Les prêts au taux prescrit au neutre

En effet, le taux prescrit, qui vient de monter de 1 % à 2 % pour le dernier trimestre de 2013, pourrait bien redescendre.

Le « taux d’intérêt utilisé pour calculer les avantages imposables qui sont accordés aux employés et aux actionnaires sous forme de prêts sans intérêt et de prêts à faible taux d’intérêt », communément appelé « taux prescrit », est utilisé pour certains prêts en entreprise, mais également pour les prêts entre conjoints.

« Le prêt entre conjoints sert lorsqu’on a deux conjoints qui ont une importante différence de revenu et d’actifs. Le conjoint le plus fortuné peut prêter à l’autre qui s’engage à lui payer des intérêts avant le 30 janvier de l’année suivante. Ces intérêts suivront le taux prescrit qui est, depuis le 1er octobre, de 2 % », explique Guylaine Dufresne.

La conseillère recommande d’ailleurs de conserver des preuves que les intérêts ont bien été payés à temps sur le prêt entre conjoints. Si le fisc pose des questions, il sera ainsi facile de démontrer que les règles ont été respectées et que le contribuable n’a rien à se reprocher.

Conséquence de l’augmentation

L’augmentation du taux prescrit rend la mise en place d’une stratégie de prêts entre conjoints un peu moins avantageuse.

Prenons l’exemple d’un conjoint fortuné, ayant des revenus de 150 000 $ par année, qui prête un million de dollars à sa femme, n’ayant pas de revenus, au taux prescrit de 1 %. Celle-ci fait 5 % de rendement sur son placement, soit 50 000 $. Elle paiera des intérêts de 10 000 $ à son conjoint qu’elle pourra déduire de ses revenus de 50 000 $ puisque c’est un prêt pour investissement.

« Monsieur n’aura besoin d’ajouter à ses revenus que 10 000 $ et madame pourra déclarer des revenus de 40 000 $. Si monsieur avait dû s’imputer les 50 000 $ de revenus supplémentaires, il aurait payé presque 25 000 $ en impôt sur ces revenus de placement. Madame, qui n’a presque pas de revenus, sera beaucoup moins imposée pour un gain de 40 000 $ », souligne Sylvain Chartier.

Lorsque le taux prescrit passe de 1 à 2 %, la quantité d’intérêts que madame doit payer à monsieur monte de 10 000 $ à 20 000 $. Le conjoint fortuné devra alors ajouter 20 000 $ à ses revenus alors que les revenus transférés à madame ne seront que de 30 000 $.

Hausse temporaire?

Le taux prescrit est calculé en faisant la moyenne des taux des bons du Trésor de trois mois de la Banque du Canada: « Par exemple, pour le taux prescrit du premier octobre, on a fait la moyenne des bons du Trésor en juillet. Pour le taux prescrit du prochain trimestre, qui sera annoncé en janvier, on fera la moyenne des taux du mois d’octobre, indique Sylvain Chartier. Si la moyenne de ces taux se chiffre à 0,98 %, le taux prescrit sera arrondi à 1 % alors que si la moyenne atteint 1,01 %, le taux prescrit sera fixé à 2 %. La moyenne est toujours arrondie à la hausse. »

Les taux d’intérêt ont légèrement augmenté au début de l’été, ce qui a suffi à faire monter la moyenne à 1,01 % et, conséquemment, le taux prescrit à 2 %. « La moyenne des bons du Trésor pour septembre était inférieure à un, note Sylvain Chartier. Si octobre est à l’image de septembre, on pourrait donc s’attendre à ce que le taux prescrit redescende à 1 % en janvier prochain. »

Les clients qui voudraient mettre en place une stratégie de prêt au conjoint devraient donc peut-être attendre en janvier 2014 afin de voir si le taux prescrit ne reviendrait pas à 1 %. Les clients qui ont déjà une entente de prêt ne devraient quant à eux rien faire puisque le taux fixé dans le contrat est celui qui prévaut jusqu’à la fin du prêt.

« Les clients qui attendent une entrée de fonds importante en octobre et qui n’auraient pas pu conclure d’entente de prêt en septembre devraient attendre, note Sylvain Chartier. Si la moyenne des taux était montée jusqu’à 1,7 ou 1,8 %, je me poserais plus de questions, mais il est très possible que le taux prescrit redescende à 1 % en janvier. »

Photo Bloomberg