Un portrait de Geneviève Brouillard.
Photo: Martin Laprise

Après avoir passé 27 années dans le secteur bancaire, d’abord à la Banque Royale, puis à la Banque Nationale, Geneviève Brouillard a été nommée première vice-présidente pour la région du Québec et de l’Est de l’Ontario à la Banque Scotia, en mai dernier.

«Ce n’est que récemment, en marge d’un discours où j’évoquais mon parcours, que j’ai réalisé que je suis un banquier de carrière», explique cette diplômée en marketing, qui confesse n’avoir jamais spécialement cherché à travailler dans le secteur financier.

Elle doit sa première expérience dans le domaine bancaire au programme coopératif de l’Université de Sherbrooke, qui est structuré de manière à offrir à ses diplômés une année d’expérience sur le marché du travail dans le cadre d’un stage. «Deux entreprises s’intéressaient à moi : une brasserie majeure et une institution financière. L’histoire nous dit laquelle j’ai choisie. Je dois dire que je n’ai jamais eu de regrets, d’autant plus que je ne suis jamais sortie du secteur par la suite.»

Geneviève Brouillard a néanmoins été familiarisée toute jeune à l’environnement bancaire. «Mon père était directeur général d’une  »caisse populaire », comme on disait à l’époque. Je conserve des souvenirs d’être allée avec lui à son bureau, et d’avoir vu comment les choses se passaient de l’intérieur : le comptoir-caisse, la grande voûte. C’est intrigant quand on est enfant», raconte cette aînée d’une fratrie de trois enfants, qui est originaire de Saint-Hyacinthe, en Montérégie.

Le parcours bancaire

«J’ai grandi pendant 25 ans à la Banque Royale», lance Geneviève Brouillard qui détient un MBA obtenu de l’Université du Québec à Montréal (UQAM) en 2001.

Au cours de cette période, elle a occupé de multiples fonctions dans le cadre de responsabilités constamment croissantes, au sein de secteurs d’affaires différents. «J’ai travaillé autant auprès du particulier que du commercial, en formation et en stratégies de ventes.»

Dans le cadre de son dernier poste à la Banque Royale, Geneviève Brouillard a agi comme vice-présidente, efficacité des ventes clients, particuliers et commerciaux, pour la direction du Québec, d’avril 2013 à septembre 2014. C’est cette expérience qui l’a amenée à accepter un nouveau défi auprès de la Banque Nationale à titre de première vice-présidente, Particuliers, à la fin de l’année 2014.

«Ce fut une décision importante, mais le défi était stimulant et offrait l’occasion de pouvoir jouer un rôle, au quotidien, très près du cours de l’action», dit-elle. Geneviève Brouillard, en plus de superviser l’équipe des conseillers en placements retraite, s’est alors vu confier la responsabilité de définir et d’opérationnaliser les stratégies d’affaires du réseau de distribution aux particuliers, pour le Québec.

Lorsqu’elle évoque la Banque Nationale, Geneviève Brouillard parle d’un «apprentissage à vitesse grand V». Ce fut une période très stimulante dans sa carrière, dit-elle avec enthousiasme. «Cela m’a permis de travailler au sein d’une entreprise très agile. Je suis très fière de la rapidité avec laquelle nous avons pu transformer l’organisation pour l’amener à être plus axée sur le conseiller et sur le client, et à mettre la technologie au coeur de la relation.»

Cette expérience acquise au fil des différentes transformations auxquelles elle a participé lui a permis de développer une capacité à accompagner les gens à travers ces bouleversements qui l’aide encore aujourd’hui dans ses fonctions à la Banque Scotia. «C’est vrai que toute l’industrie est en transformation, mais on ne la transforme pas pour le plaisir. On le fait parce que c’est ce que la clientèle nous demande. Toutefois, pour les employés concernés, cela implique bien souvent que leurs habitudes, leurs outils et la réalité de leur travail sont bouleversés.»

Alors que d’un côté, le client se dit satisfait de la transformation et demande s’il n’est pas possible d’aller plus rapidement, de l’autre, les employés se montrent également intéressés par l’évolution de leur environnement, mais souhaitent pour leur part aller un peu plus lentement afin de mieux s’y adapter. C’est pourquoi, dit Geneviève Brouillard, «mon rôle principal à la Banque Scotia consiste à arrimer correctement les choses, et non à ralentir la transformation».

Elle ajoute : «Même si ces transformations sont faites pour le mieux, chacun les vit de façon très personnelle bien avant de voir leur côté utile ou de constater que ça les rend meilleurs dans ce qu’ils font. Alors, la mission que je me suis donnée, c’est d’améliorer l’expérience de nos employés, en communiquant bien et en les outillant correctement, parce que la réussite ou l’échec de la transformation d’une organisation, ça passera toujours par eux».

Geneviève Brouillard dirige plus de 2 000 employés qui servent approximativement 1 millions de clients.

«Geneviève, c’est un véritable coach», lance d’emblée Carole Chapdelaine, qui a été première vice-présidente, Québec et Est de l’Ontario chez Banque Scotia, de 2011 jusqu’au moment de sa retraite, en 2018. Elles se sont connues il y a 20 ans, au sein de la Banque Royale. «Elle a travaillé pour moi lorsque j’étais responsable de la formation des employés pour l’équipe du Québec, et nous sommes toujours restées en contact», explique Carole Chapdelaine.

Lorsqu’elle a annoncé sa retraite et que ses patrons lui ont demandé une liste de personnes susceptibles de pouvoir prendre sa relève, il était évident pour elle que Geneviève Brouillard ferait partie de cette liste. «Sa capacité à accompagner les employés et à les aider à devenir meilleurs, à les prendre à un certain niveau de performance et à les aider à développer d’autres compétences, c’est le gros morceau de la personnalité de Geneviève qui faisait d’elle un bon choix pour me remplacer», précise Carole Chapdelaine.

Les défis au quotidien

Le mandat de Geneviève Brouillard consiste principalement à accroître la contribution des régions sous sa gouverne et à prendre des parts de marché. Elle est toutefois d’avis que pour y parvenir, la Banque Scotia se doit d’être bonne dans l’ensemble des canaux de communication par lesquels elle est en relation avec sa clientèle. Le but étant de répondre adéquatement aux attentes de ses clients, «car leurs attentes diffèrent selon qu’ils choisissent de prendre le téléphone, une application mobile ou qu’ils viennent nous voir», dit-elle.

Bien que près de 85 % des transactions bancaires s’effectuent maintenant par voie électronique, évalue Geneviève Brouillard, un certain nombre de clients se déplacent toujours en succursale.

Pour cette raison, la dirigeante croit encore en la pertinence d’un réseau physique. «Oui, nous avons l’intention d’ajouter des succursales, d’en relocaliser, et d’en rénover. Je ne dirai pas que nous allons en ouvrir 50, mais nous en avons ouvert deux à Montréal en 2018 et nous étudions quelques autres projets qui devraient voir le jour en 2019 ou au début de 2020.»

Ces nouvelles succursales ne sont toutefois pas conçues de manière statique et cherchent plutôt à permettre à différents modèles d’offre de conseils à la clientèle de se côtoyer. Geneviève Brouillard cite en exemple la nouvelle succursale située à l’angle de la rue de la Montagne et du boulevard René-Lévesque, où il n’y a pas de comptoir-caisse. «On pourrait, au final, retrouver une succursale plein service entourée de satellites qui, eux, offriraient des éléments-conseils», illustre-t-elle.

Outre son parc de guichets automatiques qui sera complètement remplacé au cours de l’année 2019 par des guichets intelligents, la Banque Scotia compte 58 succursales au Québec.

Geneviève Brouillard est aussi d’avis que lorsque les gens prennent le temps d’enfiler «leurs bottes d’hiver et de trouver un stationnement pour venir nous voir, les attentes sont souvent très élevées. Il faut donc que la magie opère, être en mesure d’ajouter de la valeur à la relation, et c’est notre travail, à la direction, de nous assurer que nos gens soient excellents dans le conseil».

C’est d’une part avec les outils technologiques dont dispose maintenant la Banque Scotia que les conseillers sont capables d’y parvenir, affirme Geneviève Brouillard. «L’intelligence de ces outils permet à nos gens d’être beaucoup plus compétents, connaissants et préparés lorsqu’ils rencontrent la clientèle.»

Elle ajoute qu’au moment où la gestion de patrimoine voit sa place s’accroître dans l’espace de l’investissement – après avoir vendu Patrimoine Hollis en 2017, une firme active en plein exercice, la Banque Scotia a fait l’acquisition en 2018 de Jarislowsky Fraser et de Gestion financière MD – l’institution mise beaucoup sur la formation et le mentorat auprès des employés afin d’amplifier l’expérience client.

Ainsi, des efforts ont été faits de manière plus importante à cet égard au cours des derniers mois, selon elle. Au total, Geneviève Brouillard compte 552 conseillers parmi ses employés, dont 35 planificateurs financiers (pl.fin.) au Québec, parmi lesquels 10 se sont récemment joints au réseau de succursales.

Elle évoque également la tenue de rencontres mensuelles entre les «leaders de chacune des divisions de la banque, afin d’assurer une grande cohésion entre les différentes lignes d’affaires et tirer le meilleur de chacune des forces du groupe». Elle est d’avis qu’une meilleure communication crée une proximité et qu’il s’agit là de l’une des clés de la réussite en matière de transformation.

Geneviève Brouillard n’hésite pas à affirmer qu’elle s’est mise en danger à divers moments au cours de sa carrière. «Je ne voyais alors pas cela comme un danger, mais certainement comme une zone de confort que je perdais, comme une impression de partir de quelque chose dans lequel j’étais en sécurité, en maîtrise, pour essayer autre chose.»

Ces moments, il y en a eu beaucoup et elle pourrait en nommer dans chacune des organisations où elle a évolué. «En fait, ajoute-t-elle, chaque fois que je suis sortie de ma zone de confort, ça m’a obligé à mettre un genou par terre, mais ça m’a permis de grandir. Si je n’avais pas vécu ce cheminement et que je ne m’étais pas donné la chance d’essayer des choses et de faire des erreurs, je ne serais probablement pas assise où je suis aujourd’hui.»