femme d'affaire réfléchit en regardant son écran d'ordinateur
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L’objectif de la prochaine révision des dépenses n’est pas de couper dans les programmes sociaux, insiste le gouvernement fédéral, mais certaines défenseuses de l’égalité des sexes souhaitent qu’elle soit réalisée en ayant les femmes et les personnes marginalisées en tête.

Dans son dernier budget présenté plus tôt en avril, le gouvernement avait annoncé une série de révisions de ses programmes et politiques. Il espère pouvoir réaliser des économies de 6 milliards de dollars (G$) au cours des cinq prochaines années et de 3 G$ par année à compter de 2026.

« Les paramètres de ce processus seront mis au point au cours des prochains mois. Toutefois, le gouvernement n’a pas l’intention de couper dans les programmes sociaux déjà existants », dit Jessica Eritou, porte-parole du cabinet de la ministre des Finances Chrystia Freeland.

Il est normal que le gouvernement révise ses dépenses afin d’améliorer ses programmes, convient Katerine Scott, une économiste du Centre canadien de politiques alternatives. Toutefois, elle rappelle que de précédents gouvernements ont souvent utilisé cet outil pour imposer des mesures d’austérité.

Par exemple, le gouvernement libéral de Jean Chrétien avait révisé les dépenses de 1994 à 1997. Le résultat: une forte réduction des programmes sociaux et des transferts vers les provinces et territoires.

Ces réductions avaient frappé de façon disproportionnée les femmes, particulièrement les plus vulnérables, avait conclu une analyse de l’Alliance féministe pour l’action internationale.

« Elles ont payé le prix », rappelle Katerine Scott.

Robert Shepherd, de l’Université Carleton, se souvient de la révision réalisée par le gouvernement conservateur de Stephen Harper.

Environ 26 000 emplois avaient été abolis. Des services et les programmes sociaux avaient été réduits à des peaux de chagrin.

« Peu de choses ont été réalisées sur le plan des programmes et des services au cours des années où Harper était au pouvoir. Nous n’avons pas vraiment investi dans des politiques ayant des objectifs », signale le Pr Shepherd.

Les expériences du passé devraient nous donner des enseignements pour l’actuelle révision, dit Katerine Scott.

« Dans quel esprit sera réalisée la révision? Comme le gouvernement réfléchira à ses aides? Qui en paiera le prix? », s’interroge-t-elle.

Martha Jackman, du comité national de direction de l’Association nationale Femmes et Droit, souhaite que le gouvernement fédéral reconnaisse que la révision se fasse conformément au droit à l’égalité des femmes garanti par la Charte des droits et libertés.

« La Charte canadienne garantit le droit à une protection et des avantages sociaux égaux pour toutes les mesures gouvernementales, y compris pour les dépenses », souligne celle qui est également professeure de droit constitutionnel à l’Université d’Ottawa.

Sabir Khan, le vice-président de l’Institut des finances publiques et de la démocratie de l’Université d’Ottawa, dit que l’objectif d’une révision n’est pas nécessairement de mener à des coupes budgétaires.

« Essentiellement, la révision concerne la qualité des dépenses, l’amélioration de l’efficacité afin d’obtenir de meilleurs résultats. Le gouvernement a l’occasion d’examiner toutes les dimensions intersectionnelles de ses programmes et de s’améliorer. »

Kate Bezanson, une experte des politiques sociales et de genre de l’Université Brock, n’est pas surprise par l’engagement du gouvernement à ne pas réduire les programmes sociaux, notant que l’inclusivité fait partie des critères de la révision.

« C’est un signal. Les droits et l’appui aux politiques sociales sont souvent les plus importants leviers politiques pour l’inclusivité », souligne-t-elle.

La ministre des Femmes et de l’Égalité des genres, Marci Ien, dit ne pas pouvoir décrire ce que la révision comportera. Elle mentionne que le budget « a assurément un ancrage fiscal ».

« Les temps sont difficiles », lance-t-elle en parlant de l’inflation mondiale qui atteint des taux inégalés depuis plusieurs décennies.

Toutefois, Marci Ien dit que des mesures comme le plan national d’action contre la violence fondée sur le genre démontrent que le gouvernement avait placé la cause des femmes parmi ses priorités.