés dans le portefeuille sécuritaire.

Les positions opportunistes offrent suffisamment de souplesse pour générer des rendements plus élevés dans un monde aux rendements faibles. « Par exemple, pour améliorer encore davantage les rendements dans notre espace à revenu fixe, nous avons souvent une pondération bien plus élevée dans des types de stratégies multisectorielles sans contraintes, dit M. Thooft. Dans cet environnement où nous avons très peu d’attentes en matière de rendements, nous voulons donner toute la liberté du monde à ces gestionnaires sous-jacents pour qu’ils produisent autant de valeur que possible, et ne pas adopter une approche trop focalisée sur l’indice. »

Les évaluations du côté des action sont, dans le meilleur des cas, équitables, voire un peu chères, surtout aux États-Unis, dit M. Thooft. Pourtant, il y a des actions du Canada, de certaines parties de l’Europe et des marchés émergents et du Japon qui présentent encore de bonnes occasions, ajoute-t-il. En fait, quand on les compare aux titres à revenu fixe, les actions sont encore préférables à ce que M. Thooft perçoit comme des évaluations « gonflées » dans certaines parties du marché des titres à revenu fixe.

« Nous avons une légère tendance à prendre davantage de risques dans nos portefeuilles, et cela comprend un penchant pour les actions et les participations aux titres de créance. Malgré un resserrement des écarts, nous préférons encore les créances des sociétés aux obligations gouvernementales souveraines, dit M. Thooft. Nous sommes depuis 30 ans dans un marché des obligations où le rendement de ces dernières n’a été qu’à la hausse. » Bien qu’il ne s’attende pas à ce que les rendements obligataires augmentent de façon spectaculaire, il croit que le rendement des obligations souveraines a toutes les chances d’augmenter.

« Aucune catégorie d’actifs n’est bon marché », dit M. Thooft, qui dirige le processus de prévision sur les catégories d’actifs de l’Équipe des solutions de portefeuille, ainsi que la mise en œuvre des perspectives sur les catégories d’actifs et les stratégies. « Toutefois, sur une base relative, nous voyons bien pourquoi on peut préférer les actions aux placements à revenu fixe, que ce soit pour des raisons d’évaluation ou à cause d’autres données fondamentales comme les bénéfices et la dynamique de croissance. »

Actuellement, les principales mises actives incluent une légère surpondération des services financiers canadiens et des actions européennes. « Ces dernières se sous-classent depuis quelques années, et l’on a tendance à considérer la région comme une zone de faible croissance avec beaucoup d’initiatives en place qui constituent un frein à la croissance, dit M. Thooft. Mais tout de même, cet environnement est en train de changer un peu. »

La zone euro connaît une croissance de près de 2 % par an, grâce au parti pris accommodant de la Banque centrale européenne, remarque M. Thooft. « Aussi, les indices des directeurs d’achats sont très positifs et d’autres grands indicateurs économiques sont assez solides et devraient le demeurer. Et cela se manifeste dans les bénéfices. On s’est beaucoup félicité des révisions des bénéfices à la hausse aux États-Unis et au Canada, mais si on regarde l’Europe, les révisions de bénéfices, et carrément les bénéfices eux-mêmes, ont été très élevés, dit M. Thooft. Nous avons ici une Europe qui, du moins à court terme, semble offrir un théâtre favorable pour des prises de risque au niveau des actifs, ajoute-t-il, d’autant que les évaluations ne sont pas aussi gonflées qu’aux États-Unis. »

Au sein du portefeuille équilibré, par exemple, près de 20 % des actifs sont constitués de stratégies d’actions internationales, dit M. Thooft. Cela représente une augmentation substantielle alors que les données fondamentales se sont améliorées par rapport à l’année dernière à la même période. La combinaison cible dans le portefeuille équilibré est de 55 % d’actions et 45 % de titres à revenu fixe.

Au sein du portefeuille prudent, qui a une participation-cible au revenu fixe de 80 %, la plupart du volet opportuniste est affectée aux obligations de sociétés de courte durée et à certaines obligations canadiennes. « Nous avons un penchant pour les créances des sociétés », dit M. Thooft.

Chacun des portefeuilles comporte des objectifs ciblés quant au risque et aux résultats. « Nous devons soupeser proportionnellement nos vues sur les placements en fonction de leur positionnement sur l’échelle du risque », dit M. Thooft.

Dans le cas du portefeuille de croissance, dit M. Thooft, il y aura des positions plus importantes affectées à des idées d’actions dans le volet opportuniste. « Ces clients pourront se permettre les profils de risque plus élevés attachés à ces actions. »