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L’écart entre le salaire des PDG et leurs employés ne cesse de se creuser. Selon un rapport de 2019 de l’Economic Policy Institute, les salaires des PDG ont augmenté de 940% depuis 1978, alors que le salaire du travailleur moyen n’a augmenté que de 12% sur la même période. Actuellement, le rapport global entre le salaire des PDG et la rémunération moyenne des travailleurs est d’environ 278 pour un.

Lier les taux d’imposition des entreprises à l’écart entre le salaire de leur PDG et celui de leurs employés moyens permettrait d’empêcher cet écart de se creuser davantage et aiderait peut-être même à le réduire, selon la sénatrice Nancy Skinner. C’est d’ailleurs l’idée qui sous-tend le projet de loi 37 du Sénat de la Californie, qu’elle a présenté pour la première fois en décembre 2018, révèle un article de Fast Company.

« L’objectif de la SB 37 est de réduire les inégalités de revenus, a déclaré la sénatrice lors d’une audition en janvier 2020. La conception de la SB 37 reconnaît que la dépendance aux services de l’État augmente lorsque les sociétés sous-payent leurs travailleurs. »

Pour le moment, l’État de l’ouest des États-Unis impose ses institutions financières à un taux de 10,84 % et les sociétés à un taux de 8,84 %. Si la loi passait, les sociétés engendrant plus de 10 millions de dollars américains par an (M$ US) seraient soumises à un taux d’imposition compris dans la fourchette de 10,84 % – 14,85 % (et à un taux d’imposition compris entre 12,84 % – 16, 84 % pour les institutions financières).

Le pourcentage exact serait déterminé en fonction de l’écart entre le salaire des employeurs et celui des employés. Évidemment, les entreprises dont le ratio serait le plus grand auraient le taux d’imposition le plus élevé.

La loi augmenterait également ces taux d’imposition pour les entreprises qui sous-traitent à des entrepreneurs indépendants ou à des travailleurs de sociétés étrangères.

Les recettes engendrées par cette loi seraient ensuite reversées aux programmes éducatifs et aux programmes pour la petite enfance.

Pas une première

Une telle taxe n’est pas l’idée des Californiens. La ville de Portland en Oregon a ainsi déjà adopté une taxe dans ce genre. L’année suivante, le conseil municipal de Portland a exigé de la Securities and Exchange Commission de 2015 de suivre et communiquer les ratios de rémunération entre les PDG et les travailleurs moyens des sociétés cotées.

Cette loi a permis de générer 3,5 M$ US en 2017, selon Thomas Lannom, directeur de la division des revenus de Portland.

En défendant cette loi, Steve Novick, ancien membre du conseil municipal de Portland, avoue qu’il ne s’attendait pas de lutter contre les inégalités de revenus à Portland, mais davantage de diffuser l’idée de taxes sur l’écart salarial des PDG.

« Je n’ai aucune illusion sur le fait que ce que fait Portland aura un impact dramatique sur le comportement des 500 plus grandes entreprises. Mais, ce que nous avons vu ces dernières années avec les campagnes locales sur le salaire minimum, avec les congés de maladie payés, c’est qu’une idée progressiste qui commence à un endroit va se répandre à d’autres », déclare-t-il.

Quelques résistances

La loi SB 37 ne fait pas l’unanimité. La Chambre de commerce de Californie la qualifie d’ailleurs de « tueuse d’emplois » et l’Association des contribuables de Californie a déposé une lettre d’opposition au projet de loi.

« Notre opposition est basée sur l’impact négatif que l’augmentation de la taxe aurait sur l’économie et l’emploi en Californie, ainsi que sur le fait que la taxe est inutile étant donné que l’État a plus de 21 milliards de dollars de réserves », commente David Kline de l’Association des contribuables de Californie dans un courriel adressé à Capital & Main.

Et bien que le projet de loi ait été adopté par la commission sénatoriale de la gouvernance et des finances avec le soutien de tous les membres démocrates de la commission, à l’exception de la sénatrice Melissa Hurtado, le projet de loi est bloqué par la commission du règlement du Sénat, sans qu’il soit prévu d’aller de l’avant.