Une bulle de bande dessinée avec un visage pas content à l'intérieur.
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Les membres de la Chambre de la sécurité financière (CSF) ont beau juger que cet organisme d’autoréglementation (OAR) est respecté et joue bien son rôle, ils formulent de nombreuses critiques envers elle et ciblent plusieurs occasions d’amélioration.

C’est ce qui se dégage du sondage en ligne « La CSF perçue par ses membres » mené par Finance et Investissement à l’automne 2020 auprès de conseillers encadrés par la CSF.

Tel que l’évoque l’article « Incomprise, la CSF ? », les conseillers accordent une note moyenne de 7,5 sur 10 lorsqu’on leur demande de chiffrer, sur une échelle de 0 à 10, leur degré d’accord avec le fait que la CSF remplit convenablement sa mission. De plus, 61,4% des répondants croient que « la CSF est un OAR pertinent et respecté dans le secteur des produits et services financiers ».

Pourtant, la CSF ne répond pas pleinement aux attentes de ses membres de la CSF, selon leur évaluation compilée dans le tableau suivant.

Pour voir ce tableau en grand, cliquez ici.

L’OAR obtient sa pire note au critère « la CSF favorise une perception adéquate de l’industrie et de ses représentants par le public. » « La publicité de la CSF ne devrait pas être axée sur la mission de l’organisme, mais sur l’offre de services des membres et du réseau de distribution », d’après un membre.

Selon un autre répondant, les publicités de la CSF devraient avoir un ton sérieux et calme. On devrait abandonner les concepts où « des enfants jouent aux superhéros ou des comédiens poches monochromes font des parallèles poches avec la santé. »

« Contrairement à une association professionnelle, la loi constituante de la CSF lui donne la mission de protection du public. Cette mission ne lui permet pas de faire la promotion des intérêts socioéconomiques de ses membres », répond la CSF dans le texte « Consultations fructueuses ».

La CSF obtient aussi une faible note relativement à son processus disciplinaire. « Toutes les plaintes devraient être réglées dans les 3 mois », dit un répondant. Un autre conseiller sondé est plus nuancé: « La démarche d’enquête est souvent perçue trop longue, néanmoins l’on comprend que la collecte d’information et l’analyse peut prendre du temps. L’important est de bien juger de la situation. Les enquêteurs font souvent preuve de discernement. »

« Certains cas entraînent des délais plus longs parce qu’ils sont moins évidents, très complexes, demandent beaucoup plus de travail et qu’ils font l’objet d’interventions procédurières. Chaque cas est unique. Toutefois, la CSF est très consciente de cet enjeu qui concerne d’ailleurs tous les tribunaux et instances disciplinaires. Le comité de discipline n’y fait pas exception », explique la CSF, dans ce texte.

Par ailleurs, le coût de la cotisation des membres de la CSF ainsi que les frais des formations offertes par la CSF semblent des éléments sensibles.

Alors que certains jugent que ces frais sont raisonnables, d’autres soulignent les coûts indirects des formations. « Ce n’est pas le coût des cours qu’il faut regarder, mais bien le temps que demandent des formations répétitives, trop souvent servant un contenu réchauffé. Pour moi, le coût, ce sont les 8 heures de temps que je ne travaille pas dans ma pratique. Trop de formations ne sont pas reconnues d’un organisme à l’autre et ce sont les entrepreneurs en pratique privée qui subissent un préjudice. »

« Comme tout professionnel, le conseiller est responsable de sa formation. Il doit donc choisir celle qui lui convient le mieux. Il est avantageux pour les conseillers de disposer d’une offre de formation diversifiée telle que celle que proposent les différents organismes de réglementation, car cela permet de répondre aux divers besoins et contraintes des conseillers », répond la CSF.

Nous avons demandé à deux observateurs de s’exprimer sur nos sondages portant sur les régulateurs. Stéphane Blanchette, vice-président exécutif et chef de la conformité, Investia Services financiers inc limite ses commentaires à ceci : « De manière générale, la CSF, tout comme les autres organismes, ils font tous un effort pour améliorer leurs processus ou la perception de l’industrie. C’est sûr que plus un organisme de réglementation est multidisciplinaire, plus difficile est son mandat d’essayer de satisfaire tout le monde. »

On ne peut pas demander à la CSF de faire des publicités visant à défendre les intérêts des conseillers, juge Flavio Vani, président de l’Association professionnelle des conseillers en services financiers (APCSF). Elle doit se limiter notamment à expliquer son rôle et dire que les professionnels qu’elle encadre ont une série d’obligations. »

« On ne peut pas faire agir la CSF comme une association. Elle ne peut pas faire de lobbysmes pour les représentants. Elle est un organisme d’autoréglementation », note Flavio Vani.

Lorsqu’il examine les notes du sondage « La CSF perçue par ses membres », Flavio Vani juge que la CSF répond relativement bien aux attentes qu’on a d’elle pour plusieurs éléments évalués, sans pourtant les dépasser. Il a fait l’exercice de diviser la note obtenue par la CSF à un critère donné par la note obtenue pour l’importance à ce critère. La CSF atteint un ratio de 0,85 ou plus pour sept des 11 critères. Selon lui, une note de 1,0 signifie une note égale à l’importance et une note supérieure à 1 signifie que le régulateur dépasse les attentes.

Par rapport au processus disciplinaire, celui de la CSF doit être empreint de prudence considérant qu’une plainte peut être frivole et que des conseillers et des firmes portent systématiquement plainte contre leurs concurrents afin de leur nuire.

« La CSF doit agir de manière prudente et ne pas divulguer l’information avant d’être sûre de savoir si la personne a mal agi », dit-il.

Lorsqu’une plainte est déposée, l’agent de conformité d’une firme et le conseiller qui fait l’objet de la plainte deviennent parfois des opposants, d’après Flavio Vani : « Le cabinet et le conseiller deviennent presque en conflit d’intérêts. Le cabinet va se dire : « Ai-je bien fait de faire confiance avec cette personne-là. » Il va chercher à se prémunir d’un problème et se demander comment isoler un représentant pour se protéger, parfois avant même de se demander si la plainte est vraie et fondée ou pas. »

Trop de représentants ont été mis à l’écart à tort ou ont perdu trop prématurément le droit de distribuer les produits d’un assureur parce que celui-ci a coupé son contrat avec le conseiller, soutient Flavio Vani.

« Je comprends que les cabinets trouvent ça long et qu’ils soient anxieux de savoir si on doit couper l’individu. Mais aller plus vite pour faire des gaffes? Non. »

Par rapport au coût des formations, Flavio Vani estime que « les gens font une grosse erreur de penser que la CSF est une association professionnelle. L’association professionnelle est l’APCSF. La CSF est organisme pour contrôler le comportement des gens vis-à-vis les consommateurs. »

Toutefois, il croit que la CSF aurait tout intérêt d’avoir des formations gratuites ou à prix très modique pour élever le standard de tous les représentants.

Son association travaille d’ailleurs à la création d’un titre professionnel multidisciplinaire que tous les conseillers devraient avoir. Il est d’avis que les représentants devraient suivre un tronc commun de cours, notamment sur le plan de la fiscalité des produits et sur leur responsabilité civile de mandataire.

Enfin, aux représentants les plus critiques envers la CSF, Flavio Vani les invite à exercer leur pouvoir démocratique en participant aux assemblées générales de la CSF.