Un dessin de main qui dit au revoir.
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Est-ce qu’une institution financière a l’obligation de donner des motifs lorsqu’elle met fin à une relation avec un client ?

Non, selon l’honorable Martin Bergeron, juge à la Cour du Québec, puisque « La doctrine et la jurisprudence canadiennes ont à maintes reprises confirmé le droit d’une institution financière de mettre fin unilatéralement à une relation avec un client sans être tenue de lui fournir de motifs. Ce droit de l’institution financière est assorti de l’obligation d’accorder un délai raisonnable au client afin de lui permettre d’entreprendre des démarches auprès d’une autre institution financière pour remplacer le crédit qui lui a été retiré. […] Dans un arrêt récent, la Cour d’appel confirme le droit d’une institution financière de rompre unilatéralement toute relation contractuelle avec un client, à la condition de lui envoyer un avis dans un délai raisonnable afin de permettre la mise en place d’arrangements alternatifs nécessaires pour remplacer l’entente à laquelle il est mis fin et ainsi éviter que des dommages ne soient causés au client. Ce que constitue un délai raisonnable est une question de faits déterminée en fonction des circonstances particulières de chaque dossier » (paragraphes 19 et 21 : Ben-Menashe c. Amex Bank of Canada, 2021 QCCQ 3586).

La Cour reconnaît une faute en l’instance, mais ne condamne pas l’institution financière puisqu’aucun dommage moral n’a été subi par le demandeur, Ari Ben-Menashe, en raison de la décision qu’a prise l’institution financière. La Cour admet qu’Ari Ben-Menashe a certes été gêné ou embarrassé lorsque, à l’hôtel Savoy de Londres, il s’est retrouvé sans carte de crédit dans les heures qui ont suivi la décision de l’institution financière de mettre fin à son entente avec lui. Elle conclut toutefois que cette gêne n’est pas un dommage moral, mais qu’il s’agit plutôt d’une contrariété mineure du quotidien (paragraphe 27).

Pire encore – pour le client –, le juge Bergeron considère que le demandeur est «un homme en croisade qui s’adresse aux tribunaux pour faire changer les règles du jeu, pour son bénéfice et celui de l’ensemble des Canadiens»(paragraphe 45) et le condamne à rembourser près de 85 000 $ à l’institution financière pour l’avoir abusivement poursuivie ! La Cour déclare ainsi la conduite du demandeur déraisonnable et abusive.

Julie-Martine Loranger, associée chez McCarthy Tétrault S.E.N.C.R.L., s.r.l. avec la collaboration de Me Alain N. Tardif.

Le présent article ne constitue pas un avis juridique.