Avec les actions à des niveaux record, les investisseurs avisés attachent au moins autant d’importance à réduire le risque dans leurs portefeuilles qu’à grappiller des rendements supplémentaires. De plus, les risques semblent se nicher dans tous les coins, que ce soit dans le potentiel de hausse des taux obligataires, dans la cherté relative des actions, ou dans les troubles politiques partout dans le monde.

Pourtant, même s’il vaut la peine d’anticiper et d’atténuer les effets de ces risques, il y en a certains que les investisseurs pourraient surestimer de façon disproportionnée, ou alors, en cherchant à les compenser, ils pourraient prendre involontairement différents types de risque. En voici quelques-uns des principaux.

Premier risque exagéré : Envahir le capital

De nombreux investisseurs à la retraite ont pour objectif de vivre du revenu de leurs portefeuilles sans toucher au capital. En vivant exclusivement des rendements, ils ne courent jamais le risque d’épuiser leur argent de leur vivant, et ils laisseront sans doute à leurs proches une somme rondelette.

Il n’y a rien de mal à ancrer un portefeuille dans des titres producteurs de revenu, que ce soient des actions à dividendes ou des obligations. Les dividendes sont une indication des moyens financiers d’une société et sont au fil du temps temps une composante énorme des rendements boursiers. Les distributions de revenus représentent aussi la plus grosse partie des rendements que reçoivent les détenteurs de fonds d’obligations.

Pourtant, le climat actuel des taux d’intérêt rend la vie dure à de nombreux retraités qui vivent seulement des revenus. La plupart des fonds obligataires de qualité élevée et à moyen terme rapportent de nos jours moins de 3 %, et même des fonds de dividendes peu chers et bien gérés comme le Fonds de revenu canadien Sentry paient à peine plus de 3 %. Cela peut être vivable pour ceux qui ont un patrimoine important. Mais les investisseurs qui ont besoin de plus de 3 % ou 3,5 % de rendement ont deux possibilités : dépasser les limites de risque qu’ils s’étaient fixées pour générer un plus gros rendement, ou puiser dans leur capital pour compenser le manque à gagner. Je dirais que puiser périodiquement dans le capital des actifs qui se sont appréciés (en ce moment, il s’agit des actions et des obligations de qualité inférieure) vaut mieux que s’aventurer dans des placements à plus haut rendement et à plus haut risque. Comme je l’ai indiqué dans cet article, ce type de rééquilibrage peut contribuer à réduire la volatilité d’un portefeuille. D’un autre côté, les investisseurs exclusivement en quête de revenu en seront ces temps-ci vraisemblablement réduits à la portion congrue.

Deuxième risque exagéré : Subir des pertes dans ses fonds obligataires de base

Les investisseurs ont bien raison de ne pas faire preuve de complaisance à l’égard du marché obligataire. Même si la baisse des rendements obligataires, combinée à une inflation relativement modérée, ont fait des obligations un investissement assez pépère ces trente dernières années, le renversement de ces tendances pourrait aboutir à des pertes pour les portefeuilles obligataires.

Mais c’est aussi une erreur de surestimer l’impact d’une hausse des taux d’intérêt sur les fonds obligataires de base qui occupent les portefeuilles de la plupart des investisseurs. Pour commencer, les investisseurs (dont je fais partie) tirent depuis trois bonnes années la sonnette d’alarme sur les risques que fait peser la hausse des taux d’intérêt sur les portefeuilles obligataires. Bien que les taux d’intérêt aient bel et bien augmenté l’été dernier et par là même bousculé les fonds obligataires, les rendements ont de nouveau baissé cette année et sont plus bas en ce moment qu’ils ne l’étaient il y a trois ans. Les investisseurs qui se sont réfugiés dans les liquidités plutôt que d’encourir les pertes liées aux taux d’intérêt dans les fonds obligataires ont dû assumer un coût de substitution.

Et même si les rendements augmentent (et que le prix des obligations diminue), ces pertes n’auraient aucune commune mesure avec celles que les actions peuvent encourir en périodes de volatilité. Après tout, rares sont les fonds obligataire de base qui prennent à ce stade des risques importants relativement à la durée; la durée [mesure de la sensibilité aux taux d’intérêt] médiane pour les fonds de la catégorie Revenu fixe canadien est de 6,4 ans, alors que le revenu de distribution médian est actuellement juste au-dessous de 1,1 %. En utilisant le « test de résistance à la durée » évoqué ici, cela se traduirait par une perte approximative de 5 % pour un fonds à moyen terme classique si les intérêts devaient augmenter d’un point de pourcentage en une période d’un an. Il s’agit d’une augmentation de taux assez grosse. Bien entendu, la plupart des investisseurs préféreraient ne pas avoir à subir de pertes dans la portion sûre de leur portefeuille, mais cela reste une perte beaucoup plus petite que celles des actions en période de volatilité. (Les fonds d’actions en perdent souvent autant en un seul mois.)

Troisième risque exagéré : La volatilité des actions internationales

Troisième risque exagéré : La volatilité des actions internationales

De nombreux investisseurs présument qu’investir outre-mer occasionnera un risque supérieur dans leurs portefeuilles. Toutefois, la volatilité des fonds des catégories Actions internationales, Actions européennes et Actions de l’Asie-Pacifique ont en fait été comparables à celle des fonds axés sur les actions nord-américaines. Par exemple, le fonds médian de la catégorie Actions internationales a un écart-type sur 10 ans de 13,4, alors que les fonds médians des catégories Actions canadiennes et Actions américaines ont des écarts-types respectifs sur 10 ans de 13,7 et 12,1. Les fonds d’actions étrangères plus spécialisés, comme ceux des marchés émergents, sont plus volatils que les fonds axés sur le Canada, avec un écart-type sur 10 ans de 17,8. Bien sûr, les marchés émergents, qui sont représentés dans de nombreux fonds diversifiés d’actions étrangères, tendent à être sujets à des risques géopolitiques qui accroissent la volatilité. De plus, les fluctuations des devises étrangères ajoutent un autre élément de volatilité aux fonds d’actions étrangères, qui n’est pas de mise pour les investisseurs canadiens qui augment leur participation aux fonds d’actions canadiennes.

Cela dit, les fonds d’actions étrangères ont des niveaux de volatilité qui peuvent varier énormément. Certains fonds d’actions étrangères à moindre risque pourraient raisonnablement servir d’avoirs de base pour les investisseurs hostiles au risque. Par exemple, le Fonds d’actions étrangères Mackenzie Ivy se concentre beaucoup sur la protection contre les pertes, et le résultat net en est une volatilité (mesurée par l’écart-type) beaucoup plus faible que celle d’un fonds d’actions canadiennes classique. Le Fonds mondial Découverte Franklin Mutual , le Fonds Capital – Actions mondiales et le Fonds d’actions mondiales Éthique NEI sont eux aussi des fonds de base très estimés dont la volatilité ces 10 dernières années n’a pas été plus élevée que celle d’un fonds indiciel d’actions canadiennes diversifiées.