Régime matrimonial et patrimoine familial

Danielle Beausoleil, notaire et associée de l’étude Prud’Homme Fontaine Dolan, explique qu’elle invite les couples à venir la rencontrer environ quatre mois avant le mariage, car il y a des décisions importantes à prendre.

« Par exemple, le futur époux ou épouse a un placement de 25 000 $ qui va venir à échéance trois mois après le mariage et il entend payer une importante partie de l’hypothèque de leur future maison avec ce montant-là. Si le paiement est fait avant le mariage, cette portion de 25 000 $ n’est pas partageable dans le patrimoine familial, parce qu’elle a été versée en réduction de l’hypothèque avant mariage », décrit la notaire.

En revanche, si la personne attend trois mois parce qu’elle ne veut pas perdre ses intérêts, la totalité des sommes qu’elle versera pour l’hypothèque sera partageable, car le versement aura lieu après le mariage.

Il y a donc des décisions à prendre avant l’union, que ce soit pour l’achat d’un véhicule ou la cotisation REER, cela peut faire toute la différence sur ce que le couple devra partager ou non.

Par exemple si l’on achète une voiture avant le mariage, si on la paie en totalité avant, sa valeur ne sera pas partageable dans le patrimoine familial et cela peut importe l’utilisation.

« La philosophie du législateur veut que le couple partage la valeur des biens qu’il a acquis grâce aux efforts conjugués des deux personnes. En revanche, il considère que l’autre n’a pas participé à l’économie acquise avant le mariage. Donc le législateur protège les biens acquis avant mariage », souligne la notaire.

Dans le cas de l’achat d’une voiture, d’un montant de 50 000 $, achetée et payée intégralement avant le mariage, peu importe le régime matrimonial, la valeur du véhicule ne sera pas partageable. En revanche, si la personne a payé 25 000 $ avant le mariage et qu’elle paie les 25 000 $ restants après être mariée, la portion qui provient des économies du mariage va faire l’objet d’un calcul au jour du partage.

Autre situation : l’un des conjoints a acquis une maison avant mariage et le couple décide de s’y installer après le mariage. Par la suite, des rénovations sur la maison sont nécessaires et les dépenses sont assumées par les deux époux.

« Il faut comprendre que celui qui n’est pas propriétaire et qui investit dans l’immeuble de son conjoint doit se poser la question : est-ce que je fais un don ou un prêt? Si je fais un prêt, il faut le consigner sur papier, alors que si c’est un don, cela veut dire que cela fait partie de la vie du couple et qu’ils investissent ensemble dans l’aménagement. Il faut alors se demander si un jour, la personne qui n’est pas propriétaire va récupérer cette somme dans le cas où la propriété n’était pas entièrement payée le jour du mariage », analyse Danielle Beausoleil.

Si la propriété était entièrement payée avant le mariage, l’époux en question ne récupérerait rien, et cela même s’il s’agit d’une société d’acquêts, puisque selon les règles du patrimoine familial, la valeur partageable est de zéro.

Le principe est que l’on doit d’abord régler le patrimoine familial. La valeur de certains biens ne sera pas partageable grâce aux exclusions et aux déductions. Autrement, si les biens ne sont pas dans le patrimoine familial, ils tombent dans le régime matrimonial. Dans tous les cas, on ne traite jamais deux fois le même bien, soit, il fait partie du patrimoine familial, soit, du régime matrimonial.
 

Photo Bloomberg