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Cette pratique, répandue notamment chez certains groupes financiers intégrés, est qualifiée par l’association des régulateurs provinciaux de «communication trompeuse».

Dans l’Avis 81-330, publié à la fin du mois de juin, les ACVM proposent d’ajouter l’article suivant au Règlement 31-103 : «Les personnes inscrites ne peuvent présenter leurs services d’une manière dont on pourrait raisonnablement s’attendre à ce qu’elle induise une personne en erreur» sur des éléments tels que leur compétence, leur expérience ou leur qualification.

Les ACVM vont plus loin et s’attaquent aussi aux fameux «clubs du président». Ainsi, les personnes physiques ne pourront «utiliser un titre, une désignation, une récompense ou une reconnaissance qui se fonde partiellement ou entièrement sur leur volume de ventes ou leur chiffre d’affaires généré». De plus, les personnes physiques inscrites ne pourraient utiliser tout titre de direction auquel leur société parrainante ne les a pas nommées en vertu du droit des sociétés applicable.

Rappelons que l’Organisme canadien de réglementation du commerce des valeurs mobilières (OCRCVM) a déjà tiré l’oreille aux firmes de valeurs mobilières au sujet de l’utilisation de ces titres. L’OCRCVM jugeait que ces titres, fondés sur les volumes de ventes, pouvaient laisser croire au client que son conseiller était un cadre supérieur de la firme de courtage, alors qu’en fait, il n’a obtenu le titre de vice-président que pour des raisons honorifiques et pour souligner le volume de ventes de son bloc d’affaires.

On le sait déjà, il y a une importante asymétrie d’information dans le secteur financier entre le client et son institution financière. Les clients ont un niveau de littératie financière variable et, même s’ils comprennent le fonctionnement du REER ou de la Bourse, ils n’ont aucun moyen de savoir comment leur institution rémunère le conseiller avec qui ils font affaire. Si les récentes réformes ont permis d’augmenter la transparence en matière de frais, la question des rémunérations indirectes continue de poser problème.

Par exemple, comment le client peut-il savoir que le titre de vice-président ou de premier vice-président que porte son conseiller lui a été accordé parce qu’il a atteint un certain niveau d’actif sous gestion ? Il est déjà assez difficile pour un néophyte de comprendre la différence entre tous les titres (représentant de courtier en épargne collective, représentant de courtier en placement, représentant en assurance de personnes, etc.) et les abréviations que les professionnels utilisent dans le secteur (Pl. Fin., A.V.A., CIM, etc.) afin de définir leurs compétences.

On ne peut pas blâmer l’investisseur d’y perdre son latin.

Il était donc plus que temps que quelqu’un s’intéresse à la question des faux vice-présidents. Espérons que cette consultation débouchera sur des mesures réelles qui permettront aux clients d’y voir plus clair. Ce genre de pratique n’a plus sa place dans une industrie qui doit, plus que jamais, faire preuve de transparence et agir d’abord et avant tout au mieux des intérêts du client. L’industrie financière elle-même a tout à gagner à montrer patte blanche.

En effet, une telle pratique n’est pas inoffensive, car elle contribue à entretenir la méfiance des consommateurs. Placez-vous du côté des clients pendant quelques secondes. Comment blâmer ceux qui préfèrent opter pour un robot-conseiller utilisant la gestion passive, à frais fixes, que de faire affaire avec un conseiller en chair et en os lui garantissant une valeur ajoutée, mais qui porte un titre qu’on lui a accordé non pas en raison de ses compétences, mais plutôt grâce au volume de ses ventes ou la taille de son portefeuille ? Plusieurs raisons peuvent motiver ce choix, mais la méfiance liée au manque de transparence est possiblement un motif fréquent.

Établir un vrai lien de confiance avec le grand public passe par la transparence. Si l’on veut que les clients fassent confiance à l’industrie, cette dernière doit mettre au rancart certaines pratiques discutables. Les faux titres de vice-président doivent disparaître, oui, mais pourquoi ne pas aussi abolir les concours de vente, la rémunération supérieure liée à la vente de produits maison ainsi que les pourcentages minimaux à placer dans les fonds maison en échange d’une économie de frais sur les comptes autogérés ?

Les ACVM viennent de le démontrer, l’industrie, à défaut de se prendre elle-même en main, risque de voir le régulateur s’en charger de la manière qui lui conviendra bien. Les conseillers sont des professionnels qui cherchent à aider leurs clients à atteindre leurs objectifs financiers. Ils n’ont pas besoin d’un titre de vice-président ou d’un voyage toutes dépenses payées pour être motivés à le faire.

L’équipe de Finance et Investissement