Six ans après le décès de Karl Lagerfeld, directeur artistique de la célèbre maison de mode Chanel pendant 36 ans, ses héritiers n’ont toujours rien reçu de son imposante succession. En cause : une dette fiscale qui en paralyse le règlement.
Décédé en 2019, le créateur allemand laisse derrière lui un patrimoine estimé à plus de 200 millions d’euros (315 millions de dollars canadiens), principalement investi dans l’immobilier. En l’absence d’héritiers directs, son testament, rédigé en 2016, désigne huit bénéficiaires incluant d’anciens collaborateurs et amis intimes, comme son garde du corps, plusieurs mannequins et la gouvernante de sa chatte Choupette.
Cependant, malgré un testament en bonne et due forme, aucun des bénéficiaires n’a encore touché sa part de l’héritage. La succession est en effet plombée par quelque 20 millions d’euros de dettes envers le fisc. Ces dettes sont en grande partie dues à des montages financiers complexes mis en place par un ancien comptable, selon des informations divulguées par Paris Match.
Ce n’est que récemment que les héritiers auraient renoncé à contester les sommes réclamées par l’administration fiscale et accepté de les régler pour débloquer la situation, selon le média spécialisé glitz.paris. Des ventes d’actifs, notamment un hôtel particulier et un appartement à Paris, auraient permis d’amorcer ce remboursement.
La dette fiscale ne s’efface pas avec la mort
Le cas Lagerfeld illustre une réalité souvent méconnue : en France comme au Canada, la dette fiscale d’un défunt ne s’efface pas à sa mort. Elle est transférée aux héritiers, à moins que ceux-ci ne refusent la succession. De plus, tant que celle-ci n’est pas réglée, aucun héritier ne peut toucher sa part.
Les dettes fiscales du défunt — impôt sur le revenu, gains en capital réputés réalisés au moment du décès, pénalités ou intérêts — doivent donc être acquittées avant toute distribution de l’actif successoral.
Si les liquidités manquent, les liquidateurs peuvent être contraints de vendre des biens ou d’emprunter pour couvrir ces obligations. Dans certains cas, les héritiers peuvent être tenus personnellement responsables si les dettes sont ignorées et que l’actif a été distribué prématurément, selon Éducaloi.
Mesures plus strictes
L’avocat fiscaliste Marc Bornhauser, signale que, depuis quelques années, les autorités fiscales françaises se montrent plus rigoureuses à l’égard des contribuables à hauts revenus. « On est passé à une amende maximale de deux millions d’euros pour fraude fiscale, contre 37 500 euros il y a seulement quatre ans », précise-t-il dans Capital.fr.
Il indique que le fisc privilégie dorénavant des procédures plus rigides en réduisant notamment les possibilités de négociation au cas par cas. Conséquence : la demande de conseils fiscaux explose chez les particuliers à hauts revenus.
Dans l’affaire Lagerfeld, bien que certaines avancées aient été réalisées grâce à la vente de propriétés, la succession n’est toujours pas close. « Aucun héritier n’a encore rien reçu », confirmait récemment l’administrateur judiciaire, précisant que les comptes bancaires du défunt ne contenaient pas les liquidités nécessaires pour payer la dette fiscale, ce qui complique le règlement de la succession.