Un aimant qui attire des billes de métal sur une cible
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La CSF réussirait ainsi à mieux accomplir les tâches liées à sa mission, lesquelles devraient être améliorées. C’est ce que révèle le sondage en ligne «La CSF perçue par ses membres», mené par Finance et Investissement à l’automne 2020.

Selon ce sondage, 50,6 % des répondants estiment que le conseil d’administration (CA) de la CSF et ses autres structures de gouvernance devraient comprendre davantage de consommateurs ou d’organisations qui défendent leurs intérêts.

Nous avons aussi demandé aux membres de la CSF de déterminer, parmi six possibilités d’amélioration, laquelle ou lesquelles devraient constituer des priorités majeures pour la haute direction et le CA de la CSF.

Ainsi, 51,5 % des 103 répondants à cette question jugent que la CSF devrait améliorer la formation de son personnel afin d’éviter les incompréhensions entre l’organisme et l’industrie. De plus, l’amélioration de ses communications avec les services de conformité des courtiers et des cabinets de services financiers devrait être une priorité, selon 46,6 % des répondants.

Pour 37,9% des participants au sondage, améliorer les échanges d’informations entre la direction de la déontologie et de l’éthique professionnelle de la CSF et ses homologues à l’Autorité des marchés financiers (AMF) est une priorité.

Éviter toute apparence de conflit d’intérêts entre le personnel de la CSF et l’industrie, notamment lorsque des employés de la Chambre ont déjà travaillé dans l’industrie financière, n’est une priorité que pour le tiers (32 %) des répondants, alors que 23,3 % d’entre eux jugent prioritaire que la CSF tente d’obtenir davantage de pouvoir d’encadrement, comme celui d’encadrer et d’inspecter les cabinets et les courtiers.

La haute direction devrait prendre les mesures nécessaires pour faire cheminer les dossiers d’enquête dans des délais raisonnables pour seulement 20,4 % des conseillers sondés.

Bon nombre d’efforts

Revenons sur ces possibilités d’améliorations, à commencer par l’amélioration de la formation de son personnel.

«La formation du personnel et le maintien de ses compétences dans un contexte en changement profond sont des priorités pour l’organisation et c’est notamment pour ces raisons que nous avons procédé à des changements importants à notre structure organisationnelle», indique la CSF dans un courriel (lire «Consultations fructueuses» en page 18).

L’organisme d’autoréglementation (OAR) ajoute qu’il «soutient et encourage le perfectionnement des compétences de ses employés surtout en ce qui concerne les pratiques des 32 000 membres». Beaucoup d’employés ont suivi les cours d’entrée en carrière des membres de la CSF et l’équipe des enquêtes comprend plusieurs membres issus de la profession ou ayant travaillé à la conformité auprès d’institutions financières, précise la CSF.

Même «s’il n’y a aucun doute que le personnel de la CSF soit bien formé», il y a des progrès à faire afin d’éviter tout malentendu avec l’industrie, selon Flavio Vani, président de l’Association professionnelle des conseillers en services financiers (APCSF).

«La CSF doit continuer de donner de l’information aux représentants, parce que beaucoup la voient comme un organisme qui est là pour réprimer, alors que ce n’est pas le cas», dit-il. Il constate que la CSF fait des efforts en ce sens. Flavio Vani souligne que les représentants mettent en pratique une démocratie directe par rapport à leur régulateur et son cadre, ce qui n’est pas le cas avec l’AMF.

Par ailleurs, accroître la représentativité des consommateurs dans la gouvernance de la CSF est frivole, selon Flavio Vani:«[Sur 12 membres du conseil d’administration], on a déjà cinq personnes [indépendantes] qui sont nommées par le ministre des Finances du Québec. J’aimerais bien savoir quelles organisations professionnelles ont un paquet de monde dans leur CA qui ne font pas partie de la profession.»

Au cours des dernières années, le ministre des Finances a en effet fait passer de deux à cinq le nombre d’administrateurs indépendants jouissant d’expertises complémentaires et choisis selon un processus rigoureux, confirme la CSF. L’OAR collabore déjà avec des organismes qui défendent les intérêts des clients, notamment avec les chercheurs du projet Accès au droit et à la justice (dirigé par l’Université de Montréal) et l’organisme Option consommateurs pour différents projets de recherche et de communication. «Il n’est pas exclu que la Chambre consulte sur une base ponctuelle des consommateurs de produits et de services financiers ou des groupes représentatifs pour valider certaines hypothèses ou initiatives», écrit la CSF.

Sur le plan des communications entre la CSF et les services de conformité des courtiers et des cabinets, l’an dernier, la CSF a convié virtuellement plus de 150 responsables de la conformité à une rencontre consultative afin de mettre en place des mécanismes de collaboration plus efficients avec eux, note la CSF: «Cet exercice se fera dorénavant sur une base régulière. »

Il reste que, année après année, dans le Pointage des régulateurs, les responsables de la conformité des firmes de courtage sondés déplorent de ne pas être informés par la CSF des motifs d’enquête touchant un représentant, ce qui les prive d’indices quant à la façon de surveiller le conseiller faisant l’objet d’une enquête.

Le délai entre le dépôt de la plainte à la CSF et le moment où le courtier est informé de la sanction d’un représentant peut parfois atteindre un an, ce qui n’est pas souhaitable, selon Stéphane Blanchette, vice-président exécutif et chef de la conformité d’Investia Services financiers: «Si, comme courtier, ce manquement indique que nous avions des contrôles de surveillance qui n’étaient pas suffisamment forts, nous pouvons seulement corriger nos processus un an plus tard.»

Selon lui, à l’instar de ce que fait l’Association canadienne des courtiers de fonds mutuels (ACFM), le courtier devrait être partie prenante de la solution pour traiter la plainte du client et effectuer la revue de ses contrôles. «Là, malheureusement, dans le processus, on est un peu trop tard, même si je comprends les règles de confidentialité de l’information», dit Stéphane Blanchette.

Attention, soutient Flavio Vani. «Les procédures doivent être claires pour tout le monde, mais que la CSF donne de l’information durant l’enquête, c’est un peu charrier. Elle fait bien de garder le secret !» Selon lui, la CSF doit être prudente et modérée, car divulguer trop d’information peut nuire inutilement à la réputation d’un représentant. «Il y a des causes qui sont frivoles. Des gens font des plaintes inutiles ou sans avoir trop d’information.»

Ces arguments expliqueraient peut-être aussi pourquoi seuls 37,9 % des conseillers sondés estiment qu’améliorer les échanges d’informations entre la CSF et l’AMF soit une priorité. À ce chapitre, la CSF note que les communications avec l’AMF sont régulières.

«Les équipes (CSF/AMF) collaborent sur plusieurs dossiers ou projets communs, notamment une participation conjointe à une tournée de formation régionale, l’élaboration du Guide de l’Autorité pour les personnes en situation de vulnérabilité, ou lors de travaux de plusieurs comités de l’industrie. Il faut aussi faire état de la priorité accordée aux échanges entre le bureau du syndic et l’Autorité pour assurer leurs missions respectives d’enquêtes», écrit la CSF dans un courriel.

Avis polarisés 

Le sondage «La CSF perçue par ses membres» reflète la même polarisation exprimée par l’industrie en 2017 et 2018, au moment des débats concernant le projet de loi 141 et l’avenir de la CSF. Quelques répondants jugent que la priorité de la haute direction de la CSF devrait être de fusionner l’organisme avec l’AMF. «La CSF est totalement inutile. Elle ne sert qu’à collecter des amendes et est le dédoublement de l’AMF. On est très loin du Barreau», exprime l’un d’eux. À l’opposé, d’autres estiment que «pour le moment, tout est parfait», ou que la CSF devrait continuer de bien jouer son rôle actuel et «garder son indépendance par rapport à l’AMF».

La majorité des répondants ont un avis situé entre ces deux extrêmes. Parfois critiques envers la CSF, les répondants sont le plus souvent enclins à suggérer des améliorations constructives, même parmi ceux qui sont les plus satisfaits du travail de la Chambre.

Une part des répondants souhaitent l’amélioration des communications entre la CSF et ses membres. Un autre segment aimerait que la CSF défende les intérêts de ses membres. «La mission de la Chambre devrait être révisée pour protéger l’intérêt de ses membres d’une façon juste et équitable», écrit un sondé. Ce à quoi la CSF répond que sa mission de protection du public «ne lui permet pas de faire la promotion des intérêts socioéconomiques des membres».

Quelques conseillers perçoivent la réforme du cadre réglementaire des OAR, qui fait l’objet de consultations actuellement par les Autorités canadiennes en valeurs mobilières (ACVM), comme une menace pour la CSF. Un répondant juge qu’elle doit «préserver les pouvoirs en valeurs mobilières du Québec de toute intrusion par le reste du Canada». Un autre écrit: «La priorité de la CSF devrait être de trouver une solution pour assurer sa pérennité si l’ACFM fusionnait avec l’Organisme canadien de réglementation du commerce des valeurs mobilières et que le nouvel organisme prenait en charge les représentants en épargne collective du Québec. »

En outre, la CSF devrait hausser ses standards de formation continue, selon un autre groupe de répondants. Parmi ceux-ci, quelques-uns croient que l’OAR devrait s’assurer que les conseillers ont des compétences élevées, y compris en fiscalité.

D’autres souhaitent que les formations obligatoires soient incluses dans leur cotisation annuelle et quelques-uns soulignent l’importance de vérifier que les formations accréditées ne sont pas de qualité discutable. «La CSF doit se réinventer pour remettre une formation continue adéquate dans le cadre de la formation à distance», suggère également un répondant. La CSF répond à ces suggestions dans le texte «Consultations fructueuses» en page 18.

En outre, la CSF devrait veiller à améliorer la perception d’égalité des chances et de traitement équitable dans l’industrie. Elle devrait «s’assurer que les objectifs de conformité sont respectés par tous les intervenants», note un répondant. Un autre mentionne qu’«il devrait y avoir une certaine uniformité des obligations», qu’un produit soit vendu par Internet ou par un conseiller.

«Pourquoi les banques et les concessionnaire autos ont-ils le droit de vendre de l’assurance prêt sans permis et sans formation ?»se demande un autre.

Parmi les répondants les plus critiques envers la CSF, certains souhaitent que l’OAR priorise d’alléger la conformité et vise à ce que les conseillers gèrent moins de paperasse. Selon l’un d’eux, on devrait limiter les activités de la CSF à la déontologie et lui faire subir une cure d’amaigrissement afin de retourner des économies aux conseillers.

Méthodologie

Finance et Investissement a mené le sondage en ligne auprès des membres de la CSF du 19 novembre au 16 décembre 2020 en invitant ses abonnés à y répondre tout comme les visiteurs de son site web et de ses comptes de médias sociaux. Sur les 207 participants au sondage, nous avons exclu les conseillers retraités et les employés des organismes de réglementation. Le nombre de réponses par question varie en fonction des répondants. Le sondage n’a aucune prétention scientifique.