Risques de taux et placements alternatifs

Ce n’est pas nécessairement le cas, mais le hic c’est que la valorisation des actifs est basée entre autres sur le taux sans risque, tel que mesuré par les obligations souveraines américaines. Un taux très faible supporte des valorisations élevées, mais à l’inverse, une hausse des taux conduira à un réajustement du prix de tous les actifs.

Depuis octobre 1981, les obligations américaines ont connu un marché haussier en raison de la baisse quasi constante des taux d’intérêt.  Rappelons qu’une baisse des taux se traduit par une hausse du prix des obligations. Même si les taux pourraient baisser encore en raison d’une prochaine crise, il y a beaucoup moins de potentiel de baisse que par la passé, les taux étant déjà très bas. Par ailleurs, si l’économie américaine continue à croître, la Réserve fédérale entamera une hausse des taux, prévue pour le 2e trimestre de 2015 selon les marchés des futurs.

Que faire?

Le portefeuille typique 60:40, soit 60% actions et 40% obligations, n’est pas aussi intéressant que par le passé. Le 60% représenté par les actions comporte un risque de baisse de marché. En effet, le S&P 500 a maintenant progressé depuis 35 mois sans une baisse de 10% ou plus et, quoique l’optimisme soit de mise à long terme, une certaine prudence est de mise à court terme.

Le 40% représenté par les obligations offre un coupon faible avec un potentiel limité d’appréciation. De plus, dans la mesure où les taux augmenteront, les obligations perdront de la valeur de façon ponctuelle. Peu importe, détenir une obligation américaine de 10 ans à échéance à partir d’aujourd’hui rapportera 2,54% par année; toutefois, en prenant en compte l’inflation, il est possible que le rendement soit négatif.

Dans la mesure où vous craigniez une hausse des taux, il y a plusieurs façons de positionner son portefeuille pour bénéficier d’une éventuelle hausse des taux. Pour les obligations, privilégier des maturités plus courtes et les taux flottants (levered loans). En ce qui concerne les actions, favoriser les titres qui bénéficieraient d’une hausse des taux d’intérêt : les financières dont les banques américaines et les assureurs-vies.

Tandis que les banques bénéficieront d’une éventuelle hausse des taux à travers un écart plus important entre le taux sur les prêts qu’ils font et les dépôts qu’ils acceptent (net interest margin ou NIM), les assureurs-vies bénéficieront de la possibilité de réinvestir leurs actifs dans des obligations ayant un rendement plus élevé ainsi qu’à travers la mécanique où leurs obligations futurs baisseront plus rapidement que leurs actifs. À l’inverse, certains secteurs sont à sous-pondérer : services aux collectivités, fonds de fiducies immobilières et titres à dividendes élevés sans perspectives de croissance.

Et les fonds de couverture là-dedans?

Étant donné la possibilité de positionner son portefeuille pour une éventuelle hausse des taux en sélectionnant des obligations et des actions appropriées, quel est l’utilité des fonds de couverture? Les suggestions d’investissement ci-dessus sont basées sur une thèse de base : les taux augmenteront à moyen terme. Si l’inverse se produit, les suggestions mentionnées ci-avant risquent de générer une sous-performance, voir des pertes.

À l’inverse de positionner son portefeuille en fonction d’un scénario macroéconomique précis, une hausse des taux, une allocation à certaines stratégies de hedge funds offre un rendement espéré positif sans devoir prendre un pari sur l’inflation ou la déflation. Dans ce contexte, des stratégies à considérer sont les stratégies de sélection de titres neutre au marché ou de global macro. De plus, comme les stratégies comportent un niveau élevé d’encaisse qui est investi dans des obligations à court terme, une hausse des taux augmentera le rendement espéré, car l’encaisse excédentaire pourra être investie à un taux court terme plus élevé.

La stratégie de sélection de titres neutre au marché offre un rendement espéré supérieur à une obligation sans prendre le risque des taux d’intérêt. En construisant un portefeuille avec autant de titres achetés que vendus à découvert et surtout en évitant des paris sectoriels, le risque lié aux taux d’intérêts est éliminé.

La stratégie global macro et, plus précisément, la sous-stratégie de fonds de contrats à terme (CTA) offre un rendement en ligne avec celui des actions mais sans que la direction du marché soit importante. Les CTA, aussi connus sous le nom de « trend followers », génèrent des gains en se positionnant dans les actifs ayant connu un fort mouvement haussier ou baissier et qui sont susceptibles de voir le mouvement continuer. Ainsi, la stratégie pourra générer des gains, que les taux augmentent ou baissent, en misant non seulement sur les obligations mais aussi sur les autres actifs qui seront affectés par une hausse des taux d’intérêt.

Photo Bloomberg

Ce texte provient du Stratège, une publication de l’Association de planification financière et fiscale (APFF), et a été écrit par Yves Caron.