Des experts croient que la Banque du Canada ne devrait pas pour le moment réduire son taux directeur, malgré la guerre commerciale déclenchée par les États-Unis.
La Banque Royale du Canada (RBC) figure parmi les institutions qui souhaitent que la banque centrale ne touche pas à son taux directeur, malgré les risques de ralentissement économique dans certains secteurs.
Frances Donald, première vice-présidente et économiste en chef de la RBC, croit que la Banque du Canada pourra réduire son taux directeur à cause « des poches de faiblesse » de l’économie canadienne, comme un marché immobilier à la traîne et des secteurs touchés par la guerre commerciale.
« D’un autre côté, il faut se demander si une baisse du taux directeur aiderait vraiment à régler les problèmes affectant l’économie canadienne », ajoute-t-elle.
Le taux directeur est un instrument qui affecte tous les Canadiens et tous les marchés, peu importe s’ils ont réellement besoin d’un appui, mentionne Frances Donald.
Par exemple, une baisse du taux directeur affecterait autant la région de Windsor, dont le taux de chômage dépasse les 11 % que celle de Victoria où ce taux est inférieur à 4 %.
« Une réduction du taux directeur serait sans doute inappropriée dans un tel environnement économique », lance Frances Donald.
La RBC souhaite plutôt que les industries et les municipalités dépendantes de la production manufacturière reçoivent une aide ciblée du gouvernement.
Après l’avoir réduit d’un quart de point en mars, la banque centrale a maintenu son taux directeur à 2,75 % en avril et en juin.
À la suite des dernières données sur l’emploi montrant un progrès inattendu et une inflation stable à environ 3 %, les économistes s’attendent à ce que la Banque centrale suive le même cheminement dans sa prochaine annonce, le 30 juillet.
Une majorité d’économistes croient que la Banque du Canada réduira une ou deux fois son taux directeur d’ici la fin de l’année avant d’interrompre le mouvement. Selon eux, l’économie aura besoin d’un peu d’aide lorsque l’inflation sera maîtrisée.
Même si elle est moins optimiste que la Banque Royale et considère que le Canada est déjà entré dans une période de récession, la firme Oxford Economics ne croit pas que la banque centrale réduira son taux directeur.
Dans une mise à jour de ses prévisions, elle dit s’attendre à des pertes d’emploi au cours des prochains mois. Elle croit aussi que l’inflation pourrait grimper à 3 % d’ici le milieu de 2026 à cause des droits douaniers et des tensions que ceux-ci créeront sur la chaîne d’approvisionnement.
Oxford Economics soutient que la Banque du Canada voudra contrer toute hausse des prix et maintiendra son taux directeur même si la croissance stagne à cause de la guerre commerciale.
Frances Donald concède que les consommateurs, déjà meurtris par la hausse de l’inflation après la pandémie, se sentent craintifs lorsqu’ils voient des prix monter dans les commerces.
La Banque de Montréal, elle, prévoit trois autres baisses du taux directeur, le dernier devant survenir en mars 2026.
Son économiste en chef, Doug Porter, accepte les arguments défendant une baisse réduite du taux directeur ou même une stabilisation.
« On peut observer les attentes des marchés financiers. Ce sont de très bons juges. Et actuellement, ils espèrent une autre réduction », dit-il.
Doug Porter dit que le gouvernement fédéral compte accroître au cours des prochains mois ses dépenses militaires et ses investissements dans les infrastructures, ce qui pourrait enlever de la pression sur la Banque du Canada pour réduire le taux directeur.