Le coût n’est pas tout quand il s’agit d’évaluer la valeur des conseils que reçoivent les investisseurs canadiens lorsqu’ils souscrivent à des fonds communs de placement. La qualité de ces conseils est d’une importance fondamentale, surtout quand c’est la compagnie de fonds, et non l’investisseur, qui rémunère le conseiller.
Contrairement aux États-Unis où les conseillers font directement payer leurs clients, le coût des conseils pour les investisseurs dans les fonds au Canada est normalement intégré aux frais de gestion des produits. Compte tenu de la prévalence de cette pratique, les investisseurs doivent réfléchir à l’impartialité et l’objectivité des conseils qu’ils reçoivent.
L’intégration verticale demeure prépondérante dans l’industrie des services financiers au Canada. De nombreux conseillers canadiens restent des employés « captifs » des sociétés de fonds. Ces conseillers peuvent se voir limités aux fonds promus par leur employeur.
L’exemple le plus flagrant en est le Groupe Investors, dont les vendeurs ne peuvent proposer que les fonds exclusifs de cette firme, y compris une modeste sélection de produits à marque commune. Parmi les conseillers qui sont confrontés aux mêmes restrictions, on trouve ceux qui travaillent pour les banques.
En faisant affaire avec un conseiller captif ou semi-captif, les investisseurs devraient considérer certains facteurs qui peuvent compromettre l’objectivité des conseils qu’ils reçoivent. Des conseils en matière d’affectation d’actifs et autres sujets relevant d’une vue d’ensemble peuvent être bien conçus, mais votre conseiller vous dirige-t-il vers des fonds de deuxième ou troisième rang dans ce modèle d’affectation d’actifs à cause des choix limités qui lui sont offerts?
En revanche, dans une relation conseiller-client à base d’honoraires, c’est le client qui verse directement les frais au conseiller en échange de conseils objectifs. Qui plus est, ces frais sont négociables et convenus d’emblée au début de cette relation.
Ces vingt dernières années aux États-Unis, le modèle à base d’honoraires s’est graduellement répandu pour devenir le type de relation conseiller-client le plus populaire. Au Canada, toutefois, les conseillers rémunérés à base d’honoraires représentent toujours une petite minorité.
La question qui se pose ici est celle d’une plateforme à architecture ouverte ou fermée. Une architecture ouverte favorise davantage les investisseurs. Elle permet aux conseillers de sélectionner des fonds en fonction de leur pertinence et de leur mérite, et non pas du fait que le nom de la marque est le même que sur leur carte de visite.
C’est la prévalence de cette plateforme à architecture ouverte aux États-Unis qui a aidé l’industrie des fonds à évoluer vers une méritocratie. Le conseiller travaille pour le client, et il est donc logique que le client rémunère le conseiller pour s’assurer qu’il agisse dans son meilleur intérêt. L’intention est ici d’aligner les intérêts du client sur ceux du conseiller.
Au Canada, en revanche, les firmes aux réseaux de distribution les plus puissants dominent le marché. Quand ce sont les compagnies de fonds qui rémunèrent les conseillers pour canaliser les investisseurs vers leurs fonds, cela occasionne des conflits d’intérêt potentiels. Que se passe-t-il si un fonds d’une compagnie A convient davantage à un client que le produit d’une compagnie B, mais que cette dernière verse une commission de suivi plus importante au conseiller? Il se pourrait bien que le conseiller opte pour la solution qui lui remplisse le mieux les poches plutôt que pour celle qui serait dans le meilleur intérêt de son client.
Pour les investisseurs autonomes désireux de maîtriser les coûts, une excellente solution de rechange pourrait être les parts de Série F, qui dépouillent toute rémunération intégrée des conseillers. Cependant, les investisseurs autonomes ne peuvent même pas prétendre à ces produits puisqu’ils ne sont accessibles que pour les comptes gérés par des conseillers.
Au Canada, les investisseurs autonomes sont fortement désavantagés. Ceux qui finissent par souscrire à des fonds communs en passant par des comptes en ligne de courtage à escompte n’auront probablement pas d’autre choix que de payer une commission de suivi (et donc un ratio des frais de gestion excessivement cher) bien qu’ils ne reçoivent pas de conseils en échange. Les courtiers à escompte touchent de juteuses commissions de suivi pour le simple fait de prendre les commandes.
À mon avis, les frais élevés des fonds communs découlant de commissions de suivi intégrées sont l’une des principales raisons pour lesquelles les fonds négociés en bourse (FNB) ont connu une croissance aussi impressionnante au Canada. Les FNB permettent aux investisseurs d’éviter de payer des frais intégrés en échange de conseils dont ils n’ont pas besoin. Quiconque a un compte de courtage à escompte peut accéder à des FNB à frais modiques. Ou bien dans le cas des investisseurs dans les FNB qui ont besoin de conseils, il n’y a pas de conflit d’intérêts pour ce qui est de la façon dont les conseillers sont rémunérés.
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