Un homme d'affaires montrant un graphique en transparence sur une ville. Autour on voit pleins de petits virus de COVID-19.
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L’adoption soudaine et généralisée du télétravail a chamboulé les communications avec les clients et le travail des conseillers en placement (CP), y compris l’accès à leurs outils et à leurs systèmes. Si certaines firmes ont réussi cette transition avec brio, d’autres ont rencontré davantage de difficultés, révèle le sondage mené dans le cadre du Pointage des courtiers québécois.

«Sur une échelle de 0 à 10, quelle note accorderiez-vous à votre entreprise pour le soutien qu’elle vous a accordé lors de la pandémie de la COVID-19 en 2020?»a-t-on demandé aux répondants.

Tel que le montre le tableau en page 11, RBC Dominion valeurs mobilières (RBC DVM), Raymond James (RJ) et la Financière Banque Nationale (FBN) ont obtenu une note de 9,5 sur 10, ce qui est supérieur à la moyenne québécoise de 8,6.iA Valeurs mobilières (iAVM) obtient une note de 6,9, et BMO Nesbitt Burns (BMO NB), de 6,7.

Comme point commun, les firmes les mieux notées présentaient, avant la pandémie, un degré plus élevé de préparation technologique à une généralisation du télétravail. Elles avaient aussi déjà effectué des investissements en technos.

«Mon entreprise a vraiment démontré sa capacité à s’adapter et sa flexibilité durant une situation hors norme. Depuis les 10 dernières années, la firme a investi massivement dans les technologies», note ainsi un répondant de RBC DVM. La rapidité des firmes à s’adapter adéquatement aux changements forcés par la pandémie semble avoir aussi pesé dans la balance. Par exemple, un répondant de BMO NB dit:«Le soutien apporté était de base. On constate une lenteur dans la transition technologique. Ça m’a pris trois heures pour me connecter sur mon ordinateur de la maison. Tout était encombré et on n’a pas eu de soutien. J’ai dû acheter l’ordinateur de mon adjointe et tout l’équipement.»

«Nous n’avions pas prévu la pandémie, mais nous étions déjà tournés vers l’avenir pour avoir une mobilité sans papier et tout le monde avait déjà un portable. Nous étions prêts pour le télétravail», signale Denis Gauthier, premier vice-président et directeur national de la Financière Banque Nationale, Gestion de patrimoine.

«Nous soutenions déjà nos conseillers qui étaient sur la route ou qui travaillaient de la maison», témoigne Richard Rousseau, vice-président du conseil du Groupe gestion privée, Québec, de Raymond James.

Même s’ils n’utilisaient généralement pas la signature électronique avant le début de la pandémie, tous les courtiers ont accéléré l’implantation de cette technologie.

«La crise nous a obligés à accélérer des changements déjà prévus. Ça nous a permis aussi de faire accepter des changements qui, parfois, peuvent prendre un peu plus de temps», déclare Denis Gauthier.

Esprit d’équipe menacé 

La pandémie a des effets plus pervers et moins immédiats. Elle nuit ainsi à la culture d’entreprise et à la cohésion des équipes.

«Ce qui fait la culture de notre équipe, c’est quand on jase, et dans le virtuel, les gens ont oublié de le faire», constate Sara Gilbert, stratège d’affaires et coach chez Développement des affaires Strategiste.

À nouveau, les firmes les mieux notées ont travaillé pour résoudre ces problèmes. Certaines firmes ont mis en place des programmes pour préserver la culture et la cohésion de leurs employés, et ont multiplié les communications.

«On nous a permis facilement de rester en contact avec les membres de mon équipe et de garder les troupes motivées. On a eu beaucoup d’informations par rapport à la crise», affirme ainsi un répondant.

En plus d’avoir un impact sur la cohésion, la COVID-19 est également lourde de conséquences sur la santé mentale. Le télétravail a ainsi tendance à effacer la barrière entre vie de famille et travail.

«Notre attention est divisée tout le temps. On est à moitié avec les enfants, à moitié dans le travail. On se sent poche partout», affirme Sara Gilbert.

Toutefois, certaines firmes ont rapidement agi pour soutenir leurs employés, notamment en offrant des formations ou des congés.

«Ils prennent très bien soin de nous. Ils nous envoient des sondages pour savoir comment on se sent. Ils ont également donné à tout le monde 500 $ pour un compte bien-être et des journées de congé supplémentaires», témoigne ainsi un conseiller de la FBN.

«On a mis en place de bonnes et saines pratiques pour que les gens ne se sentent pas obligés de répondre à des courriels à 20 h ou à 7 h du matin et les fins de semaine», ajoute Denis Gauthier.

Chez Valeurs mobilières Desjardins, les conseillers ont reçu de nouveaux ordinateurs portables et une enveloppe de 1 000 $ pour s’équiper afin d’avoir un bureau ergonomique, notent des conseillers. D’autres conseillers de cette firme soulignent le soutien psychologique reçu.

Importante techno mobile 

En 2021, le soutien accordé par les firmes de courtage pour la technologie mobile et le conseiller mobile ainsi que pour les médias sociaux a pris de l’importance aux yeux des conseillers. Sur une échelle de 0 à 10, où 0 signifie «aucune importance»et 10 signifie «importance cruciale», la note moyenne accordée par les conseillers pour la technologie mobile est passée de 7,9 en 2020 à 9,1 sur 10 en 2021, alors que pour les médias sociaux, cette note est passée de 6,9 à 7,6 sur cette même période.

Toutefois, le score des courtiers à ces deux critères est demeuré stable de 2020 à 2021, la moyenne québécoise pour la technologie mobile s’établissant à 7,9 sur 10, et pour les médias sociaux, à 7,2 sur 10.

Durant la pandémie, les conseillers ont eu davantage besoin de technologies pour tout faire à distance:gérer les actifs, accompagner leurs clients et en recruter d’autres.

«Avec notre cellulaire, on peut voir tous les portefeuilles des clients. Le client a accès à son portefeuille et ses relevés en ligne, et voit les commandes qu’on fait pour lui. C’est sur la coche !»commente un CP de la FBN.

Il reste du travail à faire. Certains CP se désolent des bogues informatiques dans leurs firmes, alors que, chez d’autres courtiers, on déplore la longueur des délais pour obtenir du dépannage technologique.

«À la maison, ça travaille assez bien, car on a un accès à partir d’Internet avec VPN, mais sur le plan du conseiller mobile, on ne semble pas évoluer alors qu’on est toujours en retard. C’est très important dans le contexte actuel», dit un conseiller.

Du côté des médias sociaux, bon nombre de conseillers se plaignent de devoir faire face à trop de restrictions et de ne pouvoir utiliser que LinkedIn.

«Nous avons beaucoup de bâtons dans les roues. Un nouveau microsite est offert aux conseillers en placement, mais la COVID en a ralenti le déploiement. Il n’y a aucun soutien, ce n’est pas vraiment bon», peste un répondant.

Pourtant les firmes font beaucoup de choses.

«On croit beaucoup aux médias sociaux. On est très présents sur LinkedIn et on coache nos conseillers pour qu’ils l’utilisent de la bonne façon», dit Denis Gauthier.

«On a mis énormément d’efforts de ce côté, renchérit Richard Rousseau. Évidemment, LinkedIn est très important, mais on utilise aussi Facebook, Twitter et on a même des conseillers sur YouTube.»

Évidemment, les publications sont vérifiées par la conformité, mais très peu sont refusées, précise Richard Rousseau. Les deux firmes fournissent également du contenu pour publier sur les plateformes.

Alors, comment expliquer ce mécontentement ? Pour Sara Gilbert, la raison est simple:le manque de personnel au service de marketing et le manque de compréhension des médias sociaux. «Ce n’est pas une question d’information, mais de transformation», précise-t-elle. Il ne suffit pas de publier des articles, mais aussi de mettre du contexte et la firme peut ne pas connaître le marketing, les besoins et les croyances du marché du conseiller. Celui-ci doit se débrouiller.

Côté plateforme, la meilleure est bien celle où se trouvent les clients du conseiller. «Si mon client est très axé technologie, peut-être que Tik Tok est la place, s’il est dans l’art, Instagram est mieux», illustre la coach en affaires. Il est donc nécessaire de connaître les besoins et les envies de son client idéal et de s’adapter.

Recommandations bienvenues 

Finalement, le soutien technologique et le soutien psychologique ont aidé les conseillers à soutenir leurs clients et à en recruter de nouveaux.

«L’entrée nette d’actifs au Québec, qui ne tient pas compte de l’évolution du marché, a été très positive cette année», observe Richard Rousseau.

«Ç’a été un constat très satisfaisant. Comme nos conseillers ont pu être productifs et proactifs dès le jour 1, ils ont pu répondre aux attentes et aux craintes des clients de façon efficace. Beaucoup de nouveaux clients leur ont donc été recommandés», complète Denis Gauthier.

Les firmes ont offert des formations pour faire des rencontres virtuelles avec de nouveaux clients et la grande majorité des conseillers ont vu croître leur bloc d’affaires.

«Dès le premier jour, on était opérationnels, donc ça a fait toute la différence dans le service offert aux clients», juge un répondant.

«Je suis très fier des conseillers, ils ont vraiment fait la job. On a beau déployer les meilleurs outils, encore faut-il qu’ils les utilisent et les mettent en place, et c’est ce qu’ils ont fait», indique Denis Gauthier.