M. Siegel, qui est intervenu à la Conférence Morningstar sur le placement à Toronto plus tôt en juin, s’inscrit notoirement en faux contre les adeptes des visions d’apocalypse, ainsi que le reflète son étude intitulée Fewer, Richer, Greener: The End of the Population Explosion and the Future for Investors (Moins nombreux, plus riches, plus écologiques : la fin de l’explosion démographique et l’avenir pour les investisseurs).

Publiée dans le numéro de novembre/décembre du journal des analystes financiers, cette étude constituait le fondement de la présentation de M. Siegel.

L’étude de M. Siegel examinait les tendances à très long terme. Il a montré à l’assistance un tableau illustrant la croissance de la population mondiale de l’année 1500 à nos jours. C’est une courbe en augmentation régulière, mais avec une poussée abrupte à partir du 20e siècle. « Si la population mondiale se stabilise au cours de ce siècle à environ 10 ou 11 milliards de personnes, dit M. Siegel, il y aura de 30 % à 50 % plus de monde. »

Même s’il y aura des milliards de personnes supplémentaires à que l’on devra loger, nourrir et habiller et qui consommeront de l’énergie, M. Siegel dit qu’en fait les perspectives démographiques s’améliorent. « En réalité, l’explosion démographique est à peu près finie, dit-il. Les taux de fertilité dans le monde entier ont chuté à un niveau presque incroyable par rapport à ce qu’ils étaient il y a seulement une génération. »

Plus les gens s’enrichissent, dit M. Siegel, plus l’attrait d’avoir des enfants diminue. « Comme la plupart d’entre vous l’avez probablement constaté, ça coûte une fortune d’avoir un enfant », dit-il. Il note que la proposition de valeur pour les parents était très différente pendant les siècles passés, dans des sociétés agricoles où il fallait faire travailler les enfants pour assurer sa propre survie.

M. Siegel a indiqué que, en dollars modernes, l’Américain et le Canadien moyens avaient en 1800 un revenu d’environ 3 000 $, qui est de nos jours à peu près ce qu’on observe en Inde. Le revenu nord-américain a atteint environ 12 000 $ au début de la crise de 1929, et il est actuellement proche de 50 000 $ par an et par personne.

« Ce taux par tête en dollars réels d’aujourd’hui revient à une croissance constante de 1,8 %, dit M. Siegel, et il semble que si on permet aux gens de mieux déterminer leur position économique dans une société libre et d’accéder au capital de la manière qui leur convient, on obtient un taux de croissance du PIB réel d’environ 1,8 %.

Il a ajouté : « Le fait le plus étonnant de tous dans l’histoire économique, c’est que le niveau de vie atteint il y a environ 80 ans par le pays le plus riche du monde (les États-Unis) est à présent la moyenne du monde entier. »

Pour illustrer l’évolution de l’économie mondiale par des données sur le PIB et l’espérance de vie, M. Siegel a montré une vidéo fascinante sur le professeur suédois Hans Rosling, qui interagit avec une présentation graphique montrant l’évolution d’un groupe de cercles colorés représentant chacun un pays spécifique.

Pour illustrer le changement du revenu de base qui est passé de 200 $ à 40 000 $ par personne lors de la période allant de 1800 à 2009, les cercles se sont mis à flotter vers le haut et à traverser l’écran comme des bulles. La Chine était représentée par l’une des plus grosses bulles, mais les disparités en Chine même sont frappantes. Shanghai, par exemple, a aujourd’hui la même richesse et le même niveau de santé que l’Italie, et pourtant certaines de ses provinces rurales ont le revenu de base du Ghana en Afrique.

La vidéo concluait par ces mots de M. Rosling : « Malgré de très grosses disparités, nous avons connu 200 ans de progrès remarquables, et ce fossé énorme avec l’Ouest est en train de rétrécir. Nous sommes devenus un monde entièrement nouveau et convergent. »

M. Siegel considère que la prospérité et la croissance économique sont de bonnes choses pour l’environnement. « Certains d’entre vous pourraient croire qu’à mesure que nous nous enrichissons, le monde ne devient pas plus vert, mais dans certaines conditions c’est possible. Si nous voulons une planète verte, nous devrions aspirer à devenir aussi riches que possible. »

Pour illustrer son propos, M. Siegel a montré deux photos du New Jersey avec la silhouette de Manhattan en toile de fond. La première photo, prise en 1850, montrait des hectares entiers de terrains qui avaient été défrichés pour planter des cultures. Puis il est passé directement à notre époque, qui montrait des hectares de forêts.

M. Siegel a signalé qu’un « reboisement massif » est en cours dans le nord-est des États-Unis. « Le reboisement est la dernière phase du cycle du développement. La qualité de l’environnement, par exemple par la création de parcs, est un luxe que le monde peut enfin se permettre, et il se le permettra. »

Même ainsi, l’amélioration de l’environnement mondial va détourner des ressources répondant à d’autres besoins. M. Siegel pense que cela se fera largement par des dépenses gouvernementales, et que ce sera un processus inflationniste. « Par conséquent, je ne pense pas que les obligations aient beaucoup d’avenir, du moins dans les quelque dix prochaines années. »

M. Siegel dit que s’il devait constituer un portefeuille, il serait composé de placements dans l’alimentation, l’eau, l’énergie, les minerais et l’infrastructure. « On peut acheter des sociétés qui fabriquent, possèdent et exploitent des fermes, qui accroissent la production alimentaire. L’eau est bonne pour l’énergie, c’est la ressource de base des industries qui produisent le reste. »