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C’est ce qui ressort de l’avis de consultation qui propose de modifier le Règlement 81-105 sur les pratiques commerciales des organismes de placement collectif. Le groupe de régulateurs provinciaux y a analysé les coûts et les bénéfices de l’arrêt de l’option de souscription à un fonds d’investissement selon l’option de FAR.

Il s’attend à ce que les manufacturiers de fonds ajustent à la baisse leur tarification lorsque les FAR seront interdits. Le document ne précise pas le moment où l’abolition entrerait en vigueur, mais souligne qu’une période de transition d’un an est prévue afin de laisser à l’industrie le temps de s’ajuster à ce bouleversement réglementaire.

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« Puisque [les manufacturiers de fonds d’investissement] n’auront plus à financer le versement de commissions aux courtiers au moment de la souscription de [fonds] dans le cadre de l’option des frais d’acquisition reportés, les frais de gestion facturés aux [fonds] qui offraient auparavant cette option devraient diminuer en conséquence », lit-on dans l’avis de consultation.

Les ACVM soulignent qu’actuellement, lorsqu’un fonds est souscrit selon l’option de FAR, les manufacturiers assument les coûts liés à ces commissions et les refilent aux clients. Cette baisse des frais de gestion devrait être « légère », mais significative.

« Dans le cas des gestionnaires de fonds d’investissement qui divisent les options des frais d’acquisition reportés et les commissions prélevées à l’acquisition en différentes séries de fonds, l’écart du ratio des frais de gestion s’établit en moyenne entre 20 et 30 points de base, selon la catégorie d’actifs du fonds en question », écrivent les ACVM.

Les marges des courtiers sous pression

Dans leur analyse coût-bénéfice, les ACVM s’attendent à ce que l’abolition des FAR modifie la façon dont certains courtiers recrutent et forment les nouveaux membres de leur personnel.

À l’heure actuelle, certains courtiers s’en remettent aux commissions versées au moment de souscriptions effectuées selon l’option des frais d’acquisition reportés pour financer les coûts liés à l’accueil et à l’intégration des nouveaux employés ainsi qu’au roulement du personnel, notent les ACVM : « Ainsi, les clients de ces courtiers qui détiennent des [fonds d’investissement] souscrits selon l’option des frais d’acquisition reportés assument une partie du risque du courtier lié à l’embauche de nouveaux employés et paient les coûts qui s’y rapportent par l’intermédiaire du calendrier de rachat et des frais de rachat applicables. Si l’abrogation proposée est mise en oeuvre, les sociétés inscrites devront internaliser directement ces coûts et ces risques. »

Le hic est que certaines sociétés inscrites, souvent des courtiers indépendants, ont des moyens financiers moins importants que ceux des groupes intégrés. Ils risquent d’être plus touchés que les autres par ces coûts.

« Nous nous attendons à ce que ces changements soient plus importants chez les courtiers en épargne collective indépendants de petite ou de moyenne taille (qui n’appartiennent pas au groupe d’un gestionnaire de fonds d’investissement), qui dépendent davantage de l’option des frais d’acquisition reportés et dont l’envergure est moindre que celle des fournisseurs de services financiers intégrés », lit-on dans l’avis.

Les courtiers n’appartenant pas à une institution de dépôt, qui ont historiquement été beaucoup plus dépendants de l’option des FAR « pourraient devoir changer leurs processus opérationnels, leurs systèmes, leurs mécanismes de rémunération ou d’autres aspects de leur activité », notent les ACVM. Ceci pourrait avoir un effet sur leurs coûts opérationnels et leurs marges bénéficiaires.

Le client paiera-t-il moins cher?

On ignore pour le moment comment les courtiers et leurs représentants vont précisément s’adapter à l’abolition des FAR.

« Nous nous attendons à ce que l’abandon de l’option des frais d’acquisition reportés incite les courtiers et leurs représentants à adopter des mécanismes de rémunération plus transparents qui les obligeront à mieux démontrer et justifier leur proposition de valeur et ainsi à améliorer la concordance entre les services fournis et leurs coûts pour les investisseurs », écrivent les ACVM.

Les ACVM s’attendent ainsi que les courtiers orientent alors le client vers d’autres formes de rémunération plus transparentes, comme les frais prélevés à l’acquisition, les frais d’opérations ou d’autres types de rémunération comme les honoraires, qu’ils pourraient négocier directement avec le client et lui facturer.

Dans l’avis, le groupe de régulateur a calculé une façon possible de restructurer la tarification d’un courtier qui vise à maintenir ses revenus : « Dans le cas d’un fonds d’actions typique ayant un rendement annuel de 5 %, une personne inscrite devrait exiger une commission prélevée à l’acquisition de 3,1% ainsi qu’une commission de suivi de 1 %, ou encore une commission annuelle de 1,8 %, pour générer les mêmes revenus que ceux qui sont obtenus pendant la durée d’un investissement dans un [fonds d’investissement] effectué selon l’option des frais d’acquisition reportés classique selon un calendrier de rachat de six ans. »

Dans leur analyse coût-bénéfice, les ACVM n’élaborent toutefois pas de manière précise sur l’impact potentiel des frais que paieront les clients. En se basant sur le cas type de ce calcul, il est difficile de voir comment un client paiera moins cher de frais de gestion totaux (frais de distribution et frais de gestion d’actif) s’il préfère un fonds d’actions à gestion active même s’il profite d’une économie de 20 à 30 points de base étant donné l’abandon des FAR. C’est cependant possible s’il utilise d’autres outils de placement à faible coût, dont des fonds négociés en Bourse (FNB).

Par ailleurs, les ACVM ne cachent pas que l’élimination des FAR pourrait également entraîner un risque d’arbitrage réglementaire sur des produits financiers autres que des valeurs mobilières similaires lorsque cette option de souscription et la rémunération des courtiers s’y rapportant continueront d’être offertes.

Si les régulateurs n’harmonisent pas l’encadrement entre les valeurs mobilières et les produits bancaires ainsi que les produits d’assurance, ce risque d’arbitrage pourrait s’accentuer.

Les ACVM demandent aux parties intéressées de présenter leurs commentaires par écrit et de répondre à différentes questions sur cet avis au plus tard le 13 décembre 2018.