Ian Provost, photo gracieuseté Banque nationale du Canada

Travaillant depuis 26 ans à la ­Banque ­Nationale, ­Ian ­Provost a mené sa carrière au sein de la plus grande banque québécoise.

Il est conseiller principal en gestion de patrimoine et gestionnaire de portefeuille au ­Groupe ­Vo-Dignard ­Provost, gestion de fortune familiale à la ­Financière ­Banque ­Nationale.

Il a cofondé avec un associé, ­An-Lap ­Vo-Dignard, le groupe il y a 21 ans, « bientôt 22 », ­précise-t-il, fier du chemin parcouru. Son équipe gère aujourd’hui un actif de plus de 3 G$ et sert environ 700 familles.

« ­Des familles pour la plupart aisées, qui comptent sur le travail de notre équipe multidisciplinaire, notre soutien administratif, des conseillers en placement, des analystes, des gens de marketing. Nous avons aussi notre propre comité de gestion. » ­Au total, ce sont 15 employés qui permettent au groupe d’offrir à leurs clients des solutions pour l’ensemble de leurs besoins de gestion de patrimoine.

Dès leur tout début, au tournant des années 2000, les fonds négociés en ­Bourse (FNB) ont fait partie de leur arsenal d’outils.

« ­Nous avons toujours été à l’affût de nouveaux produits et de nouvelles stratégies pour répondre aux besoins de nos clients. C’est le travail de nos analystes de faire une vigie constante de ce qu’il se fait de novateur et de ce qui pourrait nous aider à mieux gérer le risque et mieux diversifier nos portefeuilles. C’est pourquoi les ­FNB ont fait partie très tôt de notre pratique », explique Ian Provost.

Ce type de produit leur offre davantage de latitude et de diversification, l’utilisation qu’ils en font cadre aussi avec leur philosophie d’investissement prudente. « ­Nous visons la préservation du capital, dans un premier temps, et la maximisation du rendement dans un deuxième temps. Et non l’inverse. Nos clients sont aisés et leur préoccupation première est de préserver leur actif. »

Leur emploi des ­FNB a passablement évolué avec le temps. « ­Nous les utilisions de manière plus passive au départ, tandis qu’aujourd’hui – bien appuyés par nos analystes –, nous avons élargi le spectre de leur usage. »

Le conseiller en placement mentionne leur côté liquide, qui leur permet plus d’agilité et de rapidité d’exécution. « L’arrivée d’une offre plus variée de ­FNB nous a donné cette agilité additionnelle, en plus de nous permettre de diversifier des styles de gestion de façon passive et ponctuelle en diminuant ou en augmentant l’exposition à un secteur d’activité donné ou à une région géographique. Cela représente en ce sens un outil drôlement intéressant. »

Pertinents, les ­FNB de titres à revenu fixe

Cette liberté d’action et cette flexibilité sont, par exemple, ce qui les a incités à utiliser les ­FNB pour se protéger des hausses de taux d’intérêt. « L’an dernier, on a utilisé ponctuellement des ­FNB d’indices obligataires de très courte durée, ce qui nous a permis de travailler sur la duration de notre [portefeuille de titres à] revenu fixe. Il existe des ­FNB avec des durées aussi courtes qu’un trimestre, cela permet de nous protéger et d’être moins touchés par les hausses de taux », dit Ian Provost.

Inversement, s’ils jugent qu’ils ont atteint un certain seuil et qu’ils veulent se déplacer sur la courbe des rendements obligataires, les conseillers pourront choisir d’autres types de ­FNB avec des durées plus longues.

Il évoque aussi leur utilisation dans la foulée de la banqueroute récente de la ­Silicon Valley Bank. Celle-ci avait ébranlé le secteur financier américain, lequel se négociait dans son ensemble à des valeurs historiquement basses.

« ­Sans sélectionner des titres en particulier, l’utilisation de FNB nous a permis d’être exposés rapidement au secteur des grandes banques américaines et de profiter de ce que nous jugions être une bonne occasion d’achat. Et lorsque notre comité de gestion trouve que ce n’est plus à propos, il est facile de défaire la transaction. »

Dans le même esprit, ­Ian ­Provost rappelle que la chute importante des marchés au commencement de la crise sanitaire en 2020 a représenté une occasion d’achat pour les actions. « ­Par l’intermédiaire des ­FNB, nous avons pu rapidement diminuer notre exposition aux titres à revenu fixe et augmenter notre exposition en actions, une catégorie d’actifs qui avait été en défaveur. »

Ian ­Provost se souvient d’ailleurs de cette période de turbulence et de l’ampleur de la charge de travail au plus fort de la période de confinement.

« ­Même si physiquement nous étions isolés comme tout le monde, nous avons été très présents pour nos clients afin de bien gérer le stress, leur éviter de faire des erreurs et de vendre au mauvais moment. »

Parler aux clients était crucial. « ­Il y avait un grand besoin de communiquer et toute notre équipe a été très présente. » C’est aussi le cas dans le contexte actuel de la hausse des taux d’intérêt, un phénomène qui a été moins connu au cours des dernières décennies. « ­Il faut faire un certain travail d’éducation. Expliquer ce qui peut se passer. Expliquer la pression que cela suscite sur la valeur marchande temporaire du portefeuille d’un particulier, etc. »

Utiles pour décaisser

Par ailleurs, dans une optique de gestion active, les ­FNB peuvent aussi être utiles pour faire des rééquilibrages, selon Ian Provost. « ­Si l’on fait de l’allocation sectorielle, il y a moyen de réduire rapidement l’exposition aux actions pour surpondérer les obligations sans avoir à vendre de titres [individuels]. »

Ian ­Provost constate aussi l’utilité des ­FNB pour les clients qui sont en période de décaissement.

Prenons le cas d’un client qui détient à la fois des parts de FNB d’actions américaines et des actions individuelles de certaines entreprises américaines. Pour différentes raisons, son conseiller juge préférable de conserver ­celles-ci à long terme, mais qu’il est temps de réduire l’exposition du portefeuille du client au marché américain. Le représentant pourrait alors privilégier la vente des FNB plutôt que des titres individuels, en raison de leur facilité de négociation.

Il estime aujourd’hui que la partie de l’actif dans leur portefeuille type qui se retrouve dans des FNB est de 5 à 15 %, mais précise que cette donnée est plutôt variable et dépend des périodes. Leur utilisation se fait en périphérie du portefeuille de type ­cœur-satellite.

Ian ­Provost mentionne, par exemple, que sur le plan international, les ­FNB peuvent être fort commodes. « ­Nous sommes excellents pour la gestion d’actions canadiennes et américaines, compte tenu notamment de notre géolocalisation. Mais en étant sur un autre fuseau horaire pour les marchés boursiers étrangers, les ­FNB qui détiennent des titres internationaux ou des gestionnaires institutionnels externes peuvent être des ressources utiles pour optimiser notre gestion de portefeuille. »

Le représentant note par ailleurs que les ­FNB peuvent aussi être avantageux pour mettre en œuvre la stratégie de vente à perte de titres à des fins fiscales dans les comptes non enregistrés. « ­Si, par exemple, dans une période comme l’année dernière, des titres bancaires de qualité que l’on voudrait conserver à long terme représentaient une perte fiscale temporaire, il est possible de vendre ces titres et d’acheter l’indice bancaire pendant trente jours afin de rester exposé au secteur, puis de déclencher la perte fiscale pour les clients à des fins d’impôt et de réintégrer ensuite les positions au terme du délai », ce qui permet d’éviter l’application des règles sur les pertes apparentes.

Le gestionnaire de portefeuille est d’avis que l’élan et la popularité des ­FNB sont appelés à se poursuivre. « ­Cela ne va pas arrêter et nous demeurons ouverts et disposés à [en tirer parti], car ce sont des outils utiles. » ­Il précise par ailleurs qu’outre les ­FNB de la ­BN, son équipe fait appel aussi aux produits d’autres manufacturiers, comme iShares (BlackRock) et ­Vanguard.

« ­Nous restons ouverts aux produits novateurs qui peuvent nous interpeller. Il existe, par exemple, des ­FNB à structure de revenu qui peuvent être des produits intéressants pour les gens en période de décaissement et qui méritent notre attention. »

À l’heure actuelle, son équipe et lui utilisent à la fois des FNB indiciels (à gestion passive) et des FNB à gestion active qui ciblent des secteurs particuliers.

Interrogé à savoir si les FNB répondaient à un besoin particulier de leurs clients, le conseiller a rappelé que certains avaient posé des questions par rapport à ce produit, mais que leur clientèle leur faisait confiance et que l’utilisation de ­FNB s’inscrivait dans une stratégie globale de gestion de portefeuille.

Quel conseil ­a-t-il pour un représentant qui commence à travailler avec les FNB ? « ­Qu’il se joigne à notre équipe », répond-il à la blague.

« ­Plus sérieusement, d’abord de s’assurer de bien comprendre la structure des fonds dans lesquels il songe investir. Il faut prendre le temps de bien décortiquer le produit et éviter de tomber dans le piège du ­FNB qui n’ajoute rien au portefeuille. »

Étant donné la croissance rapide de l’offre dans ce secteur, ­
Ian ­Provost soutient que la prudence reste de mise et qu’il faut rester vigilant à propos des produits dans lesquels on investit.