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« Toutes les firmes seront affectées par une abolition des FAR, les grands groupes intégrés comme les courtiers indépendants, note Ian Russell. Les coûts vont grimper, mais l’effet de cette abolition se fera davantage sentir auprès des plus petites firmes puisqu’elles n’ont pas autant de marge de manœuvre, en termes de profits, pour absorber des coûts supplémentaires. »

Rappelons que l’ACCVM s’est positionnée en faveur de l’abolition des FAR par les Autorités canadiennes en valeurs mobilières (ACVM) en raison des inquiétudes par rapport aux pratiques entourant leur utilisation qui pénalise les investisseurs ayant besoin de faire des retraits prématurés, rappelle Ian Russell.

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Il ne se dit toutefois pas pessimiste pour l’avenir des courtiers indépendants qui, selon lui, ont très bien fait dans l’environnement réglementaire et technologique changeant actuel : « Les firmes ajustent leur modèle d’affaires. Elles vont continuer de réviser leur offre de produits et de travailler avec les manufacturiers pour choisir les meilleurs produits pour leurs portefeuilles. Elles se trouveront des niches où elles pourront générer plus de revenus tout en réduisant les coûts. »

De plus, la proportion des sommes entrant dans les fonds communs avec FAR était de 75 % il y a vingt ans et est passée à 25 % depuis, selon Dan Hallett, vice-président et directeur chez High View Asset Management.

« Une proportion plus large de la rémunération des conseillers provient aujourd’hui d’honoraires ou de commissions de suivi, note Dan Hallett. J’admets que les firmes et les conseillers indépendants seront frappés plus fort que les autres, mais je ne crois pas qu’ils souffriront de façon significative si les propositions des ACVM sont appliquées. »

Dan Hallett ajoute d’ailleurs que les problèmes associés aux FAR avaient été soulevés dès 1995 par le rapport de recherche que l’avocate Glorianne Stromberg avait réalisé pour la Commission des valeurs mobilières de l’Ontario (CVMO) : « Sous plusieurs formes, ces inquiétudes ont été répétées plusieurs fois avant que le Royaume-Uni et l’Australie éliminent les formes de rémunération intégrées il y a plus de cinq ans. On pouvait s’y attendre, et ce, depuis longtemps. »

Rappelons que les ACVM ont admis être conscientes que les courtiers et conseillers indépendants allaient souffrir d’une abolition des FAR dans leur Avis de consultation sur le Projet de Règlement modifiant le Règlement 81-105 sur les pratiques commerciales des organismes de placement collectif publié le 13 septembre 2018.

« Plus particulièrement, les courtiers n’appartenant pas à une institution de dépôt, qui ont historiquement été beaucoup plus dépendant de l’option des frais d’acquisition reportés, seront vraisemblablement obligés de demander à leurs clients qu’ils paient des commissions prélevées à l’acquisition ou d’adopter un mécanisme de rémunération à honoraires ou tout autre mécanisme de rémunération directe afin de maintenir leurs revenus actuels », écrivent les ACVM.

Intervention du ministère des Finances de l’Ontario

 Le ministère des Finances de l’Ontario s’est mêlé du débat en publiant, le 13 septembre 2018, un communiqué de presse dans lequel il manifestait son désaccord par rapport à la proposition des ACVM.

« Si elles sont mises en oeuvre, un mode de paiement pour l’achat de fonds commun de placement qui permet aux familles et aux investisseurs ontariens d’économiser pour leur retraite et de poursuivre d’autres objectifs financiers sera supprimé. Notre gouvernement ne souscrit pas à cette proposition sous sa forme actuelle », peut-on lire dans le communiqué du ministère des Finances de l’Ontario.

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Ian Russell s’est dit surpris par cette prise de position : « Nous ne nous y attendions pas. C’est sans précédent pour un gouvernement de s’immiscer dans un processus réglementaire et d’émettre une opinion. Je n’ai jamais vu ça avant. Il aurait été préférable d’attendre que le processus soit terminé pour donner une opinion. »

Pour Dan Hallett, la prise de position du ministère des Finances est « apparemment motivée par la politique » en ajoutant que « le seul argument fourni par le ministère est que la proposition sera mauvaise pour les affaires et limitera l’accès au conseil. Or, il y a plus d’un moyen pour les gens d’obtenir du conseil financier de nos jours (comme les conseillers-robots par exemple) qu’il y a cinq ans. De plus, les conseillers ne se concentrent plus sur les petits clients donc je ne crois pas que le gouvernement de l’Ontario offre une base solide à son opposition à la proposition des ACVM. »