Homme d'affaire devant un panneau technologique.
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Encore trop peu de conseillers comprennent qu’ils doivent développer leurs compétences pour bien travailler avec leurs outils technologiques, ce qui pose un risque sur le plan de la convenance de leurs recommandations aux clients.

C’est l’un des messages qu’a livrés Chantal Lamoureux, présidente-directrice générale de l’Institut québécois de planification financière (IQPF), lors du Rendez-vous de l’Autorité des marchés financiers, le 22 novembre.

Elle dresse un parallèle entre le rôle du conseiller et le planificateur financier et celui du pilote d’avion. Celui-ci sait comment fonctionne son avion même s’il peut utiliser la fonction de pilote automatique.

« Il va falloir que les conseillers et les planificateurs financiers sachent ce qu’il y a dans l’outil pour vraiment apporter de la valeur – qu’ils connaissent bien leur avion. Quand vous cochez une case dans un outil, qu’est-ce qui se passe en arrière? Sans connaître au complet l’algorithme qui est là, on doit le comprendre suffisamment pour cocher les bonnes choses et ne pas être en train d’offrir quelque chose qui ne répond pas [aux] besoins [du client] », a indiqué Chantal Lamoureux lors de l’événement virtuel.

Il est vrai que les nouveaux développements technologiques offrent de grands avantages afin d’éviter aux humains des tâches cléricales, lesquelles sont synonymes d’erreurs humaines. Ces développements permettent aussi d’enrichir les relations avec les clients, notamment si l’outil permet au client d’ajuster lui-même les paramètres de son plan, amorçant ainsi instantanément une révision de sa situation financière.

Toutefois, ils présentent un risque de non-personnalisation des conseils ou des produits offerts au client, selon Chantal Lamoureux. « C’est complexe, le secteur financier. Il y a de nombreux paramètres et de nombreuses variables quand on donne un conseil ou on fait une transaction. Souvent, le client ne connaît pas lui-même les impacts des décisions qu’il prend à court, moyen et long terme. Il va falloir que les technologies, on les perfectionne afin de permettre davantage de personnalisation », a-t-elle noté.

Par ailleurs, les conseillers devraient également accroître leurs compétences relationnelles dans des relations à distance, surtout s’ils utilisent la technologie pour communiquer avec leurs clients.

« Comment peut-on s’assurer que l’on comprend bien notre client, qu’il comprend qu’on est à l’affut de ses soucis, de ses préoccupations, qu’on est toujours en train de travailler dans son intérêt ? Il faut être vigilant et développer nos compétences pour être aussi bon en ligne qu’en présentiel », a-t-elle mentionné.

Appel aux régulateurs

Ces nouvelles compétences – établir des relations virtuelles et comprendre ses outils technologiques – sont si importantes que les régulateurs devraient même rouvrir leur règlement de formation continue après avoir réfléchi sur ce dont les conseillers ont besoin pour protéger le public, a plaidé Chantal Lamoureux.

« Je ne sens pas toujours que les gens voient le besoin de développer leurs compétences. La formation, c’est plus que des unités de formation continue. C’est plus qu’une obligation à court terme. C’est une responsabilité professionnelle à long terme. Si vous placez votre client au cœur de vos préoccupations, vous former c’est une responsabilité que vous devez prendre. Ce n’est pas une charge », a-t-elle souligné.

Par ailleurs, Chantal Lamoureux a souligné que la technologie peut accroître le risque de s’administrer soi-même de mauvais conseils, parfois sans le savoir. En effet, l’éducation financière n’est pas si élevée, selon elle. D’après un sondage mené pour l’IQPF dans le cadre de la semaine de la planification financière, « ce sont deux Québécois sur trois qui disent qu’ils n’ont pas les connaissances financières pour prendre soin de leur avenir financier. Chez les jeunes de 25 à 44 ans, c’est trois Québécois sur quatre. »

Le sondage révélait aussi que les investisseurs se fient beaucoup à leurs proches pour prendre des décisions. « Or, [ces derniers] n’ont pas la vision globale et ils ne nous disent pas tout. L’argent reste un tabou au Québec. On ne se raconte pas tout. Les professionnels ont un rôle à jouer de transmettre leur connaissance, de vulgariser et expliquer les choses au client », a-t-elle dit.