Une photo portrait de Patrick Cloutier.
Photo: Louis Charles Dumais

Patrick Cloutier compte poursuivre l’œuvre de son père en s’assurant que le Groupe Cloutier ait une structure et des services adaptés aux besoins de son époque. Il mise notamment sur la technologie pour mieux servir les conseillers.

C’est en août 2019 que Patrick Cloutier a pris les rênes du Groupe Cloutier, la firme fondée il y a 40 ans à Trois-Rivières par son père, Gilles Cloutier. Celui-ci est devenu président du conseil d’administration dans la foulée de ce changement de garde.

Patrick Cloutier dirige une entreprise qui a crû au fil des ans.

Le Groupe Cloutier agit à titre d’agent général auprès d’une vingtaine d’assureurs et sert plus de 1 000 conseillers au Québec, en Ontario et dans les Maritimes. Il exploite cinq centres financiers au Québec.

Le déploiement de différentes filiales, y compris Groupe Cloutier Investissements, un courtier en épargne collective, en 2007, et de Groupe Cloutier Avantages Sociaux, un cabinet en assurance et rentes collectives, en 2008, a permis à l’entreprise d’être active dans les domaines de l’assurance vie, de la prestation du vivant, de l’assurance collective, de l’investissement et de la retraite, et du courtage hypothécaire.

De janvier à la fin août 2019, le Groupe Cloutier a affiché une croissance annualisée de 3,9 % de son revenu total et de 7,5 % de son bénéfice par rapport à la période correspondante de 2018. De 2014 à 2018, son revenu total annuel a crû à un rythme annuel composé de 11,6 %, ses profits annuels, de 12,67 %, son revenu annuel en assurance, de 7,3 %, et son revenu annuel en épargne collective, de 16 %.

Transition en douceur

Le transfert d’une entreprise familiale vers une deuxième génération représente un défi important. Au Groupe Cloutier, la démarche a minutieusement été préparée, et reposait sur la création d’un «conseil de famille» et le soutien d’un conseiller externe. La transition s’est déroulée naturellement et avec beaucoup de transparence, témoigne Patrick Cloutier.

«L’élément clé est que Gilles n’a rien tenu pour acquis et n’a rien forcé. Il nous a toujours laissé le libre choix. On l’a vu démarrer l’entreprise de zéro et à la maison, il nous a toujours parlé de ses affaires : de ses succès, mais aussi de ce qui était plus difficile», dit-il.

Patrick Cloutier et ses soeurs Claudine et Karine ont appris à connaître l’entreprise en y travaillant chaque été dès leur adolescence. Une pratique qui leur a permis de se familiariser avec l’industrie, les employés et les conseillers, et de prendre chacun sa place progressivement.

«Avoir travaillé ensemble, avec notre père, ce fut toute une expérience de vie», lance Patrick Cloutier. Il ajoute : «Gilles a rapidement été clair : s’il y avait un intérêt à assurer la relève, les dispositions seraient prises en conséquence, et tous les trois, ça nous a intéressés».

En 2006 s’opère l’association de Gilles Cloutier avec ses trois enfants, ainsi qu’avec Michel Kirouac, qui reste vice-président et directeur général. Claudine Cloutier est vice-présidente, prestations du vivant, alors que Karine Cloutier est vice-présidente, marketing et développement corporatif.

«Il n’y a pas eu de grandes discussions à savoir qui ferait quoi. Nous avons chacun nos forces et nos intérêts, et on se complète bien», précise Patrick Cloutier, président et chef de la direction.

Pas de statu quo

«Même s’il se plaît à dire en boutade qu’il a hérité du poste de président simplement parce qu’il est le fils aîné de Gilles, Patrick est vraiment dans la bonne chaise», affirme François Bruneau, vice-président, administration, au Groupe Cloutier, qui travaille avec Patrick Cloutier depuis 14 ans.

Bien qu’il ait repris les rênes d’une entreprise qui était en excellente santé financière, «il ne s’est pas contenté du statu quo», dit François Bruneau.

«Dès son arrivée à la présidence, on a senti qu’il avait une vision d’avenir pour le Groupe Cloutier, et de ce que devrait être un agent général en 2025 et en 2030. Il a parfaitement compris que le back-office allait toujours être important, mais que les conseillers s’attendent aujourd’hui à davantage», affirme-t-il.

L’arrivée de Patrick Cloutier à la présidence s’est accompagnée d’une réorganisation structurelle qui a mené certains employés à assumer de plus grandes responsabilités. C’est le cas de François Bruneau, qui s’est fait confier la gestion de tous les aspects administratifs et organisationnels du Groupe. Il en pilotait jusqu’alors le secteur investissement.

Patrick Cloutier est par ailleurs à l’origine de la mise en place d’un service d’experts-conseils «qui touche une foule de secteurs au coeur des préoccupations des conseillers : fiscalité, planification successorale et meilleures pratiques d’affaires. Il a également réussi à convaincre quelques personnes qui travaillaient chez des assureurs de faire le saut chez nous. On en voit aujourd’hui les bénéfices», illustre François Bruneau.

Il estime que Patrick Cloutier est très exigeant envers lui-même et que «cette ardeur au travail suffit à motiver ses collègues à donner le maximum». Mais il le voit également comme «quelqu’un de très humain qui prend soin de ses collègues et qui veut s’assurer que tout le monde est bien chez Groupe Cloutier».

Un trait de caractère qui a particulièrement été observé «dans la façon dont l’entreprise a traité ses employés depuis le début de la pandémie», dit François Bruneau. Selon lui, cela «contribue probablement à perpétuer le sentiment d’appartenance qui existe depuis très longtemps».

Stéphane Rochon, président et chef de la direction d’Humania Assurance, connaît Patrick Cloutier depuis longtemps. Il abonde dans le même sens : «C’est un leader inspirant et ses employés le sentent».

«Patrick est un homme très transparent, un homme de proximité. On connaît la famille Cloutier, c’est ainsi qu’ils sont», dit Stéphane Rochon.

«Ce sont des valeurs que l’on observe dans son entreprise, mais ce sont des traits de sa personnalité. Avec lui, what you see is what you get», poursuit-il.

Défis de la pandémie

Si Patrick Cloutier confirme que les «choses allaient rapidement» depuis son arrivée à la présidence, il convient que tout s’est accéléré avec la crise sanitaire. La pandémie a bouleversé ses plans, notamment en précipitant l’utilisation d’outils technologiques.

Lorsque les premières mesures de confinement ont été imposées au Québec le 16 mars dernier, la direction s’est consacrée à assurer la sécurité de ses employés et clients, tout en veillant au maintien des activités.

En 48 heures, les quelque 150 employés de la firme ont été décentralisés et prêts à travailler, la grande majorité depuis leur résidence. «Ce fut un tour de force, mais tout a bien été exécuté», souligne Patrick Cloutier.

Dans la foulée, les façons de faire ont été adaptées selon la réalité propre à chacune des différentes lignes d’affaires. Par exemple, des logiciels ont été acquis et déployés en collaboration avec les régulateurs, afin de convertir des activités en épargne collective en 100 % sans papier, illustre-t-il.

Une équipe interne a été mise en place afin d’offrir un soutien aux conseillers en matière de vente à distance, afin qu’ils puissent effectuer leurs transactions. Cette équipe, baptisée CAVAD 20 (Centre d’aide pour les ventes à distance 2020), a aussi mis au point des outils, dont une trousse réunissant les procédures transactionnelles et des capsules web.

En matière d’assurance, l’information utile aux conseillers a été centralisée dans des tableaux interactifs par l’équipe d’assurance individuelle et par celle d’assurance collective. Cette information est mise à jour à mesure de son évolution, par exemple en ce qui concerne l’assouplissement des exigences en matière de tarification et de sélection des risques.

Pour les conseillers qui sont moins familiarisés avec les propositions électroniques, la souscription et l’émission de contrat peuvent être prises en charge à l’interne une fois l’analyse de besoins effectuée par le conseiller.

Rapidement, tout a fonctionné comme «si nous étions toujours dans nos bureaux. L’objectif, c’était de garder le contact avec tout le monde et nous assurer que tout allait bien, mais des conseillers trouvent qu’en fait, le service s’est amélioré dans certains cas», indique Patrick Cloutier en riant.

Le sondage mené dans le cadre du Baromètre de l’assurance de 2020 le confirme d’ailleurs : les conseillers qui font principalement affaires avec le Groupe Cloutier sont généralement plus satisfaits que la moyenne des représentants sondés pour le soutien qu’ils ont reçu en lien avec les effets de la crise de la COVID-19 sur leur pratique. De plus, ces conseillers sont aussi plus enclins que la moyenne à recommander leur firme à un autre conseiller.

De nouveaux besoins

Bien qu’il anticipe un ralentissement de ses ventes, Patrick Cloutier hésite à se prononcer quant à l’impact de la pandémie sur ses résultats financiers au cours des prochains mois.

«Nous réalisons des ventes tous les jours et le chiffre d’affaires des conseillers n’est pas si loin de ce qu’il était à la même période l’année dernière.»

Les conseillers ont su s’adapter à la situation, d’après Patrick Cloutier. Prospecter et contacter de nouveaux clients étant plus difficile, ils concentrent leurs efforts auprès de leurs clients actuels.

Il ajoute que la crise suscite aussi de nouveaux besoins. À cet égard, une entente de partenariat entre la division Groupe Cloutier Avantages Sociaux et Medisys, soutenue par Telus Santé, a été annoncée le 30 mars relativement à un service de télémédecine destiné aux 790 membres, gestionnaires et propriétaires de résidences du Regroupement québécois des résidences pour aînés.

L’entente permet aux aînés et aux employés de ces résidences de consulter un professionnel de la santé à l’aide d’une application installée sur un téléphone, une tablette ou un ordinateur, par messagerie texte ou vidéo sécurisées.

«Sans dire qu’on s’est réinventé, certaines pratiques d’affaires adoptées au cours de la présente transition devraient perdurer», dit Patrick Cloutier. Bien que les rencontres en personne devraient continuer de jouer un rôle important dans l’avenir, on ne peut ignorer les avantages des rencontres virtuelles, cite-t-il en exemple.

«Nos partenaires, que ce soit des assureurs ou des manufacturiers de fonds, ont facilité notre transition, par exemple en rendant accessibles différents formulaires ou fonctionnalités électroniques. Mais depuis le début de la crise, tous les employés communiquent aussi énormément. Leur implication, leurs idées sont à l’origine de plusieurs des actions que nous avons mises en oeuvre pour nous adapter à cette nouvelle réalité virtuelle», illustre Patrick Cloutier.

La pandémie a accéléré l’adoption de la technologie de la part des consommateurs, mais aussi des conseillers, selon lui. Cela se voit en matière de souscriptions électroniques, mais aussi de télétravail. Cette réalité pourrait lui permettre d’aider et de soutenir encore mieux les conseillers dans leur carrière.