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Voici un résumé de quelques changements significatifs.

Norme réglementaire générale d’agir au mieux des intérêts du client

La Commission des valeurs mobilières de l’Ontario (CVMO) et la Commission des services financiers et des services aux consommateurs du Nouveau-Brunswick (FCNB) jugeaient pertinent d’instituer une norme réglementaire générale d’agir au mieux des intérêts du client, tel qu’il est proposé dans le Document de consultation 33-404.

Ces régulateurs ne faisaient pas l’unanimité au sein des ACVM. Un groupe de quatre régulateurs provinciaux, dont l’Autorité des marchés financiers (AMF), avait exprimé de profondes réserves quant aux avantages de l’application d’une telle norme. Entre autres, selon l’AMF, cette éventuelle norme aurait été inapplicable pour une société qui ne distribue que des produits exclusifs. De plus, le régulateur de la Colombie-Britannique ne croyait pas à son bien-fondé, jugeant irréalisable de l’imposer. La norme aurait été vague et imprécise, en plus de créer de l’incertitude chez les personnes inscrites.

La CVMO et la FCNB ont visiblement mis de l’eau dans leur vin, mais ne proposent pas l’adoption d’une norme générale pour l’instant.

Ces deux régulateurs ont collaboré avec les ACVM à l’élaboration d’une approche harmonisée qui introduit le devoir d’agir au mieux des intérêts du client dans les réformes portant sur les conflits d’intérêts et la convenance au client. «Cette approche répond aux préoccupations particulières [que les ACVM] avaient à ces égards et garantit la primauté des intérêts du client», lit-on dans le projet de règlement modifiant le Règlement 31-103, publié en juin.

Rappelons que le projet actuel de modification réglementaire obligerait les personnes inscrites à traiter tous les conflits d’intérêts existants et raisonnablement prévisibles, y compris ceux découlant des mécanismes de rémunération et des mesures incitatives, au mieux des intérêts du client, et à donner préséance à l’intérêt du client lors de l’évaluation de la convenance à ce dernier.

Ces deux régulateurs «réévalueront l’approche [s’ils] ne constatent pas de changement comportemental prouvant que les projets de modification donnent les résultats escomptés pour les investisseurs», lit-on dans le projet de règlement.

Plusieurs réformes ciblées sont différées

Les ACVM préfèrent attendre avant d’élaborer et de proposer d’autres réformes touchant quelques-unes des propositions exposées dans le Document de consultation 33-404. Parmi celles-ci, on note les réformes potentielles sur la révision des normes de compétence ; l’examen des titres et désignations, y compris de l’utilisation du terme «conseiller» pour décrire les personnes physiques non inscrites dans la catégorie de conseiller ; l’imposition d’une obligation fiduciaire légale envers les clients qui accordent un mandat discrétionnaire dans les territoires qui n’en prévoient actuellement pas ; la clarification du rôle de la personne désignée responsable et du chef de la conformité.

«Il s’agit de projets à plus long terme distincts, qui s’inspireront des commentaires reçus» dans le Document 33-404, lit-on dans le projet de règlement.

Abandon de l’enquête de marché obligatoire

Les ACVM ne maintiennent pas une proposition de la consultation 33-404 selon laquelle certaines sociétés auraient dû entreprendre une enquête de marché, une comparaison entre les produits qu’ils offrent ainsi qu’un processus d’optimisation de leur liste de produits.

De nombreux membres de l’industrie financière ont fortement critiqué cette proposition. Ils la jugeaient coûteuse, à l’avantage des sociétés offrant des produits exclusifs et à risque d’entraîner des conséquences graves et inattendues. Parmi celles-ci, les sociétés auraient raccourci leurs listes de produits et, de ce fait, réduit les choix de leurs clients, qui pourraient se tourner vers le modèle des produits exclusifs. Ces exigences auraient nui aux émetteurs indépendants de produits.

Par ailleurs, des membres de l’industrie financière estimaient irréalisable la proposition selon laquelle les représentants doivent comprendre parfaitement tous les titres figurant sur la liste de produits de la société et ce qui distingue les produits les uns des autres. Cette proposition aurait également eu pour conséquence que la firme de courtage limite sa liste de produits, au désavantage de sa clientèle.

Les ACVM ont revu leur position et proposent maintenant, pour les représentants, une obligation plus pratique et réalisable selon laquelle ils doivent généralement comprendre les titres qu’ils vendent et leur mise en comparaison, et comprendre de manière approfondie les titres qu’ils négocient ou recommandent aux clients.

Sur le plan des obligations de connaissance du produit par les sociétés, les ACVM ont abandonné la proposition d’obliger les sociétés à réaliser une enquête de marché, une comparaison entre les produits ainsi qu’un processus d’optimisation de leur liste de produits : «Nous ne proposons plus d’obligations distinctes selon que la société vend des produits exclusifs ou des produits mixtes ou non exclusifs.»

Les ACVM proposent plutôt «l’obligation fondée sur des principes selon laquelle toute société doit s’assurer que les titres et services qu’elle offre sont cohérents avec la façon dont elle se présente à ses clients».

Convenance : risque de poursuites judiciaires atténué

Les ACVM ont modifié leur proposition initiale d’obligation d’évaluer la convenance au moins tous les 12 mois. Plusieurs sociétés inscrites estimaient que cette obligation «pourrait être excessivement contraignante, inefficace et coûteuse ou simplement inutile pour les clients modestes et lorsqu’aucun changement n’est survenu dans la situation du client au cours de l’année», relatent les ACVM dans le document de consultation.

Les ACVM ont remplacé cette responsabilité par une nouvelle obligation en matière de connaissance du client qui précise les circonstances dans lesquelles le représentant doit réexaminer et mettre à jour l’information relative au client. C’est le cas notamment lorsqu’il a connaissance d’un changement significatif dans cette information. C’est aussi le cas au moins une fois tous les 12 mois pour les comptes gérés ; dans les 12 mois précédant la réalisation d’une opération pour le client ou la formulation d’une recommandation à celui-ci, si la société est un courtier sur le marché dispensé ; et une fois tous les 36 mois pour les autres comptes.

Selon une nouvelle proposition des ACVM, le représentant devrait évaluer la convenance en fonction de l’ensemble du portefeuille et non uniquement pour chaque opération. De plus, il devrait réévaluer la convenance dans les cas notamment où un nouveau représentant est désigné comme responsable du compte ; s’il survient un changement dans un titre du compte ; s’il survient un changement dans l’information recueillie au sujet du client ou si le conseiller entreprend un examen ou une mise à jour requis de l’information relative à la connaissance du client.

Par ailleurs, les ACVM ont été critiquées par rapport à une proposition du Document de consultation 33-404 : «En ce qui concerne l’obligation de s’assurer que l’achat, la vente, la conservation ou l’échange d’un produit est « le plus susceptible » de satisfaire les besoins et objectifs de placement du client, la plupart des intervenants sont d’avis que cette norme donnera très probablement lieu à des remises en doute après coup, exposant les sociétés à des coûts de conformité inutiles et à des risques potentiels sur les plans juridique et réglementaire.»

Les ACVM sont aujourd’hui d’accord avec les commentaires estimant que l’utilisation de l’expression «le plus susceptible» et la mention des «objectifs de placement du client» peuvent créer chez celui-ci des attentes irréalistes de résultats garantis, d’après le projet de modification du Règlement 31-103 : «Nous proposons plutôt que la personne inscrite établisse « de façon raisonnable » que toute mesure qu’elle prend relativement à un placement respecte les critères prescrits en matière d’évaluation de la convenance. Aux fins de cette évaluation, il conviendra de vérifier non seulement que la mesure prise par la personne inscrite relativement au placement convient au client selon les facteurs prescrits, mais aussi qu’elle donne préséance à l’intérêt du client.»

Plus besoin de se transformer en fiscaliste

Les ACVM n’ont plus l’intention d’exiger que les représentants collectent une foule d’informations de nature fiscale, comme le proposait la première version du Document 33-404. «Mais nous pourrions à l’avenir tenter de rehausser le niveau de compétence des représentants sur les notions fiscales de base», écrivent les ACVM dans la proposition de modification du Règlement 31-103.

Rappelons que, durant la consultation 33-404, plusieurs intervenants soutenaient que la collecte d’informations de nature fiscale, lorsque le représentant n’a pas de compétence en matière fiscale, non seulement ne sert pas les intérêts des clients, mais crée même le risque qu’ils se fient à lui, ce qui pourrait leur causer un préjudice.

Des acteurs de l’industrie financière estimaient que l’obligation de recueillir de l’information de nature fiscale pourrait accroître considérablement les coûts de l’assurance de responsabilité personnelle et, par conséquent, les frais de service payés par les clients. D’autres intervenants soutenaient toutefois que les conseillers devraient mieux comprendre la situation fiscale de leurs clients et donc recevoir davantage de formation en matière fiscale.