Une tirelire aux couleurs du drapeau du Québec
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Les contribuables québécois paniqués devant la hausse substantielle du coût de la vie encaisseront sans doute avec soulagement le chèque de 500 $ que s’apprête à leur expédier le gouvernement Legault.

Cette somme non récurrente sera versée dans les prochains mois à 6,4 millions de contribuables, soit tous ceux ayant un revenu annuel inférieur à 100 000 $.

Le coup de pouce financier de la part de Québec, destiné à compenser la hausse récente et marquée de l’inflation et à stimuler la consommation, constitue la mesure phare inscrite au budget 2022-2023 présenté mardi par le ministre des Finances, Eric Girard, son quatrième et dernier avant la prochaine échéance électorale.

Pour Québec, cette mesure représentera une dépense ponctuelle de 3,2 milliards $.

Le montant sera intégré à la déclaration de revenus de 2021. En clair, cela signifie qu’une personne qui aurait droit par exemple à un remboursement d’impôt de 500 $ recevra en fait un chèque de 1000 $.

Tous les adultes admissibles y auront droit, qu’ils soient étudiants, retraités, travailleurs ou bénéficiaires de l’aide sociale.

Le chèque vient s’ajouter, et non remplacer, la prestation exceptionnelle annoncée dans le mini-budget de novembre qui s’élevait à 275 $ (400 $ pour un couple) pour une personne seule ayant un revenu inférieur à 50 000 $. Au total, 3,3 millions de contribuables y avaient droit.

Si le gouvernement peut se montrer généreux, c’est parce que l’économie québécoise fonctionne à plein régime et que les finances publiques sont en bonne santé, malgré deux ans de pandémie.

La première année de pandémie avait plombé les finances publiques et le déficit du Québec atteignait alors un sommet historique à 15 milliards de dollars (G$). Depuis, il avait déjà fondu de moitié l’automne dernier, à 6,8 G$. En 2021-2022, le déficit atteindra 7,4 G$ après la contribution au Fonds des générations. Et Québec prévoit que le déficit atteindra 6,5 G$ en 2022-2023. Quant au déficit structurel, il plafonne à 2,8 G$ en 2021-2022.

Malgré une bonne santé financière, le retour à l’équilibre budgétaire n’est toujours pas prévu avant 2027-2028, le gouvernement Legault ayant choisi l’approche de la réduction en douceur. Eric Girard note cependant qu’au strict plan « comptable » et sans tenir compte de la contribution au Fonds des générations, le Québec aura atteint l’équilibre budgétaire en 2023-2024.

Le ministre Girard rappelle que l’économie du Québec a très bien performé en 2021, ce qui le laisse confiant de voir l’économie faire preuve de résilience durant l’année en cours, malgré d’éventuelles perturbations économiques mondiales.

Le PIB réel du Québec s’est accru de 6,3 % en 2021 et le gouvernement s’attend à une croissance économique de 2,7 % en 2022. En comparaison, en 2020, le PIB avait enregistré un recul de 5,5 %. En parallèle, cette année, le taux d’inflation devrait atteindre 4,65 %.

Le taux de chômage (à 4,5 % en février) demeure très bas, si bien que le Québec a renoué avec le plein emploi, comme avant la pandémie. Son problème consiste désormais à s’attaquer avec énergie à la pénurie de main-d’œuvre.

Lundi, le ministre évaluait le risque actuel que le pays se retrouve en récession à 25 %. En temps normal, ce scénario ne dépasse pas les 10 %.

Dans son discours présenté à l’Assemblée nationale mardi, Eric Girard a rappelé que son budget était déposé « dans un contexte de grande incertitude », alors qu’on ignore encore quelles seront les suites de la pandémie et quel sera l’impact planétaire de l’invasion de l’Ukraine par la Russie.

Le gouvernement s’engage par ailleurs à ne pas sabrer dans les services à la population et à ne pas alourdir le fardeau fiscal des contribuables. Il a aussi choisi de ne pas privilégier l’option de réduire les taxes et les tarifs.

Son cadre financier, qualifié par le ministre de « prudent et responsable », s’étire sur cinq ans et totalise 22 G$ de nouvelles mesures.

Au cours de l’année financière 2022-2023, le gouvernement prévoit que ses dépenses de fonctionnement atteindront 130 G$, ce qui inclut 2,3 G$ uniquement en mesures reliées à la lutte contre la COVID-19. De plus, 8,8 G$ iront au service de la dette.

De tous les ministères, c’est toujours celui de la Santé qui prend la plus grande part du gâteau, avec un budget qui franchit cette année la barre des 55 G$. La croissance des dépenses en santé devrait se chiffrer à 6,3 % en 2022-2023 et de 4,5 % en 2023-2024 et 2024-2025.

Malgré l’importance des sommes en cause, la pandémie a montré depuis deux ans les failles du système et à quel point le réseau de la santé était fragile. Le ministre de la Santé, Christian Dubé, doit d’ailleurs annoncer dans les prochaines semaines un plan très attendu de « refondation » du réseau de la santé.

Le budget de mardi indique comment le gouvernement va s’y prendre pour financer ce plan. On devra investir 8,9 G$ d’ici cinq ans pour améliorer l’offre de soins aux patients québécois, dont 5,2 G$ dans le réseau comme tel, et 3,7 G$ dans les services sociaux, notamment destinés aux aînés et aux enfants vulnérables.

Au total, de 2020 à 2025, Québec anticipe que la gestion de la lutte à la pandémie aura coûté aux contribuables quelque 22 G$.

Les besoins financiers en santé étant ce qu’ils sont, Québec annonce qu’il reviendra à la charge encore une fois pour faire pression sur le gouvernement fédéral et l’amener à consentir à assumer une part accrue des dépenses en santé, à hauteur de 35 % du coût total des dépenses des provinces consacrées à la santé. Pour le Québec, cela représenterait un coussin de 6 G$ additionnels annuellement.