Un homme d'affaire arrachant un papier peint d'un ciel nuageux pour découvrir un ciel bleu et une plage.
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Dans la plupart de ces documents, on retrouve l’idée qu’un nouvel OAR général pourrait être mis en place pour superviser ces améliorations.

Deux des propositions les plus controversées viennent du Groupe de travail sur la modernisation relative aux marchés financiers (GTMMF), qui relève du ministère des Finances de l’Ontario, et de l’Association canadienne des courtiers de fonds mutuels (ACFM). Chacun envisage la création d’un OAR unique qui chapeauterait tous les cabinets de conseils, y compris les gestionnaires de portefeuille (GP), les courtiers sur le marché dispensé et les courtiers en plans de bourses d’études.

Cependant, l’Association des gestionnaires de portefeuille du Canada (AGPC) pense que ce serait une erreur. Les intérêts des caisses de retraite, des fondations et des clients privés qui ont confié des milliers de milliards de dollars en actifs à des GP sont mieux protégés par le système actuel de surveillance réglementaire des Autorités canadiennes en valeurs mobilières (ACVM) que par un système dans lequel les ACVM délègueraient leur rôle de surveillance à un nouvel OAR.

Nous sommes convaincus que l’intérêt du public est mieux défendu lorsque les GP sont directement soumis aux réglementations des ACVM et, à long terme, par l’entremise d’un organisme coopératif (national) de réglementation des valeurs mobilières. Depuis quelque temps, des efforts sont déployés pour imposer cet organisme de réglementation, connu sous le nom de Régime coopératif en matière de réglementation des marchés des capitaux (Régime coopératif).

Les membres des ACVM ont l’expérience et l’expertise spécifique pour comprendre les services uniques offerts par les GP. Ils se sont avérés être des régulateurs fermes, mais efficaces avec une présence marquée dans toutes les régions du Canada, et ils ont fait preuve de justesse auprès des déclarants, peu importe la taille de la société, leur type de clientèle, ou le type de services offerts par leurs conseillers.

L’AGPC considère que les GP sont très différents des courtiers en placement et des courtiers de fonds mutuels (ci-après «courtiers»). Les GP inscrits ont une relation particulière avec leurs clients : ils ont un pouvoir discrétionnaire concernant les placements qu’ils gèrent pour leurs clients et, surtout, ils sont tenus d’agir dans l’intérêt supérieur de leurs clients, ce qu’on appelle l’obligation fiduciaire.

Cette obligation se retrouve à tous les niveaux de la culture des cabinets et teinte chacune des décisions qui touchent un client, car la responsabilité des décisions prises au nom du client repose sur les épaules du cabinet tout entier. L’obligation fiduciaire est extrêmement importante pour les investisseurs, et l’AGPC pense qu’une transition vers une surveillance par un OAR comporte un risque majeur de baisse du niveau de prudence.

À l’inverse, les structures réglementaires des OAR ont été mises au point pour fonctionner selon le modèle des courtiers en placement, dans lequel la relation client est principalement basée sur des opérations particulières sur des actifs. Les règlements qui régissent les courtiers sont par définition plus contraignants, car ils visent à s’assurer que les transactions individuelles sont réalisées de façon équitable et efficace, tout en maintenant l’intégrité des marchés financiers. Ces règlements ne sont pas adéquats ni adaptés aux divers modèles d’affaires et types de clients des cabinets de GP.

Les discussions au sujet de la réforme réglementaire ne se concentrent que sur les clients individuels et négligent la grande majorité des actifs gérés pour les caisses de retraite, les fondations, les fonds des Premières Nations et les autres clients institutionnels. Les GP sont souvent engagés par des cabinets internationaux pour gérer une catégorie d’actifs spécifique au nom d’investisseurs institutionnels. Au fil du temps, les réglementations des ACVM se sont rapprochées des réglementations internationales, ce qui est indispensable pour assurer la compétitivité du Canada.

Il est également important de noter que de nombreux GP exercent aussi des fonctions de gestionnaires de fonds d’investissement (GFI), car ils dirigent également les activités d’un fonds d’investissement comme un organisme de placement collectif ou fonds d’investissement à capital fixe. Environ 65 % des membres de l’AGPC sont inscrits à la fois comme GP et GFI, et nombre d’entre eux font partie de cabinets internationaux. Étrangement, les propositions de réformes ne mentionnent rien au sujet des GFI. Les GP et les GFI sont indissociables : la répartition de leur réglementation entre un nouvel OAR et les ACVM augmenterait les coûts et le fardeau réglementaire, ce qui n’est pas dans l’intérêt des investisseurs et va à l’encontre de l’objectif global de toutes les propositions.

Nous laissons à d’autres acteurs de l’industrie le soin de déterminer si une fusion des deux OAR actuels est une bonne idée. Selon l’AGPC, tandis que la structure des OAR n’est pas adéquate pour la réglementation des GP, les OAR souffrent généralement d’autres problèmes, comme un nombre décroissant de membres, des coûts en double, des conflits d’intérêts et des problèmes de gouvernance. Le modèle des OAR disparaît progressivement à l’international. Le Canada et les États-Unis sont parmi les derniers pays qui continuent à utiliser les OAR dans ce secteur.

La réforme des OAR est un objectif intéressant, mais il ne faut pas se leurrer et penser qu’un nouveau super-OAR est une panacée. Il ne sera pas habilité à régler les problèmes systémiques rencontrés sur les marchés canadiens, comme le serait un organisme national de réglementation des valeurs mobilières.

Le Canada reste le seul pays développé au monde qui ne possède pas d’organisme national de réglementation, ce qui présente un net désavantage concurrentiel sur les marchés financiers mondiaux. Neuf gouvernements participants ont apposé leur signature à l’initiative pour un organisme national de réglementation et nous sommes plus près que jamais du but, mais il faut que les provinces en fassent leur priorité.

La création d’un organisme national est une excellente première étape vers l’amélioration du système de réglementation, plutôt que l’instauration d’un nouvel OAR très englobant. Une réglementation directe est une réglementation plus forte et qui protège mieux les intérêts du public.

Par Katie Walmsley, présidente de l’AGPC. L’AGPC représente près de 300 sociétés de placement dans tout le Canada, comptabilisant plus de 2 800 G $ d’actifs sous gestion au nom de leurs clients institutionnels et individuels.