En matière de fiscalité, il est possible d’être bigame, soit d’avoir deux conjoints reconnus.

« On peut être reconnu comme bigame si, par exemple, on est marié avec quelqu’un et qu’on s’en sépare sans qu’il y ait eu divorce. En effet, on peut être séparé de fait ou séparé légalement en ayant fait le partage du patrimoine familial, sans être divorcé », explique Annie Boivin, fiscaliste et vice-présidente, planification patrimoniale et successorale chez Richardson GMP.

Dans ce cas, on pourrait donc avoir un nouveau conjoint de fait tout en étant toujours marié avec notre ex. Aux yeux de certaines lois, puisqu’il n’y a pas eu divorce, l’ancien époux sera toujours un conjoint reconnu. On se retrouve alors avec deux conjoints, l’ancien époux et le conjoint de fait.

« Ça risque de poser des problèmes ou de mauvaises surprises au décès si la personne est séparée et non divorcée, et qu’elle vit avec quelqu’un d’autre. Elle aura deux conjoints fiscalement reconnus », souligne Annie Boivin.

Dans le cas du REER, deux conjoins peuvent être reconnus. Par exemple, avec un REER de 200 000 $, le liquidateur pourra choisir de rouler, donc de transférer sans incidence fiscale, 100 000 $ à chacun des conjoints reconnus.

« En ce qui concerne le CELI, les deux conjoints peuvent être désignés selon la définition de survivant, un particulier qui au moment du décès était l’époux ou le conjoint de fait », note Annie Boivin.

La reconnaissance peut être plus ardue selon la loi qui est concernée. En effet, la définition de conjoint peut différer selon les programmes de la Régie des Rentes du Québec. Cette définition détermine souvent l’admissibilité du conjoint à une rente ou à une prestation.

« Par exemple, ni le conjoint de fait, ni le conjoint dont vous êtes séparé légalement ne sera reconnu comme votre conjoint par votre régime complémentaire de retraite, ni pour votre compte de retraite immobilisé (CRI) ni pour votre fonds de revenu viager (FRV), indique Annie Boivin. La rente de conjoint survivant sera plutôt versée au conjoint de fait reconnu (c’est-à-dire après trois années de vie commune) si la personne décédée était séparée légalement et qu’elle vivait en union de fait avec une autre personne.»

Pour être reconnu comme conjoints par le fisc, il ne suffit pas d’ailleurs que deux personnes vivent à la même adresse. La loi édicte que les deux personnes doivent vivre de « façon maritale ».

Elles n’ont donc pas besoin d’habiter à la même adresse pour être considérées comme des conjoints. Elles pourraient, par exemple, avoir deux adresses parce qu’elles travaillent dans deux villes différentes et être quand même considérées par le fisc comme des conjoints.

« Toutefois, la bigamie fiscale ne vous autorise pas à fractionner vos revenus avec deux conjoints, rappelle Annie Boivin. Et chaque loi a sa propre définition du conjoint, il faut faire très attention. On parle souvent du conjoint admissible. »