Après avoir œuvré 40 ans dans l’industrie, Daniel Laverdière, expert-conseil chez Banque Nationale Gestion privée 1859, peut se permettre de porter un regard critique sur celle-ci. Au long de sa carrière, il a pu être témoin de certains bons coups et de quelques autres qui le dérangeaient.

Selon lui, l’arrivée des Normes d’hypothèses de projection de l’Institut québécois de planification financière (IQPF) est l’un des changements importants qui ont marqué l’industrie.

Daniel Laverdière a commencé sa carrière en 1981 comme actuaire. Un peu plus d’une décennie plus tard, soit en 1996, il cherche à s’impliquer davantage et se joint à l’IQPF. À l’époque, sa collègue Nathalie Bachand, actuaire, planificatrice financière et cofondatrice de Bachand Lafleur, groupe conseil, et lui se rendent compte que certains planificateurs ne se gênaient pas pour faire des projections à des taux élevés, ce qui les rendait mal à l’aise.

« Nous, comme actuaires, on était plus prudents. Notre approche était différente », raconte-t-il en entrevue.

C’est ainsi qu’avec Martin Dupras, président de ConFor financiers, ils décident de créer les Normes d’hypothèses de projection. Testées en 2008, elles sont publiées officiellement pour la première fois en 2009.

Depuis, nombre de provinces les ont adoptées. « Je pense que ç’a beaucoup aidé l’industrie des planificateurs financiers à resserrer les projections de retraite pour les clients », avance-t-il.

Trop de marketing

Il n’est pas étonnant d’apprendre que Daniel Laverdière, soucieux d’éviter le sensationnel et les promesses de rendements extraordinaires, prône davantage de simplicité dans les produits.

« Il faut plus de transparence, soutient-il. Par exemple, je ne suis pas entiché des fonds constitués en société. C’est de la poudre aux yeux. Bien souvent, ces produits existent avant tout pour des fins de marketing, pour allécher le client. C’est une question de manipulation des chiffres et je n’aime pas ça. »

Il estime ainsi que, fondamentalement, trois produits d’assurance poursuivant un même objectif devraient se ressembler. « À la fin, l’assureur reçoit des primes, il paie des gens qui décèdent et entre-temps, il fait du rendement. Peu importe le type de produit, c’est ça l’histoire », souligne-t-il.

Il pense même que davantage de transparence ne serait pas de trop. Pourquoi le client ne connaîtrait-il pas la commission payée aux conseillers pour son contrat d’assurance ?

« Peut-être devrait-on faire un peu comme pour les aliments qui affichent la quantité de gras et de glucides contenus. Ça serait bien qu’on puisse voir dans chaque produit la quantité de frais, les taxes inhérentes, etc. », propose-t-il.

Dans la même optique, il estime que l’encadrement du titre de planificateur financier a été une grande avancée. « Que les gens qui se présentent comme planificateurs financiers aient une formation minimale dans ce domaine, c’est sage », déclare-t-il.

Cela évite aussi la diffusion de titres racoleurs comme « gestionnaire de fortune » ou autres, selon lui.

Encore des améliorations à venir ?

Daniel Laverdière estime que certains produits mériteraient d’être revus, notamment le régime enregistré d’épargne-études (REEE) et le compte d’épargne libre d’impôt (CELI).

« Honnêtement, je trouve le REEE un peu étrange. On ne peut pas être contre, mais alors que c’est fait pour encourager une accumulation de fonds pour les études des enfants, ceux qui l’utilisent le plus sont les gens fortunés », déplore-t-il.

Selon lui, le REEE pourrait être combiné avec le Programme de prêts et bourses qui, lui, est lié à la richesse.

Même problème avec le CELI, créé à la base pour aider les gens à faible revenu qui épargnaient dans le régime enregistré d’épargne-retraite (REER), alors que celui-ci les pénalisait une fois à la retraite.

Il y a un facteur d’équivalence pour cotiser au REER. Peut-être qu’il serait bon d’en mettre un aussi pour le CELI, propose l’expert.

Sinon, il estime que la réforme du Régime de rentes du Québec qui augmente le plafond du salaire admissible est une bonne chose, tout comme l’a été le fait d’avoir rabaissé les retraits minimums du fonds enregistré de revenu de retraite (FERR) car cela permettra d’avoir une meilleure base pour la retraite. Il pense toutefois que ces éléments vont encore devoir évoluer pour s’adapter à leur époque.

Des conseils pour la relève

Même s’il s’est beaucoup engagé dans l’industrie, Daniel Laverdière pense prendre ses distances au moment de la retraite. « Pour donner de bons conseils, il faut être avisé et suivre de près l’actualité », explique-t-il.

Mais avant de partir, il donne quand même quelques conseils à la relève.

Il recommande ainsi de ne pas chercher le spectaculaire et le sensationnalisme. Il suggère également de se méfier de ses premières impressions et de toujours vérifier ses résultats en utilisant différentes méthodes d’approche, mais aussi en s’entourant de collègues compétents et critiques.

Finalement, Daniel Laverdière suggère à la relève de faire preuve de curiosité et de beaucoup lire sur différents sujets, et surtout, de se soucier des détails. « Si ce n’est pas ce que tu pensais, gratte, et là tu vas comprendre et grandir ».