Les formes de détentions d’un bien immobilier sont l’un des nombreux aspects abordés lors de la conférence que donnaient les formateurs Fabien Champagne et Patricia Besner lors du congrès annuel de l’Institut québécois de planification financière (IQPF) qui se tenait à Québec du 5 au 7 juin 2013.

La conférence suivait l’étude de cas du congrès: Martin a connu une belle et longue carrière de près de vingt ans dans la Ligue nationale de hockey (LNH), mais la période d’inactivité survenue en raison du lock-out en 2012-2013 l’a amené à annoncer sa retraite définitive. Martin revient au Québec avec sa nouvelle conjointe américaine, Tracy, et le couple songe également à faire l’acquisition d’une propriété en Floride.

«Comment fonctionne l’accession au droit de propriété aux États-Unis? Nous sommes familiers avec l’achat de bien immobilier ici, mais c’est très différent aux États-Unis où il y a cinq façons d’accéder à la propriété », souligne Fabien Champagne en ajoutant que des complications importantes peuvent se produire lors du décès d’un client si le mode de détention a été mal choisi.

La première façon de détenir un bien immobilier, la plus simple et la plus utilisée aux États-Unis, est la «tenancy in fee simple», qui correspond au fait d’être le seul détenteur d’une propriété. Lorsque le propriétaire décède, il faudra passer à travers l’homologation, aussi appelée «probate» en anglais.

L’homologation consiste à faire valider le testament, qui doit être rédigé en anglais, à nommer un exécuteur testamentaire, à faire paraître des annonces dans les journaux au cas où des créanciers se manifesteraient et à nommer un avocat en Floride pour régler les détails légaux.

« En plus du testament en anglais, il faut faire émettre une opinion juridique, en anglais, qui dit que le testament notarié est bien valide et suivre une procédure auprès de la Chambre des notaires pour s’assurer que le notaire qui a validé le testament était conforme au moment de la signature», explique Me Marcel Racicot, avocat fiscaliste chez Racicot et associés et président et la Chambre de commerce Québec-Floride.

Le deuxième mode de détention est la « tenancy by entireties » qui est offert aux couples mariés. Pour en bénéficier, les propriétaires doivent être légalement mariés, et non pas conjoints de faits, et doivent le rester jusqu’au décès du premier conjoint. La propriété immobilière revient alors au conjoint survivant.

Cette modalité peut causer quelques problèmes, notamment dans le cas où un couple marié se serait séparé sans divorcer. Si l’un des deux conjoints refait sa vie avec une autre personne et décide de lui léguer le condo en Floride, ce n’est pas l’héritier désigné dans le testament, mais plutôt l’époux séparé qui obtiendra la propriété immobilière.

Le troisième mode de détention est le «joint tenancy with right of survivorship» grâce auquel un nombre de propriétaires peut détenir des parts égales d’un bien immobilier. Par exemple, si trois individus sont propriétaire d’une maison, ils en détiendront chacun 33%. Il n’est pas possible dans ce mode de détention de séparer la propriété en parts inégales, comme 50%, 25% et 25 %. Au décès de l’un d’entre eux, sa part est divisée en parts égales et distribuée aux propriétaires survivants.

Le « joint tenancy » existe aussi sans « right of survivorship». Dans ce cas, au décès d’un propriétaire, sa part n’est pas redistribuée aux propriétaires survivants.

« Il faut faire attention puisque c’est souvent un mode de détention qui est recommandé aux clients par les professionnels en Floride, indique Marcel Racicot. Par exemple, monsieur va acheter un condo et le mettre au nom de madame. C’est donc un don. La problématique, c’est qu’en faisant un don, monsieur ne pourra pas bénéficier de l’exemption pour don de 5 M$ à laquelle ont droit les citoyens américains. En tant qu’étranger, il n’aura droit qu’à 14 000$ d’exemption et sera assujetti à un impôt pour don correspondant à 40 % de la valeur de la propriété.»

Un autre mode de détention en commun est le « tenancy in common » où il n’y a pas de part indivise dans la propriété. Les copropriétaires peuvent se diviser en portions inégales leur bien immobilier et sont toutefois assujettis aux procédures d’homologation au moment du décès de l’un d’eux.

Finalement, on retrouve le « life estate » qui permet à une personne de détenir un bien immobilier alors qu’une autre personne a des droits d’utilisation sur celui-ci. Par exemple, un fils détient une maison qui est habitée par sa mère. Le capital est au fils, mais le droit d’usufruit est à la mère.

«Le décès n’implique pas nécessairement de droits successoraux à l’égard de la mère, note Marcel Racicot. Toutefois, il faut s’assurer que le propriétaire, le fils dans l’exemple, a bel et bien payé la demeure et que ce n’est pas un don.»

Il est également important de noter qu’en plus d’un testament traduit en anglais, le client qui décide d’acheter une propriété en Floride devrait également se munier d’un « power of attorney », qui remplace le mandat en cas d’inaptitude aux États-Unis. En effet, un mandat québécois n’est pas valide au sud de la frontière.

 

 

Ce texte a été modifié pour apporter des précisions, notamment en ce qui a trait au joint tenancy, à l’exemption pour don et au life estate. De plus, Marcel Racicot n’est pas notaire, comme indiqué dans la première version de cet article, mais avocat fiscaliste.