Dans ce secteur, la compétition est rude. Elle vient souvent de l’extérieur, notamment de la Chine. Pour se démarquer, il faut d’abord une matière de haute qualité. «Nous travaillons à partir d’un schiste assez rare en Amérique du Nord, qui a des couleurs très diverses, alors que les schistes d’ardoise sont souvent monochromes», explique Denis Bisson.

Cette matière offre la possibilité de faire des produits finis de très grande qualité, mais représente un défi technique beaucoup plus grand que d’autres types d’ardoise. «Elle est très difficile à fendre, donc découper des feuillets dans cette matière est une opération très complexe», précise l’entrepreneur. Si l’on s’y prend mal, l’ardoise peut fendre de travers, briser, voire éclater en miettes.

Des méthodes innovantes

Extraire et transformer ce matériau exige des méthodes innovantes. L’Ardoisière consacre de 10 à 15 % de son chiffre d’affaires annuel à la R-D. Dans une province où 45 % des PME manufacturières consacrent moins de 2 % de leur revenu à la R-D, cela témoigne de la volonté d’innovation de cette entreprise.

Denis Bisson reconnaît que les crédits d’impôt lui sont d’une aide précieuse. «Cela nous permet d’avancer beaucoup plus vite que ce que nous aurions normalement pu faire sans ces avantages fiscaux», souligne-t-il.

Les méthodes novatrices de L’Ardoisière débutent dès l’extraction. L’entreprise coupe au câble diamanté, comme les Italiens le font avec leur marbre de Carrare. «C’est beaucoup plus sophistiqué et écologique qu’un dynamitage», explique Denis Bisson.

Ce type de forage de précision exige notamment l’utilisation d’un lecteur électromagnétique de positionnement pour connecter des trous de forage sur une distance de plus de 30 pieds. Cette méthode permet de découper des blocs de 500 à 750 tonnes. «On récupère entre 50 % et 60 % de matière, contrairement au dynamitage, qui ne permet d’en récupérer que 2 ou 3 %».

Découpage au jet d’eau

L’innovation s’étend aussi à la transformation. Denis Bisson donne l’exemple de sa plus récente acquisition majeure, un système de découpage au jet d’eau, d’une valeur de 250 000 $. L’entreprise a dû adapter toutes les vitesses de coupe et les pressions pour que la méthode corresponde à leur matériau.

Mais même là, il y avait une part de risque, puisque ce ne sont pas toutes les ardoises qui peuvent être découpées au jet d’eau. «Certaines ne sont pas assez denses et se fendent ou éclatent», explique-t-il. Il a confiance dans la qualité de son matériau, et armé des résultats de certains tests, il a tenté le coup, avec un résultat fort satisfaisant.

«Ce type d’innovation nous met un peu à l’abri de la compétition, car la découpe au jet d’eau nous permet de faire des produits à haute valeur ajoutée», soutient Denis Bisson.