Dès 2004, alors que moins de 20 fonds négociés en Bourse (FNB) se négociaient sur le marché boursier canadien, les conseillers en placement Christian Lamarre et Guy Lalonde ont adopté ces fonds d’investissement pour concevoir le portefeuille de leurs clients.

«Je me suis toujours plus intéressé aux secteurs qu’aux titres individuels, confie Guy Lalonde, vice-président et gestionnaire de portefeuille à la Financière Banque Nationale (FBN). C’est ainsi que j’ai abordé les FNB à un moment où on pouvait déjà choisir à même quelques centaines de produits aux États-Unis.»

Progressant sur des voies parallèles jusqu’en 2006, les deux conseillers ont uni leurs destins cette année-là en fusionnant leurs books d’affaires respectifs, créant ainsi le Groupe Lamarre Lalonde au sein de la FBN.

D’abord, les deux associés ont mis en place des portefeuilles indiciels qui satisfaisaient leurs exigences. «Nous avons privilégié une exposition aux catégories d’actif pures, sans intervention de la gestion active, et qui nous permet de construire la structure de notre choix», fait ressortir Christian Lamarre, premier vice-président et gestionnaire de portefeuille à la FBN.

Éduquer le client

Puis, ils se sont lancés dans une tâche ardue : «Nous avons entamé un virage à 180 degrés, au cours duquel nous avons entrepris l’éducation de nos clients, dit Christian Lamarre. Un grand changement.» Les deux associés ont multiplié les rencontres individuelles avec leurs clients existants, ainsi que les conférences et les ateliers pour recruter de nouveaux clients.

Pour une clientèle habituée aux fonds communs, le passage vers l’univers méconnu des FNB s’avérait alors difficile. «Nous étions des pionniers, constate Guy Lalonde. Nous avons passé presque une année entière, de 2006 à 2007, à ne faire que ça. Nous avons traversé à ce moment-là ce que toute l’industrie du conseil financier traverse aujourd’hui.»

Les associés ont d’abord mis en valeur auprès de leurs clients les forces des FNB : frais de gestion bas, transactions à tout moment, comme pour des actions, et aucune intervention de gestionnaires de portefeuille, qui ont beaucoup de difficulté à offrir une valeur ajoutée, car peu d’entre eux surpassent leur indice de référence à long terme.

Puis, ils ont exposé que les FNB cadraient avec leur philosophie d’investissement qui repose sur un meilleur contrôle du risque et du rendement grâce à une structure de portefeuille indicielle à catégories d’actif multiples.

«On ne vise pas seulement le rendement, mais la faible volatilité aussi, souligne Christian Lamarre. C’est donc un écart-type moindre qui est la clé, en combinant des catégories d’actif qui ont de faibles corrélations entre elles.»

Miser sur les honoraires

En plus de miser sur les FNB, les conseillers sont passés progressivement d’une rémunération basée sur les commissions de suivi à une rémunération sur honoraires.

Une partie de la clientèle de Guy Lalonde avait déjà l’habitude de payer des honoraires, mais une autre ne savait pas combien, au dollar près, ses investissements lui coûtaient. Les associés ont souligné l’avantage de la transparence des honoraires et le fait qu’ils obligent le conseiller «à ramer dans le même sens que le client», note Guy Lalonde.

S’ajoute aussi l’avantage fiscal des honoraires, qui sont partiellement déductibles d’impôt pour les placements dans les comptes non enregistrés.

Cet avantage touche la quasi-totalité des clients du Groupe, puisqu’un tiers d’entre eux est constitué d’entrepreneurs «qui n’ont pas le temps de s’occuper de leurs placements», glisse Christian Lamarre. Un autre tiers est composé de professionnels, et le dernier, de retraités.

Le portefeuille moyen se situe au-dessus de 1 M$, et les honoraires s’établissent en général entre 0,9 % pour un portefeuille de plus de 2 M$ et 1,25 % pour un portefeuille de 500 000 $.

Les clients ont aimé l’approche des deux partenaires, au point que 80 % d’entre eux se sont laissé convertir. «Les 20 % restants n’étaient pas prêts à le faire à ce moment-là, soit parce qu’ils étaient trop âgés, soit parce qu’ils trouvaient le secteur des FNB trop nouveau, relate Christian Lamarre. On n’a pas voulu les forcer. On les a conservés et lentement convertis au fil des ans. Aujourd’hui, 95 % de nos clients sont investis uniquement dans nos portefeuilles de FNB.»

Composition des portefeuilles

Les clients ont aimé l’approche de gestion de portefeuille du duo, qui s’appuie sur une diversification entre les catégories d’actif où il importe de combiner des secteurs peu corrélés entre eux pour réduire la volatilité.

«Si on détient de l’or, ce n’est pas parce qu’on pense que son prix va monter, mais parce que l’or a une faible corrélation avec les actions», explique Christian Lamarre.

Ensuite, les conseillers ne tentent pas de prédire la direction des marchés, car «les prévisions n’offrent aucune fiabilité, affirme Christian Lamarre. Prédire l’évolution de la Bourse, c’est vraiment jouer à pile ou face». Les conseillers laissent donc simplement le marché agir et effectuent un rééquilibrage systématique.

Gestion Lamarre Lalonde propose à ses clients trois portefeuilles : équilibré, revenu fixe, et rotatif tactique. Les deux premiers sont généralement le noyau du portefeuille des clients, et le troisième, un satellite.

L’actif de chaque client est investi dans ces trois outils, dans des proportions variables, ses investissements étant rééquilibrés trimestriellement ou quand les rendements l’exigent.

Le portefeuille équilibré privilégie des catégories d’actif variées, dont les actions, les obligations, et tout particulièrement ce que Guy Lalonde appelle les actifs réels : les secteurs immobiliers canadien et américain, et l’or.

Du côté des actions, on trouve des indices tant canadiens qu’américains et internationaux, comme le Vanguard FTSE Developed Markets ETF (symbole : VEA) et le iShares Core S&P/TSX Capped Composite Index (XIC).

Du côté des titres à revenu fixe, on compte six catégories d’actif, dont les actions privilégiées, les prêts bancaires prioritaires à taux variables et les obligations à rendement élevé et de pays émergents. Ces catégories sont représentées par autant de FNB tels que le iShares S&P/TSX Canadian Preferred Share Index (CPD) ou le PowerShares Senior Loan Portfolio (BKLN). Enfin, dans les actifs réels, on repère par exemple, le iShares S&P/TSX Capped REIT Index (XRE).

Le portefeuille de revenu est constitué à peu près comme le portefeuille équilibré, avec une inflexion accrue du côté de titres qui procurent un revenu récurrent, par exemple le SPDR S&P International Dividend Index (DWX).

Le portefeuille à rotation tactique est celui qui se distingue le plus par sa structure. Il est divisé en deux : une moitié est consacrée à la rotation entre les segments boursiers, par exemple les titres de petite capitalisation, de croissance ou de matières premières. À l’heure actuelle, le segment des grandes capitalisations est à l’honneur, en croissance depuis l’automne, le FNB retenu étant le Schwab US Large-Cap Growth (SCHG).

L’autre moitié est consacrée à quatre secteurs choisis parmi une liste de 34, comme les titres financiers, industriels ou de consommation. Au début de janvier, le secteur privilégié était celui des titres technologiques, par l’intermédiaire de FNB comme le Vanguard Information Technology ETF.

Le maître-mot de ce portefeuille est «momentum». «On n’essaie pas de choisir le prochain segment ou le secteur qui va monter, explique Guy Lalonde. On en sélectionne un quand son leadership est assez solidement établi.»

Cette recette porte ses fruits. Par exemple, pour les cinq dernières années jusqu’au 30 janvier 2015, alors que le S&P/TSX a donné un rendement annualisé de 8,8 %, le portefeuille équilibré a crû de 9,99 %, le portefeuille rotation tactique, de 14,31 %, et le portefeuille à revenu, de 8,57 %. Sur la même période, l’écart-type des trois derniers portefeuilles se chiffre à 5,12 %, à 11,89 et à 3,88 %, respectivement, alors que l’écart-type de l’indice S&P/TSX s’élevait à 9,77 %.

Grâce à un travail acharné et à une philosophie de placement performante, Groupe Lamarre Lalonde a réussi à se constituer jusqu’ici un actif sous gestion de 400 M$. À présent, tous les éléments de la formule étant bien rodés, Christian Lamarre n’hésite pas à annoncer «on vise un actif de 1 G$ d’ici les cinq prochaines années».