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L’anxiété face à l’argent est un phénomène connu, mais avec la pandémie actuelle les gens sont nettement plus stressés et risquent davantage de prendre des décisions irréfléchies qui pourraient avoir de lourdes conséquences sur le plan financier.

« On dit que la peur est mauvaise conseillère. Le conseiller doit faire attention à ce que ses clients ne posent pas de gestes bruts, pour lesquels ils n’ont pas eu vraiment de conseil, car ces gestes peuvent leur faire plus de peur que de bien », prévient Rose-Marie Charest, psychologue et conférencière.

Être proactif

Le conseiller se doit d’être proactif pour éviter ce type de réactions, notamment en contactant ses clients. Évidemment, vu le nombre de clients lié à chacun des conseillers, il n’est pas évident de tous les contacter, admet la psychologue. Cependant, un conseiller connait sa clientèle, il sait donc quels sont les clients les plus à même de paniquer ou de risquer d’agir trop hâtivement. C’est donc sur ceux-ci qu’il faut se concentrer en premier.

Si l’idée de tenir des discussions de groupe pourraient sembler être une solution intéressante, ce n’est pas le cas pour plusieurs raisons, d’une part car « chacun a ses propres questions et a besoin d’être rassuré sur un élément particulier », ajoute Rose-Marie-Charest. Il y a aussi des enjeux de conformité à considérer à cet égard.

Toutefois, cela ne signifie pas qu’il ne faut pas envoyer de l’information à tous ses clients. La conférencière suggère par exemple de profiter des moyens technologiques pour envoyer des capsules par voie électronique aux clients. « Ça serait comme une façon de rentrer chez eux pour les rassurer », assure-t-elle.

Que dire et ne pas dire

Une des pires choses à faire serait de nier la réalité. Cela nuirait à la crédibilité du conseiller et ça ne calmerait pas le client, affirme Rose-Marie Charest.

« Le conseiller doit maintenir sa crédibilité et pour ça il faut dire la vérité, mais en même temps, il faut éviter de dire tout ce qui est de l’inflation de peur soit: c’est effrayant ou on ne sait pas quand ça va s’arrêter… », précise-t-elle.

Pour calmer l’inquiétude des clients, il faut faire face à la réalité. Il est essentiel de les écouter et leur demander quelles questions ils se posent par rapport à leurs finances, déclare-t-elle. Le conseiller doit assurer au client qu’il va tenter de répondre à ses questions compte tenu de l’information qu’il possède. Le conseiller doit se présenter comme un allié qui en sait plus que ses clients et qui va leur faire bénéficier de ses connaissances et de son expertise.

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Une autre chose importante c’est de reconnaître que la situation est difficile sur le plan économique, mais lui rappeler que c’est complexe pour tout le monde. La personne qui a peur est souvent concentrée sur sa vision à elle, elle a besoin de savoir que d’autres personnes vivent la même chose.

« C’est très différent d’une baisse financière qu’il serait seul à vivre, commente Rose-Marie Charest. Actuellement, tout le monde, ou à peu près, est touché par ce qu’il se passe, donc je mettrais les choses en perspective par rapport à l’ensemble de la population, mais aussi par rapport à l’ensemble de leur vie. Il faut rappeler qu’il y a déjà eu des baisses économiques, et qu’on s’en est remis. Il y en a une là, on va s’en remettre encore. »

Évidemment, une pandémie comme celle que l’on vit actuellement est une situation unique, mais le monde n’a jamais été aussi informé et interrelié. « Le problème est immense, mais les solutions et la collaboration vers des solutions sont immenses aussi. Tout le monde veut que ça se règle, pas juste le client. Même les plus puissants de ce monde veulent que ça se règle rapidement donc leurs motivations vont se rejoindre. »

Les nombreuses mesures prises par le gouvernement montrent que celui-ci comprend que la population a besoin d’aide et il veut aider à traverser ces difficultés du mieux possible. Les clients sont donc loin d’être seuls dans cette situation.

« Le fait de savoir qu’il y a une conscientisation de la part du gouvernement envers les employeurs, les banques et plusieurs acteurs économiques, fait en sorte que plusieurs personnes peuvent sentir qu’il n’y a pas qu’elles qui doivent s’occuper de leurs propres affaires, mais que les gouvernements s’en occupent aussi et veulent s’assurer qu’on prévienne la pauvreté », note la conférencière.

Une autre façon de mettre les choses en perspective serait de s’attarder sur la peur des clients de perdre de l’argent. Risquent-ils réellement de ne pas pouvoir payer leur loyer, leur hypothèque et les autres choses essentielles? « Il faut les ramener dans la réalité la plus concrète possible », conseille Rose-Marie Charest.

L’information n’est pas une distraction

Avec cette information continue, beaucoup voient leur anxiété grimper. Les conseillers doivent aider les gens à gérer et à bien traiter ce flot d’informations, mais il est aussi important de leur rappeler de ne pas utiliser l’information comme une distraction, prévient la psychologue.

« On va s’informer pour s’informer, pas pour vivre des émotions fortes. Il faut absolument trouver d’autres sources de distraction », insiste-t-elle.

Évidemment, il existe nombre de formes de détentes comme la respiration, la détente musculaire, le yoga ou l’exercice, mais le principal c’est surtout de trouver une activité qui fait plaisir.

« Il faut absolument que les gens regardent ce qu’ils peuvent faire. Il y a toute une zone de liberté qui est perdue, toute une zone de plaisir que j’avais et que je ne peux plus avoir, mais quels sont tous les plaisirs que je peux encore avoir », explique Rose-Marie Charest.

Ne pas s’oublier derrière tout ça

Une autre chose essentielle pour conseiller c’est de ne pas s’oublier derrière ses clients. « Si le conseiller est lui-même très inquiet, c’est sûr qu’il ne pourra rassurer personne », note la psychologue.

Il est important que les conseillers ne cèdent pas eux aussi à la panique. Ils doivent donc avant tout prendre soin de leurs propres affaires et de leur famille. Ils doivent se détendre et prendre du temps pour eux avant de commencer à appeler des clients.

Il est également important de ne pas enchaîner plusieurs heures d’affilée d’appels de clients, conseille la conférencière, car c’est un travail difficile et les clients anxieux peuvent parfois se montrer particulièrement irritables et désagréables.