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Pour éviter ce résultat, Daniel Laverdière, directeur principal, centre d’expertise, Banque Nationale Gestion privée 1859, signe un texte dans la dernière édition de Finance et Investissement dans lequel il souligne qu’il est erroné de comparer les taux de participation de ces polices avec les rendements prévus d’un certificat de placement garanti (CPG), d’un portefeuille obligataire ou d’un portefeuille d’actions.

« Comparer les taux de participation avec le rendement d’une obligation ou d’un CPG équivaut à comparer des pommes avec des marteaux », indique-t-il en substance dans ce texte.

Lire : Vie entière : les taux de participation ne sont pas du rendement

Le principal problème découle de la manière dont les assureurs présentent les taux de participation affichés. Ils les placent souvent dans un tableau qui juxtapose les taux de participation affichés avec le rendement et la volatilité des rendements des CPG, des titres d’un indice obligataire ou d’un indice boursier, comme le S&P/TSX.

Or, les participations n’ont rien à voir avec le rendement de ces titres ou ce genre de produits financiers, selon Daniel Laverdière.

Les participations sont un avantage aux titulaires de polices, versé périodiquement, qui provient des bénéfices générés par la police, note-t-il : « Les participations proviennent de l’écart favorable entre les hypothèses de tarification d’un assureur et les résultats réels qu’il enregistre. »

Les principales sources d’écart sont les rendements futurs sur les primes investies, les taux de mortalité de demain, les déchéances (abandons) de contrats, l’évolution des frais administratifs notamment en période d’inflation, explique-t-il.

Au moment de la fixation de la prime, l’actuaire se positionne sur chacune de ces variables et adopte une approche conservatrice (ex. : moins de rendement, plus de mortalité). En conséquence, la prime fixée au titulaire est beaucoup plus élevée, mais cet excédent exigé sera éventuellement retourné sous forme de « participations » aux titulaires de ces contrats, fait-il valoir.

« Voici un élément clé, les taux de participation sont en partie des primes payées en trop qui sont retournées au client en raison d’hypothèses conservatrices. Ceci est loin d’être comparable à un rendement sur un placement », soutient-il.

De plus, si les taux de participation sont stables, c’est entre autres « parce que les assureurs utilisent des méthodes de nivellement des résultats (techniques d’uniformisation) afin de lisser les participations annuelles accordées. Par exemple, les assureurs peuvent reporter dans le temps les gains et les pertes sur les titres à revenu fixes et les actions de leur portefeuille grâce à une mécanique comptable », note Daniel Laverdière.

Il est vrai que les taux de participation pourraient créer de la confusion auprès des conseillers, estime Jean Turcotte, directeur, groupe fiscalité, assurance et gestion de patrimoine: « Il y a une mauvaise compréhension du taux de participation des polices vie entière. Il y a probablement des conseillers qui vendent cela comme du taux qui sera crédité au client. “Monsieur le client, ça paie du 6,25 %”. Cela n’est pas une affirmation qui est juste. »

« Ce qui est juste, c’est que le taux de participations de 6,25 % est le taux déclaré par l’assureur. Par la suite, ce qui est versé dans le compte de vie entière du client, c’est un taux qui va varier en fonctions de différents facteurs techniques [comme la mortalité, la déchéance, les réclamations]. Et ce taux, on ne les connaît pas d’avance et (…) il n’est pas garanti », ajoute-t-il.

Selon lui, la façon dont les assureurs présentent ces taux de participation a pour but de donner un élément de comparaison : « La façon dont on déclare le taux de participation est standard pour les assureurs. L’idée est d’avoir des obligations et des CPG [dans le tableau], c’est juste à titre de comparaison et donner un ordre de grandeur. »

Jean Turcotte explique que le taux de participation réellement crédité au compte d’un titulaire de police d’assurance VEAP varie selon le contrat de chaque titulaire. Il est donc différent et peut être inférieur au taux de participation affiché lorsque le rendement du contrat est inférieur aux attentes initiales de l’assureur.

Les participations destinées aux titulaires de contrat ne sont pas garanties et peuvent varier d’un exercice à l’autre, selon un document explicatif de la Financière Sun Life.

« Rappelons-le, les participations sont la répartition entre les titulaires des gains réalisés découlant des hypothèses par rapport aux résultats réels. Si les résultats sont catastrophiques, par exemple parce que les rendements sont inférieurs aux attentes, la mortalité est élevée, il y a moins d’abandons de contrats que prévu et les coûts administratifs sont en forte croissance, on pourrait techniquement voir des pertes s’accumuler. Dans ce cas, les participations deviendraient nulles, et les prestations [par exemple le capital-décès] se rapprocheraient des valeurs garanties et des assurances libérées souscrites avec les participations antérieures », écrit Daniel Laverdière.

Dans les tableaux comparatifs de certains assureurs où l’on juxtapose les taux de participation avec les rendements des actions, la volatilité exprimée est d’ailleurs celle du taux de participation déclaré par l’assureur au fil des ans et non la volatilité du taux de participation réellement crédité au compte d’un titulaire anonyme.

Cette façon de comparer la volatilité du taux de participation affiché et de l’indice S&P/TSX suscite un malaise chez Daniel Laverdière et renforce son idée que l’on compare des pommes avec des marteaux.

Par ailleurs, une VEAP est d’abord un produit d’assurance vie, lequel implique un transfert de risques d’un particulier à une compagnie d’assurance vie en échange d’une prime, soutient note Jean Turcotte : « Il faut comprendre que c’est un produit d’assurance et qu’il y a un coût à l’assurance. On paie un coût du risque. »

En clair, une police d’assurance VEAP n’est pas un produit d’investissement à proprement dit. C’est pourquoi Daniel Laverdière préfère qu’on ne compare pas la première avec les seconds.