«Avant, il n’y avait pas vraiment de questions ouvertes. Les questions fermées étaient embêtantes parce que parfois ça ne s’appliquait pas à des cas précis», dit-il.

Son de cloche similaire de la part de Gino Savard, président du cabinet Mica Services financiers. «Dans l’ancien formulaire, c’était du « cochez oui, cochez non », qui était souvent pas admissible en fonction des produits qu’on avait, relate-t-il. Le nouveau formulaire offre plus d’espace pour écrire des détails et des justifications.»

Ce nouveau formulaire offre plus de clarté aux clients, ajoute-t-il : «Comme c’est plus précis et qu’on a plus d’espace pour donner des explications, ils peuvent mieux comprendre certains éléments comme la clause d’incontestabilité ou la clause suicide, par exemple».

Nouveau cours de la CSF

Les modifications au Règlement sur l’exercice des activités des représentants (REAR) ont été apportées par la Chambre de la Sécurité Financière (CSF) en octobre 2013. Une de ces modifications est la création d’un nouveau formulaire de préavis de remplacement unique pour tous les types de contrats d’assurance de personnes. Celui-ci est obligatoire depuis octobre 2014.

L’objectif d’une telle mesure ? Mieux expliquer en quoi le remplacement d’une police d’assurance existante est à l’avantage d’un client. L’actuel formulaire est moins restrictif que son précédent, estime Marie Elaine Farley, présidente de la CSF : «Le conseiller a la possibilité de justifier certains éléments».

N’empêche, des représentants interrogés soulignent la surcharge de travail causée par le nouveau préavis. «C’est compliqué et lourd», écrit un représentant dans le sondage sur l’assurance, le «Baromètre 2015». Certains l’estiment «nul» ou «hyper flou». Un autre le juge «très fastidieux et très lourd».

Alexis Boisvert n’endosse pas ces propos. Remplir ces formulaires est plus court, selon lui. «Avant ça, c’était des copies de carbone – trois copies dont une pour le client – qu’on remplissait à la main. C’était long et ce n’était pas aussi propre.»

Marie Elaine Farley avance que comme pour toute modification, il y a une période d’adaptation. Pour soutenir les représentants et les conseillers, la CSF a élaboré un cours avec les responsables en conformité de l’industrie qui sera offert dès l’automne.

«Il ne s’agit que de remplir un formulaire correctement, avance-t-elle. L’incidence pour une personne de remplacer une assurance n’est pas banale. […] À la base, le principe est de favoriser le maintien d’une police d’assurance vie en vigueur, entre autres choses, parce qu’il y a la clause d’incontestabilité.»

Bataille commerciale moins rude ?

Est-ce que l’actuel formulaire freinera la stratégie dénoncée l’an dernier dans nos pages par des acteurs de l’industrie, et qui consiste à utiliser des préavis de remplacement pour déposer des plaintes non fondées contre des conseillers concurrents ?

Là n’est pas l’objectif premier, répond Marie Elaine Farley. Elle espère toutefois que le nouveau formulaire, étant plus détaillé, permette aux représentants perdant un client de mieux comprendre la situation. «Quand on fait une plainte, il faut des motifs sérieux», souligne-t-elle.

Gino Savard partage cet avis. Comme le formulaire demande une plus grande implication des conseillers, il est possible de jauger leur professionnalisme.

«Toutefois ce n’est pas ça qui va changer le fait que certains conseillers s’amusent à remplir des formulaires de plaintes», remarque-t-il. Le phénomène continue d’exister.

Un concurrent use actuellement de cette stratégie auprès d’un de ses conseillers. «Ça demande beaucoup de temps chaque fois, même si la plainte n’est pas fondée.»

Noter que le processus de remplacement trône au sommet des infractions alléguées dans les demandes d’enquête de la CSF depuis 2010. En 2014, il totalise 30 % des infractions alléguées, selon le dernier rapport annuel de la CSF. «Ça ne veut pas dire qu’elles sont fondées», précise la présidente de l’organisme d’autoréglementation.

Qui plus est, le secteur de l’assurance de personnes détient la part du lion des plaintes déposées à la CSF. En 2014, 77 % des plaintes étaient liées au secteur de l’assurance de personnes.

Le nouveau préavis de remplacement n’est obligatoire que depuis octobre 2014, rappelle Marie Elaine Farley : «C’est davantage l’année prochaine qu’on pourra avoir une idée de son impact réel».