Un plateau repas, dont on soulève le couvercle. À l'intérieur il y a un sac d'argent, des billets et de la monnaie.
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En rétrospective, on observe que la diversification d’un portefeuille, en y ayant intégré une rente viagère prescrite assurée, a généré un revenu viager garanti supérieur aux revenus fixes en cours aujourd’hui et que le coût de l’assurance vie servant à assurer ladite rente a du même souffle augmenté depuis, donnant aux polices souscrites à cette époque une juste valeur marchande appréciée.

Avant le 1er janvier 2017, on utilisait une table de mortalité décalée, soit celle de 1971 afin de déterminer la partie imposable de la rente. Cet écart, jumelé avec des taux d’intérêt antérieurement plus élevés, ajoutait de la valeur aux rentes viagères. Toutefois, la baisse graduelle des taux d’intérêt de la dernière décennie a fait perdre un peu de lustre aux rendements des rentes de sorte que lorsque la loi a changé en janvier 2017, le bien-fondé de cet instrument financier fut doublement remis en question.

Les hausses du taux directeur en 2018 ont-elles permis de renverser la vapeur et de donner aux rentes viagères plus de profitabilité malgré la nouvelle table de mortalité et la majoration de la portion imposable des rentes prescrites?

Si le rendement n’est pas l’unique objectif en matière de placement, quoiqu’il détermine la capacité d’un produit financier à revenus fixes à verser les sommes prévues avec le plus de prévisibilité et de durabilité possible, l’inclusion d’une rente viagère au sein du portefeuille permettra à l’investisseur de sécuriser une portion des revenus qui ne demande pas de gestion et de connaître à l’avance le montant de l’annuité dont le paiement viager ne saurait épuiser le capital du vivant du rentier.

Selon les Normes d’hypothèses de projection 2018 de l’IQPF, une personne de 65 ans a 25 % de probabilité d’être toujours en vie à 94 ans s’il s’agit d’un homme et à 96 ans s’il s’agit d’une femme. Toujours selon ces normes, on peut s’attendre à un rendement de 3,90 % pour les revenus fixes. De leur côté, les taux cinq ans des certificats de placement garanti (« CPG ») frôlent les 2,65 %.

Un taux moyen, arrondi à la hausse, de 3,50 % sera utilisé pour illustrer le rendement du placement optionnel nommé CPG dans les exemples ci-après.

Les rentes viagères assurées pourraient jouer un rôle de choix dans l’équilibrage d’un portefeuille de placement chez un homme de 65 ans qui vient de vendre son entreprise.

Vente d’entreprise et rente assurée

Il est courant que le vendeur reçoive en échange de ses actions de gel une somme d’argent en mains propres. Dans le cas d’un gel partiel effectué en 2016, les actions privilégiées pourraient représenter près de 825 000 $ libres d’impôt lors de la disposition. En tenant pour acquis que ces actions ne pèsent pas plus de 25 % du capital financier du client, l’utilisation d’une rente assurée constitue une option envisageable pour structurer le décaissement du revenu de retraite. Dans cet exemple, le produit de la vente additionnel de 4 M$ se trouve dans la société de portefeuille. Le client est bénéficiaire d’un régime de retraite individuel (« RRI ») de 600 000 $ qui sera transféré à la société de gestion.

Ce client est divorcé et père de deux enfants. L’objectif est de réduire au mieux l’impact fiscal des revenus issus des sommes encaissées afin d’éviter le remboursement de la prestation de la Sécurité de la vieillesse (PSV) à laquelle plusieurs contribuables tiennent et de protéger le patrimoine successoral.

L’attrait de la rente assurée à titre d’investissement des 825 000 $ repose, entre autres, sur sa fiscalité. En 2008, alors que les taux de CPG rejoignaient les 5 % et que le taux marginal d’imposition s’élevait à 48,21 %, le revenu net de la rente assurée dépassait de 64 % celui du CPG, soit 35 140 $ nets par année pour la rente et 21 634 $ pour le CPG.

Aujourd’hui, le retraité de 65 ans obtiendrait 54 % de plus, soit un revenu net de 13 476 $ pour le CPG à 3,50 % et de 20 700 $(1) pour la rente assurée. La rente viagère génère 4 305 $ par mois (51 660 $), desquels sont soustraits 422 $ d’impôt et 2 158 $ de coût d’assurance vie.

D’un autre point de vue, afin de procurer les mêmes résultats du côté du CPG, il faudrait entamer de 7 224 $ par année le capital initial de 825 000 $ pour concurrencer la rente. Dans l’esprit où les taux demeurent semblables, le capital investi dans les CPG vaudra 623 607 $ à l’espérance de vie (87 ans) et 568 887 $ à 92 ans en comparaison du capital assuré de 825 000 $. L’utilisation de cette stratégie procurera un meilleur rendement tant que les placements combinés de revenus fixes et de CPG garantis ne dépasseront pas 5,37 %.

Dans cet exemple, il serait recommandé de souscrire la police d’assurance vie à l’intérieur de la société de gestion. Au décès, la succession recevra le montant de l’assurance vie libre d’impôt si le coût de base rajusté de la police est égal à zéro. Pour le particulier, le revenu net devient 46 596 $ alors que la partie imposable ne s’élève qu’à 9 497 $. Comme on souhaite préserver la rente fédérale dans le temps, cela laisse plus de latitude dans la politique de décaissement du RRI et des dividendes de la société. Si le retraité préfère opter pour une rente viagère enregistrée avec une garantie de retour de prime dans son RRI, il pourrait actuellement encaisser 34 200 $ par année. Diverses modalités sont disponibles pour ce type de rente, dont l’indexation.

À la question du titre du présent article, on répondra donc qu’un portefeuille équilibré peut toujours comprendre une rente pour diversifier la source des revenus fixes et que la forme de rente dépendra des objectifs du retraité, de sa structure financière et de sa tolérance au risque.

1- Sauf erreurs et omissions à des fins d’illustration seulement, les valeurs et les taux varient d’un assureur à l’autre. Le lecteur est également invité à se reporter aux illustrations d’assurance, aux libellés des contrats et aux documents d’information des sociétés d’assurances pour obtenir des précisions sur les questions d’assurance et de rentes.

Anne-Marie Girard-Plouffe, Pl. Fin., AVA, TEP, FCSI
Option Fortune, Cabinet de services financiers et de gestion de patrimoine
amgirardp@optionfortune.com

Ce texte a paru initialement dans le magazine Stratège de l’APFF, vol. 24, no 2, été 2019.