Le capital assuré permet aussi aux prestataires de régimes de pension agréés de combler le manque à gagner à la suite du décès du rentier, dont la rente réversible au conjoint survivant est souvent réduite de moitié. Quel que soit l’objectif au moment de l’entrée en vigueur des contrats, les besoins pour lesquels l’assurance vie constitue la source de financement peuvent changer au fil du temps.

Prenons l’exemple d’un couple dont les membres ont tous deux 50 ans, et qui a souscrit à une assurance vie au dernier décès dans le but de payer les impôts exigibles lors de la disposition réputée de leurs immeubles à revenu. Le capital assuré s’établit à 1 M$.

Or, la vente prématurée des biens lors de leur divorce imminent a fait en sorte que les impôts successoraux envisageables au second décès des époux sont devenus sans objet. Qui plus est, la disposition forcée des éléments d’actif a entraîné une facture fiscale exceptionnelle à la suite de son exécution.

Au cours de la planification financière intégrée aux procédures de partage, les conjoints, maintenant âgés de 70 ans, ont dû évaluer la pertinence du maintien en vigueur de la police d’assurance vie universelle qu’ils avaient souscrite en fonction des immeubles. (Certaines options de maintien et de modification auraient pu s’offrir à eux dans ces circonstances, mais elles ne font pas l’objet de ce texte.)

Avantage fiscal immédiat

On leur souligne alors qu’il est possible de se départir de ladite police en faisant un don de bienfaisance immédiat, et ainsi, de bénéficier d’un avantage fiscal.

Lorsqu’on détient une police d’assurance dont on souhaite se départir, il peut être avantageux d’en faire don. En cas d’annulation, le titulaire d’un contrat viager sans valeurs accumulées n’encaissera généralement aucune valeur et toutes les primes déjà payées seront perdues. Cependant, une police qui a un coût d’assurance nivelé peut comporter une juste valeur marchande (JVM) inhérente réalisable avant le dernier décès. Cette valeur intrinsèque se matérialise au moyen d’un don à un organisme de bienfaisance.

Ainsi, le couple décide de donner la police à la Fondation W, laquelle se désigne bénéficiaire au dernier des deux décès. La fondation touchera plus tard le capital-décès. Le don d’une police d’assurance vie est une pratique établie qui aide l’organisme de bienfaisance à planifier son avenir, sachant qu’il bénéficie d’une source de revenus garantie. L’organisme de bienfaisance délivre un reçu fiscal dont la valeur correspond à la JVM du don. Ce reçu procure un crédit d’impôt aux particuliers.

Bien déterminer la JVM

Pour y arriver, il s’agit d’établir la JVM du contrat avant de mesurer l’impact du don et le bien-fondé de la stratégie. En effet, une assurance vie en vigueur depuis plus de 10 ans doit être évaluée, car sa valeur peut être substantielle. C’est surtout le cas si des changements sont survenus dans l’état de santé des assurés depuis l’émission de la police.

Si la police comporte des valeurs en espèces, il est préférable de les encaisser dès le départ. Cette action pourra donner lieu à un gain imposable si les sommes en question excèdent le coût de base rajusté de la police. En principe, cet aspect ne devrait pas freiner le geste, puisque de toute manière, l’annulation prévue du contrat aurait eu le même effet.

Autrement dit, une fois les valeurs retirées de la police, les données relatives aux assurés et aux caractéristiques du contrat permettront à un actuaire indépendant (ou deux) de déterminer par un calcul complexe la JVM intrinsèque de la police. Une fois ce montant établi, les titulaires pourront faire don de la police en échange du reçu fiscal.

Ce reçu pourra réduire l’impôt à payer sur d’autres sources de revenus tels que le gain en capital et la récupération de l’amortissement entraînés par la vente des immeubles. Les deux membres du couple auront profité de la valeur réelle de leur police destinée à l’annulation, tandis que la Fondation W bénéficiera éventuellement d’un don substantiel.

Financer les primes

Toutefois, pour que la police procure une valeur à l’organisme de bienfaisance et pour attester la JVM, la Fondation W requiert que le provisionnement de la police se maintienne jusqu’à ce que la prestation de décès soit payée.

Le moyen le plus simple de s’acquitter de cette obligation pour les assurés est de poursuivre le paiement des primes annuelles, et pour ce faire, de bénéficier d’un reçu fiscal chaque année.

Dans cet exemple, la prime annuelle s’élève à 8 000 $ pour un capital assuré de 1 M$ au dernier décès. La valeur marchande approximative pour un contrat de ce type, souscrit il y a 20 ans est d’au moins 293 000 $, selon les informations hypothétiques obtenues.

Ce montant pourrait être plus élevé si l’état de santé ou l’assurabilité d’une personne était problématique. Le calcul de la valeur marchande repose sur divers éléments dont l’assurabilité, le taux de la prime, le coût de remplacement de la police et l’espérance de vie, et doit être effectué par un actuaire.

Le don de la police procurerait un crédit d’impôt de 146 412 $ au taux marginal de 49,97 %, étant donné que la situation financière et fiscale des donateurs s’y prête. Cet argent peut servir à financer les primes nettes d’impôt jusqu’à 100 ans.

Soutien d’une rente viagère

Autrement, le don additionnel d’une rente viagère souscrite sur la vie des deux conjoints au dernier décès pourrait servir à payer les primes annuelles futures de 8 000 $ jusqu’au dernier décès.

Dans cet exemple, le capital actuel requis et approximatif pour un homme et une femme de 70 ans à l’achat d’une rente conjointe réversible à 100 % au premier décès correspond sensiblement au montant du crédit d’impôt, soit 150 000 $ (certaines conditions peuvent s’appliquer et varieront selon la compagnie d’assurance).

Une fois constituée, la rente sera donnée à l’organisme de bienfaisance et un reçu fiscal de 150 000 $ pourra aider les assurés à réduire leur revenu imposable immédiatement. Ainsi, le don de la police leur aura permis d’effectuer un don planifié majeur au dernier décès au bénéfice de la Fondation W et d’obtenir en échange un remboursement d’impôt net de plus de 70 000 $ à deux. (Voir le tableau)

On peut aussi entreprendre de trouver un tiers donateur pour payer les primes futures. Le couple serait ainsi libéré de l’obligation de payer les primes. Toutefois, en échange du paiement viager des primes annuelles, le tiers donateur aura la possibilité de désigner l’organisme de bienfaisance de son choix comme bénéficiaire de la police, et non nécessairement la Fondation W. De plus, cette approche peut prendre un certain temps.

Utiliser une fondation publique

Si les assurés n’avaient pas de cause qui leur soit chère ou que le facteur temps et la souplesse dans le choix de l’organisme posaient problème, l’utilisation d’une fondation publique leur donnerait la possibilité de faire le don dès maintenant tout en conservant le contrôle et la possibilité de changer de bénéficiaire en tout temps.

En effet, un grand nombre de fondations publiques sont enregistrées auprès de l’Agence du revenu du Canada (ARC). Elles sont souvent conçues pour servir d’intermédiaire impartial permettant d’acheminer des fonds de donataires reconnus à des organismes de bienfaisance enregistrés canadiens et de simplifier la planification de dons philanthropiques majeurs.

Dans le cas de notre couple, cette option pourrait allouer la création d’un fonds orienté par les donateurs, où leur famille en tant que successeur désigné pourrait suggérer des organismes de bienfaisance que le fonds appuiera. Le fonds peut permettre les dons de revenus ou de capital et avoir une vocation transitoire de courte durée, ou encore être financé par dotation perpétuelle.

Quoi qu’il en soit, le don d’une police en vigueur devenue superflue peut valoir son pesant d’or, tant pour la société que pour les donateurs, le plus souvent à peu de frais et sans problème.

Les taux d’assurance, de rente et d’imposition peuvent varier et ne sont que des exemples.