Une femme avec des lunettes qui hausse les épaules, ne sachant pas quoi choisir.
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Non: c’est une mission impossible. Or, peuvent-ils s’améliorer en tenant compte des critiques reçues et faire preuve d’agilité ? Certainement. La dernière décennie et tout particulièrement la dernière année l’ont démontré.

En général, les régulateurs peuvent être fiers de s’être relativement bien adaptés au télétravail imposé par la pandémie et d’avoir aidé l’industrie à le faire. Quelques observateurs de l’industrie ont souligné leur écoute et leur flexibilité, comme on peut le lire dans le texte «Souplesse bien reçue» en pages 14 et 15.

Cela démontre que les régulateurs ont acquis une certaine maturité dans l’exercice de leurs fonctions. Et c’est de bon augure pour l’ensemble de l’industrie:des régulateurs agiles sont un ingrédient d’une industrie résiliente et saine.

Ce gain de maturité est d’autant plus pertinent aujourd’hui lorsqu’on regarde l’ensemble du chemin parcouru depuis les deux dernières décennies.

Depuis que Finance et Investissement a lancé son tout premier Pointage des régulateurs, en 2010, les régulateurs semblent avoir fait des pas de géant sur le plan du rapprochement avec l’industrie et de la sensibilité à l’égard de ses préoccupations.

Dans les premières années de ce sondage annuel qui permet aux régulateurs de cibler des occasions d’amélioration, les commentaires des répondants à leur endroit étaient très critiques, voire teintés d’aversion.

À l’époque, ceux-ci étaient perçus parfois comme déconnectés, dans leur tour d’ivoire, ou très peu sensibles aux réalités de l’industrie. «Nos relations d’affaires sont médiocres avec l’Autorité des marchés financiers [AMF]», indiquait, en 2012, un répondant au Pointage des régulateurs. Durant les premières années de ce sondage, les notes étaient généralement basses comparativement à celles d’aujourd’hui et la majorité des avis et commentaires portant sur les critères étaient négatifs.

Aujourd’hui, les choses sont différentes. En général, l’industrie semble mieux comprendre ses régulateurs et vice versa. Les canaux de communication entre eux sont ouverts.

Davantage de commentaires font état des bons coups des régulateurs pour certains éléments évalués. Par exemple, en 2021, un répondant du secteur de l’épargne collective souligne la «rapidité de rétroaction de l’AMF dans le cadre de rencontres ou d’appels sur des suivis effectués pour des examens ciblés ou des lignes directrices».

En général, les notes sont un peu plus élevées qu’elles ne l’ont été par le passé et les répondants sont plus enclins à formuler des critiques constructives.

Toutefois, concilier la protection du public et l’efficience des marchés reste un rôle ingrat pour les régulateurs, et il requiert de trouver un juste équilibre. L’industrie n’est pas pour autant tombée amoureuse de ses régulateurs et demeure critique.

Les incompréhensions vont subsister. Les changements, réformes réglementaires et bouleversements dans l’industrie moduleront l’humeur de celle-ci à l’égard de ses régulateurs.

Tant qu’on restera dans un régime démocratique, les régulateurs doivent s’attendre à se faire critiquer. Tout encadrement réglementaire reste perfectible et les assujettis continueront à juste titre de souligner les occasions d’amélioration. Et notre rôle comme média d’information sera de continuer de les faire connaître, dans un objectif d’aider les parties à mieux cohabiter. En toute humilité, avec nos sondages annuels, qui n’ont jamais eu de prétention scientifique, nous croyons avoir contribué à cet objectif au fil des ans, à notre manière.

Nouveau sondage 

Cette année, Finance et Investissement a également ajouté un outil à son coffre afin d’atteindre ce but. Nous avons créé le sondage web «La CSF perçue par ses membres». Cette enquête donne l’occasion à ceux-ci de s’exprimer à l’égard de cet organisme d’autoréglementation (OAR). Nous les avons sondés du 19 novembre au 16 décembre 2020, et les résultats révèlent qu’il existe encore des cicatrices du débat sur la pertinence de la Chambre de la sécurité financière (CSF), qui a eu lieu de manière intense en 2017 et en 2018.

La CSF continue de polariser l’industrie et ses membres.

Certains l’adorent, d’autres la déteste. On l’observe tant sur le plan des commentaires reçus que sur celui des notes chiffrées que lui accordent les répondants: différents indicateurs statistiques démontrent une dispersion des notes, dont les moyennes sont présentées dans le tableau de la page 15.

En février 2020, le cabinet du ministre des Finances du Québec, Eric Girard, prônait le statu quo lorsque Finance et Investissement lui a demandé si la CSF devrait être intégrée à l’AMF. Sa survie n’est donc pas en jeu pour le moment.

Cependant, la réforme du cadre réglementaire des OAR, qui fait l’objet de consultations actuellement par les Autorités canadiennes en valeurs mobilières (ACVM), pourrait représenter une menace pour la CSF, comme l’indiquait un conseiller sondé: «La priorité de la CSF devrait être de trouver une solution pour assurer sa pérennité advenant le cas où l’Association canadienne des courtiers de fonds mutuels [ACFM] fusionnerait avec l’Organisme canadien de réglementation du commerce des valeurs mobilières [OCRCVM] et que le nouvel organisme prendrait en charge les représentants en épargne collective du Québec.» Les ACVM comptent publier cet été des recommandations concernant le cadre réglementaire s’appliquant actuellement à l’OCRCVM et à l’ACFM. Il s’agit d’un dossier à suivre.

Comme tous les autres régulateurs et ordres professionnels, la CSF a un rôle ingrat à jouer et sa mission de protection du public ne lui vaudra pas toujours des éloges de l’industrie, même lorsqu’elle s’améliorera. «Je ne connais pas un notaire qui trippe sur la Chambre des notaires du Québec !»résume un conseiller sondé.

Revenons à nos remarques générales sur les régulateurs. Peu importe le régulateur ou l’OAR, son rôle restera ingrat et difficile. Il ne gagnera jamais de concours de popularité. Avec ses actions ou réformes, il se fera tantôt aimer par les uns et tantôt en décevra d’autres.

Or, avoir un bon cadre réglementaire et des régulateurs qui jouent leur rôle de manière efficiente est un avantage indéniable afin de stimuler la confiance dans l’industrie financière. Et même si celle-ci n’est pas toujours prompte à le souligner, elle en tire tout de même les avantages chaque jour.

L’équipe de Finance et Investissement