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Entre initiés, on appelle ça le décaissement des avoirs à la retraite. Cependant, je ne suis pas certaine que le grand public comprenne bien ce que cela signifie et, surtout, ce que cela implique.

En effet, on a beau avoir épargné tout au long de sa vie active, posséder un bon régime de retraite et avoir bien planifié une santé financière durable, plus la retraite approche et plus les questions se pressent dans la tête des Québécoises et des Québécois.

C’est alors que le mot « décaissement » fait son apparition dans le vocabulaire des épargnants. Et la mise en place d’un plan est plus que souhaitable afin de considérer les meilleures stratégies pour s’assurer d’une optimisation de retrait des actifs accumulés pour la retraite, et ce, en veillant à ce qu’ils durent aussi longtemps que cela sera nécessaire.

Pourquoi est-ce si important d’avoir un plan de décaissement ? Pour avoir la paix d’esprit bien sûr, mais aussi pour optimiser la fiscalité et, surtout, s’assurer de ne pas survivre à ses économies.

En effet, le risque de longévité, soit le risque de survivre à ses épargnes, est un des principaux risques à la retraite. Selon la table de mortalité utilisée par l’Institut québécois de planification financière pour les Normes d’hypothèses de projection et de FP Canada, un homme de 65 ans sur deux vivra jusqu’à 89 ans, et un homme sur quatre, jusqu’à 94 ans. Dans le cas des femmes de 65 ans, une sur deux vivra jusqu’à 91 ans, et une sur quatre, jusqu’à 96 ans!

Sans nécessairement avoir le mot décaissement en tête, les futurs retraités se posent inévitablement les questions suivantes: Qu’est-ce que je retire en premier: mes REER, mes CELI ou mon épargne non enregistrée ? À quel âge devrais-je demander mes rentes publiques ? Et si je vivais jusqu’à 100 ans ? Comment gérer les risques d’inflation? Est-ce que je pourrais garder le même style de vie à la retraite ? Comment optimiser la fiscalité en payant ma juste part d’impôt, mais pas plus ? Pourrais-je léguer un héritage ? Et si je suis malade, comment ne pas devenir un fardeau pour mes proches ?

Ces questionnements, et plusieurs autres, je les entends au quotidien dans ma pratique.

Il n’y a évidemment pas de réponse universelle et une planification personnalisée par un professionnel est souhaitable. Plusieurs scénarios sont possibles pour maximiser les revenus des futurs retraités et diminuer l’impôt à payer, mais il faut toujours tenir compte de la situation financière personnelle et des choix de chacun.

Voici les étapes essentielles pour préparer un plan de décaissement adapté:

  • Définir les objectifs de retraite et le style de vie désiré;
  • Inventorier les sources de revenus fixes: régime de retraite à prestations déterminées, rentes gouvernementales, revenus de location, etc.;
  • Déterminer les sources de revenus provenant d’accumulation de capital: régime de retraite à cotisations déterminées, compte de retraite immobilisé, REER, CELI, placements non enregistrés, société de gestion, etc.

Pistes de réflexion

Le grand défi consistera à déterminer quels actifs il sera plus avantageux de retirer en premier. Cette étape s’avérera évidemment très personnalisée, mais voici quelques pistes de réflexion:

  • Ne pas sous-estimer l’importance des régimes gouvernementaux et l’avantage de reporter le début du paiement de ces rentes. Le report à 70 ans de la rente du Régime de rentes du Québec (RRQ) et de la Pension de la sécurité de la vieillesse (PSV) pourrait représenter jusqu’à 62 000 $ de revenus garantis et indexés à 100 % de l’inflation pour un couple dont chacun des membres a droit aux prestations maximales du RRQ et de la PSV. De plus, l’augmentation de 10 % de la PSV annoncée récemment pour les gens de 75 ans s’applique au montant bonifié. Les besoins financiers supplémentaires nécessaires avant et après le début des prestations pourront être comblés par les sommes accumulées dans les différents outils d’épargne.
  • Étaler ses revenus imposables dans le temps est souvent une stratégie gagnante. En effet, ne pas déclarer de revenus et ne pas avoir d’impôt à payer pendant plusieurs années conduit souvent à une situation désavantageuse. Il est profitable de cibler les taux des premiers paliers d’imposition quand cela est possible.
  • Considérer les stratégies de fractionnement de revenu.
  • Retirer les sommes des régimes immobilisés (compte de retraite immobilisé et REER immobilisés) devrait être privilégié par rapport au retrait des REER afin de conserver une certaine flexibilité.
  • Optimiser la planification des retraits afin d’éviter ou de réduire la récupération de la PSV. Ceci est particulièrement important pour les actionnaires de sociétés de gestion dont les dividendes majorés viennent accentuer cet effet.

Un plan de décaissement évolue au fil des ans, selon la situation financière des particuliers et les règles fiscales en constante évolution. Il faut donc le réévaluer régulièrement pour s’assurer qu’il reste pertinent.

Pour aider les épargnants à se faire une opinion avisée sur le décaissement des avoirs à la retraite et à s’y préparer adéquatement, ÉducÉpargne, en collaboration avec la Sun Life, propose un webinaire gratuit le 25 février 2022, de midi à 13 h 30. Les détails sont à venir sur le site educepargne.ca.

Par Nathalie Bachand, ASA, AICA, Pl. Fin., présidente du conseil d’ÉducÉpargne et cofondatrice de Bachand Lafleur, Groupe Conseil inc.

NDLR. Dans ce numéro, Finance et Investissement ouvre sa page « Perspectives et analyses » à une organisation de l’industrie financière. Nous continuerons d’offrir occasionnellement cette tribune. Les opinions exprimées dans ce texte ne reflètent pas celles de Finance et Investissement, mais bien uniquement celles de ses auteurs.