En comparaison, celui de l’indice MSCI USA a été de 13,36 %. L’indice MSCI AC Asia Pacific (l’indice) se négociait à 12,9 fois les bénéfices prévus en 2015 au 31 décembre 2014, par rapport à 16,68 fois pour l’indice MSCI USA, soit un escompte de 22,7 %.

Les règles de gouvernance d’entreprise moins strictes expliquent cet escompte, mais d’autres facteurs entrent en ligne de compte. Par exemple, les titres sud-coréens se négocient à 9,3 fois les bénéfices prévus de 2015. La menace nord-coréenne explique partiellement cette évaluation.

Les titres chinois se négocient aussi à 9,3 fois les bénéfices prévus pour 2015. C’est que les banques chinoises, qui comptent pour 42 % de l’indice, se négocient entre 5 et 6 fois les bénéfices prévus, un reflet des inquiétudes quant à la quantité de mauvais prêts dans leurs bilans.

«La région Asie-Pacifique se distingue des autres marchés émergents par sa croissance économique supérieure, fondée sur des gains de productivité enregistrés dans plusieurs pays. La transformation de pays au produit intérieur brut faible, comme la Corée du Sud ou Taïwan, en pays développés en fait foi. En soi, cela milite pour investir dans la région», soutient Kenneth Lowe, cogestionnaire du Fonds asiatique de croissance et revenu BMO.

Demeurer sélectif

«Des changements structurels sont en cours pour poursuivre dans cette voie. En Inde, le nouveau gouvernement diminue la bureaucratie et les subsides, et propose des réformes, comme l’autorisation d’établir des fiducies de placement immobilier. En Chine, des réformes du secteur financier, de même que des entreprises d’État, sont graduellement mises en place. Des réformes ont également cours en Corée du Sud pour motiver les entreprises à verser des dividendes plus généreux», relate-t-il.

Et le fait que la région ne se négocie qu’à 1,5 fois la valeur comptable, alors que la norme historique est de 1,8, rend la proposition à long terme plus attrayante à ses yeux.

«La sélectivité est toutefois de rigueur, car le simple fait qu’une région croisse ne signifie pas que toutes les entreprises y sont intéressantes. Ainsi, la croissance de la Chine s’est accompagnée d’une hausse marquée des salaires, et les titres de consommation de qualité en ont bénéficié», remarque-t-il.

Croissance n’égale pas rendements

«L’un des constats en placement les plus troublants est que le fait de placer de l’argent dans un pays qui affiche un taux de croissance élevé ne se traduit pas nécessairement par un rendement boursier élevé. C’est certainement le cas de la Chine, alors que l’indice Shanghai Stock Exchange enregistrait un rendement annualisé de – 0,6 % pour la période de 13 ans entre juin 2001 et juin 2014, alors que l’économie affichait souvent des taux de croissance dépassant 10 %. Avec le recul, investir en Australie a été une bien meilleure façon de participer à la croissance chinoise que d’acheter des titres chinois», souligne Mark Lin, gestionnaire du Fonds Asie-Pacifique CIBC.

Selon lui, la rentabilité et l’efficacité dans l’allocation du capital sont de meilleurs indicateurs de performance boursière.

La pondération du fonds en titres australiens est de 20,9 %, par rapport à 13,9 % dans l’indice. Le fonds cible des entreprises qui offrent une visibilité à long terme de leurs perspectives de croissance.

Les titres des soins de santé en sont un exemple et un des principaux titres en portefeuille est l’australienne Ramsey Health Care, qui exploite des hôpitaux privés haut de gamme. On y retrouve aussi Domino’s Pizza, encore là une entreprise ayant un modèle d’affaires bien établi, de même que TPG Telecom, une jeune entreprise de téléphonie et Internet à bas prix.

Le fonds possède également deux titres liés à Internet en Chine, soit Baidu et Alibaba, un peu les équivalents de Google et eBay, axés sur la croissance de la consommation. Il croit que l’économie chinoise a besoin d’une mise à niveau pour pouvoir passer à la prochaine phase de développement, et les autorités ne peuvent utiliser la même approche qu’en 2009 pour y arriver.

Les effets secondaires d’un programme de relance – elle en a lancé un en 2009 -, sont trop importants pour qu’elle le répète : «Le marché immobilier risque de s’emballer à nouveau, provoquant de l’agitation sociale», prédit Mark Lin.

l’Indonésie favorisée

Le marché boursier du Japon, qui compte pour près de 40 % de l’indice, a connu une année en dents de scie, qui s’est terminée par une poussée de 21,6 % entre le creux du 17 octobre et la clôture du 31 décembre. Toutefois, la baisse du yen a fait en sorte qu’il a généré un rendement de – 3,72 % (en $ US) en 2014. Il avait bondi de 27,4 % en 2013, dans la foulée de l’assouplissement quantitatif mis en place par la Banque du Japon dans le cadre du programme de relance du premier ministre Shinzo Abe (Abenomics).

«Ces mesures monétaires vont se poursuivre de manière soutenue. Mais là comme ailleurs, nous préférons être sélectifs et cibler des sociétés japonaises qui créeront de la valeur en tout temps», indique Mark Lin.

À son avis, ces sociétés doivent générer une grande partie de leurs revenus à l’extérieur du Japon ou oeuvrer dans un secteur en croissance, comme les soins de santé : «C’est le cas du fabricant d’équipement médical Sysmex, notre deuxième titre en importance en portefeuille, de même que Sugi Holdings, une chaîne de pharmacies».

Le fonds favorise les titres indonésiens à raison de 12,7 %, alors qu’ils ne comptent que pour 2 % de l’indice. Les banques y ont un bel avenir, car une part importante de la population n’a pas encore un compte bancaire. Les banques ont un profil de risque faible, car elles s’en tiennent à des prêts hypothécaires et à la consommation, et ne participent pas aux marchés des capitaux.

La Corée du Sud et Taïwan comptent 9,8 % et 8,9 % de l’indice, mais le fonds n’y possède aucun titre. La plupart des titres cotés sont dans des secteurs à forte intensité de capital, comme l’industrie lourde et la technologie, dont la visibilité de la croissance est faible. «Samsung sera-t-il le prochain Nokia ?» demande Mark Lin.

Rendement supérieur à 5 %

Les évaluations actuelles des titres d’Asie-Pacifique sont normales, voire légèrement sous la normale, et permettent d’espérer des rendements annuels oscillant entre 6 et 9 % (high single digit returns) sur un horizon à long terme, pense William Lam, cogestionnaire du Fonds Indo-Pacifique Invesco.

L’escompte sur les titres d’Asie-Pacifique pourrait graduellement se résorber au fur et à mesure que les règles de gouvernance d’entreprise se resserreront.

Cependant, à l’heure actuelle, l’inquiétude quant au ralentissement de l’économie chinoise pèse sur les évaluations : les investisseurs croient que cette économie surchauffe, qu’il y a du surinvestissement dans les infrastructures et qu’il y a eu trop de prêts au cours des dernières années, des faits indiscutables, concède William Lam.

Il juge toutefois que sa gestion active permet de cibler des entreprises chinoises qui ne sont pas touchées par ces tendances et qui se révèlent être des occasions lorsque leurs cours baissent avec le marché. C’est le cas de certains titres Internet, dont NetEase, la plus importante position en portefeuille.

NetEase est le développeur de jeux vidéo en ligne qui connaît le plus de succès en Chine, avec un million de joueurs en tout temps, de même que le plus important fournisseur de courrier électronique, avec plus de 700 millions d’abonnés. NetEase a accru ses bénéfices à un rythme annuel de 20 % au cours des 10 dernières années, générant toujours des flux de trésorerie élevés.

«Lorsque nous avons acheté le titre en 2009, l’encaisse au bilan était de 1 G$ US, et elle est maintenant de 3 G$ US. Et il se négocie à seulement 15 fois les bénéfices de cette année. Nous pensons qu’il vaut au moins 20 fois les bénéfices», indique William Lam.

Un autre titre de son portefeuille est Samsung Electronics, le plus important d’Asie par sa capitalisation boursière. Des investisseurs craignent qu’elle soit le prochain Motorola ou Nokia, scénario improbable selon lui.

«L’intégration verticale et la rentabilité de ses filiales de production de composantes de téléphones mobiles, comme les écrans ou les processeurs, assurent que le segment des téléphones peut se tirer d’affaires. En utilisant la somme des parties (sum-of-the-parts) pour analyser Samsung, son segment des combinés mobiles est évalué à moins de cinq fois les bénéfices. De plus, les investisseurs semblent n’accorder aucune valeur à l’encaisse au bilan, qui oscille autour de 30 % de sa capitalisation boursière. Ils oublient aussi que la société est une de celles qui dépensent le plus en recherche et développement (R-D) au monde, ce qui leur a toujours permis de trouver de nouveaux marchés et d’en devenir le chef de file. Le titre est sous-évalué d’au moins 30 %», soutient William Lam.