bobaa22 / 123rf

Il s’agit d’un changement important qui devrait également avoir une incidence sur l’industrie canadienne.

Le catalyseur de ce changement a été l’annonce par la Securities and Exchange Commission (SEC) des États‑Unis d’une échéance pour raccourcir le cycle de règlement des opérations sur titres. Traditionnellement, les titres sont réglés sur une base T+2, soit deux jours ouvrables après la date de la négociation.

Cependant, la SEC a imposé un passage à un cycle de règlement T+1, réduisant effectivement cette période à un seul jour ouvrable après la négociation, l’échéance étant fixée au 28 mai 2024.

En réponse à ce changement aux États‑Unis, l’Association canadienne des marchés des capitaux (ACMC) a annoncé des plans pour que les marchés des capitaux du Canada se synchronisent avec ce changement, visant à passer au règlement T+1 d’ici le 27 mai 2024. Cette harmonisation est essentielle au maintien d’une exploitation et d’une intégration harmonieuses des marchés financiers nord‑américains.

Le passage à un cycle de règlement T+1 représente un ajustement important pour l’industrie des fonds négociés en Bourse (FNB) au Canada, avec des répercussions très variées pour tous les participants, des émetteurs aux investisseurs finaux, tant au détail qu’au niveau institutionnel.

Voici une analyse des répercussions en aval que cette transition devrait avoir dans l’ensemble de l’écosystème des FNB, en mettant en lumière les considérations opérationnelles, stratégiques et de conformité qui seront à l’avant-plan au fur et à mesure que l’industrie évoluera dans ce changement important.

Comprendre le règlement des ordres

En termes simples, le règlement des négociations est le processus par lequel l’acheteur paie les titres et le vendeur les livre. Imaginez, par exemple, que vous achetiez des actions d’une entreprise le lundi. Avec un cycle de règlement T+2, l’échange effectif d’argent contre des actions aurait lieu le mercredi, deux jours ouvrables après.

Depuis 2017, les marchés financiers nord-américains utilisent ce cycle de règlement T+2. Cela signifie qu’après l’exécution d’un ordre, il y aurait une fenêtre de deux jours avant que cet ordre ne soit officiellement réglé. Ce délai était principalement attribuable aux exigences logistiques de vérification et de traitement des opérations.

Le passage à un cycle de règlement T+1 vise à réduire les risques liés à cette période d’attente. En raccourcissant le délai entre l’exécution des négociations et le règlement, les marchés financiers peuvent atténuer l’exposition des contreparties aux risques de liquidité, de marché et de crédit.

De plus, une période de règlement plus courte signifie qu’il y aura moins de négociations non réglées en tout temps. Cette réduction des opérations en cours peut réduire l’exposition du marché aux négociations non réglées, ce qui rend le système plus stable et moins sujet aux défaillances en cascade en période de stress.

Pour les vendeurs de titres financiers, un accès plus rapide au produit des ventes constitue un avantage important. Cette liquidité accrue signifie que les vendeurs peuvent réinvestir ces capitaux plus rapidement, ce qui améliore la gestion des flux de trésorerie et la capacité de répondre aux occasions ou aux obligations du marché.

Répercussions sur les émetteurs de FNB

« L’un des principaux défis pour les sociétés de fonds en général, et les émetteurs de FNB en particulier, est le décalage dans les cycles de règlement des titres sous-jacents qui composent les fonds », déclare Keith Evans, directeur exécutif de l’ACMC.

Les FNB sont constitués de différents types d’investissements, comme les actions et les obligations. Ces investissements eux-mêmes sont achetés et vendus sur leurs propres marchés, ce qui pourrait ne pas régler toutes leurs négociations en une seule journée, comme le FNB est censé le faire au Canada à compter du 27 mai.

Prenons l’exemple d’un FNB canadien qui détient un FNB américain sous‑jacent, lequel détient lui-même des actions étrangères. Si le règlement de certaines de ces actions sous‑jacentes prend deux jours au lieu d’un, alors que le FNB ne prend qu’un jour à régler, l’émetteur du FNB doit jongler avec ces différents échéanciers, ce qui rend son travail plus difficile.

Des problèmes pourraient survenir en particulier pour les FNB canadiens ayant une exposition importante à des titres domiciliés dans l’Union européenne et au Royaume‑Uni, qui se négocient selon un barème T+2 et ne passent pas à un cycle de T+1.

« Plus le pourcentage des titres sous‑jacents d’un FNB qui se règlent sur une base de T+2 (ou plus) (surtout lorsque les appariements de devises non‑USD/CAD sont pris en compte), plus les défis opérationnels seront difficiles et probables », explique Keith Evans.

Un autre défi concerne la façon dont les nouvelles parts de FNB sont créées. Les manufacturiers qui émettent des FNB travaillent avec des partenaires spéciaux, soit des courtiers appelés participants autorisés (PA), pour gérer l’offre de parts de FNB en fonction de la demande. Lorsqu’un PA souhaite créer de nouvelles parts de FNB, il convient de donner à l’émetteur d’un FNB un panier de titres que le FNB souhaite détenir. En retour, le PA obtient des parts de FNB.

Toutefois, si l’un des titres censés faire partie du panier est obtenu après un plus long délai – peut-être parce que le règlement prend plus de temps – le PA doit attendre plus longtemps pour obtenir ses parts de FNB. Ce retard peut causer des problèmes non seulement pour le PA, mais aussi pour les investisseurs qui achètent et vendent les parts de FNB sur le marché en raison des distorsions de prix potentielles.

« On craint qu’un cycle de règlement plus court ne prolonge les retards dans la livraison des parts de FNB, ce qui pourrait à son tour accroître le taux d’échecs de règlement en aval, car il y aura moins de temps pour régler les problèmes courants, comme le retour tardif de titres sur des prêts ou les complexités liées à une opération stratégique », commente Keith Evans.

Une « défaillance de règlement en aval » se produit lorsque le règlement des opérations qui suivent l’opération initiale fait l’objet d’un retard ou d’un échec. Cela peut survenir lorsque le règlement d’une opération initiale ne s’effectue pas comme prévu, entraînant la défaillance ou le retard des opérations subséquentes portant sur les mêmes titres.

Par exemple, si un participant autorisé (PA) est censé recevoir des parts de FNB en échange d’un panier de titres, mais que ces titres sont retardés en raison de problèmes de règlement, le PA ne peut pas obtenir les parts de FNB en temps voulu. Ce retard peut alors affecter les investisseurs qui comptaient pouvoir acheter ou vendre ces parts de FNB sur le marché.

Si le PA envisageait de vendre les parts de FNB pour répondre à la demande des investisseurs, mais qu’il ne peut pas le faire parce qu’il n’a pas reçu les parts en raison d’un retard dans la remise des titres, cela pourrait donner lieu à une défaillance de règlement en aval. Les investisseurs planifiant de recevoir les parts de FNB à une certaine date pourraient ne pas les recevoir, ce qui pourrait perturber d’autres opérations et causer une série de défaillances de règlement.

À l’heure actuelle, le secteur des valeurs mobilières des États‑Unis a mis en place des mécanismes pour gérer ces retards en utilisant des garanties qui sont essentiellement un espace réservé ou une garantie jusqu’à ce que les titres réels puissent être livrés. Mais au Canada, il y a une certaine incertitude quant à la façon exacte de gérer ces situations.

« Les membres de l’Association canadienne des FNB (ACFNB) et de l’ACMC ont collaboré pour proposer un processus de garantie en espèces et des pratiques de marché connexes et ont demandé des conseils en matière de réglementation », explique Keith Evans.

Ce processus proposé signifierait que même s’il y a un retard dans l’obtention des titres pour le FNB, le PA peut quand même obtenir les parts de FNB à temps, en utilisant les espèces comme réserve temporaire.

Cette approche vise à assurer le bon fonctionnement des choses pour tous les intervenants, des sociétés émettrices de FNB aux investisseurs individuels, en réduisant le risque de retards et de confusion dans le règlement des ordres.

Répercussions sur les investisseurs de FNB

Pour les investisseurs ordinaires qui placent leur argent dans des FNB canadiens, le passage à un cycle de règlement T+1 signifiera en grande partie « que les choses vont continuer comme avant ». Ce changement concerne davantage les opérations financières en coulisse, de sorte que l’expérience quotidienne d’achat, de détention et de vente de FNB ne sera pas très différente pour la plupart des gens.

« Les principaux avantages sont que les investisseurs recevront leur argent comptant s’ils vendent ou achètent leurs titres un jour plus tôt, ce qui améliorera leur liquidité et leur souplesse et pourrait réduire le temps que le marché pourrait évoluer en leur défaveur », dit Keith Evans.

Sous T+1, lorsque vous achetez ou vendez des titres, y compris des parts de FNB, le processus sera plus rapide. Le temps qui s’écoule entre le moment où vous effectuez une négociation et celui où elle est officiellement terminée (réglée) est de plus en plus court.

Cela réduit la possibilité que tout ce qui ne va pas avec la négociation, comme un problème avec l’autre partie concernée, pourrait entraîner une perte pour l’investisseur. Donc, ce changement vise essentiellement à rendre la négociation des FNB un peu plus sûr et plus efficace.

Le passage d’un cycle de règlement de T+2 à un cycle de règlement de T+1 a certaines répercussions particulières sur le moment où les FNB se négocient sans leur distribution à venir, connue sous le nom de négociation « ex-dividende ».

En général, un titre se négocie ex-dividende un jour ouvrable avant sa date de clôture des registres selon un cycle T+2. La date de clôture des registres est celle à laquelle vous devez être officiellement inscrit comme actionnaire pour recevoir le dividende. Avec le passage à T+1, ce délai change. Maintenant, la date ex-dividende correspondra à la date des registres elle-même.

En raison de cet ajustement dans le cycle de règlement, il y a une conséquence particulière pour le calendrier : le lundi 27 mai 2024, aucun titre coté en Bourse ne sera mis en négociation ex-dividende.

Cela signifie que, pour toute distribution de FNB à ce moment-là, le passage à un processus de règlement T+1 modifie temporairement le calendrier habituel de la négociation des titres sans leur droit aux dividendes.

Essentiellement, cette date précise découle directement du réalignement du calendrier des négociations pour tenir compte de la période de règlement plus rapide, assurant une transition en douceur et réduisant au minimum la confusion pendant la transition.

Dernier mot sur T+1 et les FNB

Le passage à un cycle de règlement T+1 marque un changement crucial pour l’industrie canadienne des FNB, qui vise à améliorer l’efficacité du marché et à réduire le risque.

Pour les émetteurs de FNB, des défis comme la gestion du décalage dans les cycles de règlement et le traitement des créations de parts de FNB en nature exigeront une navigation prudente. Les investisseurs canadiens doivent être au courant de ces ajustements, y compris les changements apportés aux dates ex-dividendes et le traitement des distributions de FNB.

Dans les coulisses, des organisations comme l’ACFNB et l’ACMC travaillent activement pour assurer une transition en douceur, en préconisant la clarté de la réglementation, en travaillant avec les organismes de réglementation et les Bourses, et en proposant des solutions proactives comme des processus normalisés de garantie de trésorerie.

En se tenant au courant de ces faits nouveaux, les investisseurs canadiens et les professionnels de l’industrie peuvent être mieux préparés à s’adapter à ce nouveau paysage commercial, en veillant à ce qu’ils demeurent autonomes dans un marché plus efficace et plus sûr.