La planification successorale pour les familles recomposées
Andi Berger

« Il faut une planification plus précise pour s’assurer que les actifs sont distribués de la manière convenue, explique-t-elle. Dans les familles recomposées, on n’a pas le lien familial qui existait avec la famille d’origine, et tout est donc en place pour que se créent des conflits et des situations émotionnelles. Je parle donc à mes clients de façon à ce qu’ils prennent leurs dispositions pour éviter ces pièges. »

La première étape est de rédiger un nouveau testament dès que possible après que le nouveau mariage est devenu officiel. C’est parce que généralement parlant, tout testament avant le remariage est automatiquement révoqué, dit Frank DiPietro, directeur de la planification financière et fiscale à Placements Mackenzie. Ne pas rédiger un nouveau testament signifiera que le client remarié est considéré décédé intestat (sans testament).

Quant à rédiger le nouveau testament, il n’est pas recommandé de simplement tout laisser au nouveau conjoint dans le cas de familles recomposées où il y a des enfants d’une première relation des deux côtés, fait remarquer M. DiPietro. La plupart des époux veulent voir leurs enfants respectifs recevoir au moins une portion de leurs actifs.

Certains peuvent croire que nommer le nouvel époux survivant héritier de tous les actifs simplifie le processus. On présume alors que le nouveau conjoint donnera à tous les enfants leur part d’actifs. Mais cela ne peut pas être garanti, puisque l’héritier sera légalement autorisé à utiliser les actifs comme il l’entend, fait remarquer M. DiPietro. Par exemple, que se passe-t-il si le conjoint survivant favorise ses propres enfants par rapport à ceux du conjoint décédé? Dans ce cas, il n’y aurait rien qui « empêche le nouvel époux de complètement priver de leurs droits les enfants de la première relation, et c’est ce qu’il faut éviter », dit M. DiPietro.

Une meilleure idée est d’établir des stratégies de planification successorale qui protègent le conjoint, mais aussi les actifs des enfants. M. DiPietro cite les fiducies conjugales comme moyen pour les familles recomposées d’atteindre ces deux objectifs. Ce système fonctionne de la façon suivante : une fiducie conjugale pourrait être établie dans le testament et devenir effective à la date du décès. Si un époux décède, les actifs seront transférés à la fiducie. L’époux survivant sera nommé bénéficiaire du revenu, et personne d’autre que l’époux survivant ne peut avoir accès au capital de la fiducie. « Donc, lorsque le dernier époux survivant décède, certains ou tous les actifs pourront être octroyés aux enfants d’un mariage précédent », dit M. DiPietro.

Mme deGraaf Hastings comprend bien la dynamique des familles recomposées de par sa situation personnelle. Son mari et elle ont chacun un enfant d’une relation précédente. Lorsqu’ils sont allés rédiger leurs testaments, son avocat lui a parlé de la succession de son entreprise. « Il voulait savoir si je voulais que mon entreprise soit traitée différemment de mes actifs personnels », dit-elle.

En évoquant la planification successorale auprès de ses clients de familles recomposées, Mme deGraaf Hastings organise souvent des réunions familiales. Elle veut comprendre les problèmes des clients : depuis combien de temps le couple est ensemble, s’ils étaient ensemble durant les années scolaires des enfants, et ainsi de suite. « Il s’agit de respecter tout le monde et de s’assurer que personne n’est ignoré, dit-elle. Je peux aborder des questions difficiles pour les familles. Il vaut bien mieux avoir ces discussions lorsque les parents sont en vie qu’à la lecture du testament, lorsque les parents ne sont plus là pour s’expliquer ».

Mme deGraaf Hastings suggère parfois de nommer un bénéficiaire irrévocable dans des comptes comme un fonds enregistré de revenu de retraite. Si Frank possède un FERR, par exemple, il peut nommer sa femme Maria comme successeur/titulaire et ses enfants d’un premier mariage comme bénéficiaires irrévocables. Lorsque Frank décèdera, Maria devient la bénéficiaire du FERR. Et lorsqu’elle décèdera, les actifs de la pension seront automatiquement transférés aux enfants. « J’aime bien que les deux époux profitent de leur argent durant leur vie, mais au moins les actifs seront transférés à ses enfants », explique-t-elle.

L’assurance vie peut jouer un rôle égalisateur dans un testament entre l’époux survivant et les enfants, ajoute-t-elle.

Enfin, les clients devraient passer en revue toutes les désignations de leurs bénéficiaires et toutes les procurations pour s’assurer qu’elles reflètent bien leurs intentions.