Trois traits qui se rejoignent pour forment une flèche.
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La tendance à la concentration des affaires des conseillers en sécurité financière dans certains types de produits s’accentue, selon le sondage en ligne du Baromètre de l’assurance 2022.

Par rapport à 2021, une plus forte proportion de conseillers ont tendance à concentrer leurs affaires dans la distribution des fonds distincts et l’assurance vie entière. Ces deux produits sont également davantage représentés dans le revenu moyen des conseillers sondés en 2022 par rapport à 2021.

Ainsi, la part des fonds distincts dans le revenu brut moyen de l’ensemble des conseillers sondés est passée de 23,6 % en 2021 à 28,6 % en 2022, et celle de la vie entière de 16,1 % à 20,1 %. Cette croissance s’est faite aux dépens de la vie temporaire, qui ne représente plus que 27,03 %, comparativement à 34,6 % l’an dernier. Ces données agrégées ne tiennent pas compte du fait que tous les conseillers ne distribuent pas tous les genres de produits. Par exemple, en 2022, 86 % de notre échantillon offrait de l’assurance vie temporaire, 76 %, de l’assurance vie entière, 66 %, des fonds distincts et 64 %, de l’assurance invalidité.

En 2022, parmi les conseillers qui proposent réellement des fonds distincts, ce type de produit représente en moyenne 43,8 % de leur revenu brut. Cette part a nettement augmenté depuis 2021, où elle comptait pour 37,1 %. Elle est passée de 25,3 % à 26,3 % pour la vie entière de 2021 à 2022. Dans la vie temporaire, elle a diminué de 37,5 % à 30,8 %.

De plus, nous avons analysé, parmi le groupe de conseillers qui offrent réellement un type de contrat en particulier, quelle proportion récoltent 80 % ou plus de leur revenu brut d’assurance grâce uniquement à ce genre de produit. Résultat, pour les fonds distincts, cette proportion est passée de 13,3 % à 20,7 % de 2021 à 2022. La progression a été moins importante pour la vie entière (de 5,3 % à 6,8 %). Dans la vie temporaire, elle a pratiquement diminué de moitié, passant de 12,8 % à 6,8 %. À noter que, excepté pour les assurances collectives et pour les assurances maladies graves où 12,5 % et 1 % respectivement des conseillers qui en distribuent en retirent 80 % de leurs affaires, aucun conseiller sondé ne concentrait ses activités dans l’assurance invalidité, la vie universelle ou les rentes.

Cette tendance à la spécialisation des conseillers dans les fonds distincts s’explique principalement par les difficultés enregistrées par les marchés boursiers depuis le début de l’année, selon David Parent, vice-président, ventes et développement des affaires du Groupe Cloutier.

« Il y a un réflexe naturel de la part des clients de rechercher des garanties dans un contexte volatil et inflationniste qui crée de l’insécurité. Les fonds distincts donnent une exposition au marché avec différents types de protection de capital. »

Le consultant Eli Pichelli estime que cet appétit pour les fonds distincts peut s’expliquer aussi par le fait qu’ils sont « plus faciles à négocier que les fonds communs de placements [FCP] du point de vue de la réglementation ». Il indique que le changement prochain du mode de rémunération, qui a d’abord touché les FCP, a rendu les fonds distincts plus attrayants. Rappelons que les frais d’acquisition reportés ont été abolis pour les FCP le 1er juin 2022 et qu’ils le seront pour les fonds distincts le 1er juin 2023.

Le vieillissement de la population favorise les fonds distincts, ajoute Martin Savard, vice-président exécutif de MICA Cabinets de services financiers, car les garanties de ces fonds sont « très intéressantes » pour les successions. « L’argent de la succession va directement au bénéficiaire désigné. C’est plus rapide qu’avec les fonds communs, où les délais sont plus longs. La transaction se fait en quelques jours, comparativement à quelques mois. »

Selon le Baromètre de l’assurance 2022, l’âge moyen des conseillers qui concentrent le plus leur revenu dans un type de produit est de 57 ans, un âge supérieur à l’âge moyen de l’ensemble de l’échantillon.

Les conseillers qui concentrent leurs affaires sont donc en moyenne un peu plus vieux que ceux qui se diversifient, selon les résultats du sondage. Les conseillers en début de carrière doivent-ils se diversifier ?

David Parent se demande ce qui, de l’âge du conseiller ou de celui du client, est le plus déterminant. Une chose est sûre, selon lui, le vieillissement de la population contribue à alimenter la popularité des fonds distincts. « Les clients plus âgés recherchent des garanties. Ils veulent protéger le patrimoine accumulé. Les fonds distincts présentent un terreau fertile pour créer un appétit supplémentaire pour ces produits. »

L’assurance vie entière bénéficie de la vague importante de transferts d’entreprises, dans la mesure où elle permet de faciliter la transmission du patrimoine d’une génération d’entrepreneurs à l’autre, indique Martin Savard. « La vie entière est un segment en croissance et elle continuera d’être en hausse chez les conseillers, de plus en plus nombreux, qui s’intéressent à ce marché », signale-t-il.

La croissance de la vie entière devrait tôt ou tard ralentir, ajoute David Parent, « car c’est un produit qui tend à bien performer quand les taux d’intérêt sont bas ». Des taux d’intérêt à la hausse, comme actuellement, pourraient favoriser un retour de la vie universelle, un produit en perte de vitesse depuis quelques années, croit-il.

Le recul de la vie temporaire est un phénomène conjoncturel qui ne durera pas, considère Martin Savard. « En raison du marché inflationniste, certaines familles doivent reporter l’achat d’assurance vie temporaire pour privilégier d’autres dépenses, comme l’hypothèque, l’essence et l’épicerie. La demande pour ce produit devrait rebondir lorsque l’inflation sera stabilisée », analyse-t-il.

Les besoins financiers des clients sont de plus en plus complexes. Ils ne peuvent donc pas être couverts par un seul produit, considère Eli Pichelli. Il croit que la spécialisation sera une tendance forte au cours des prochaines années. Il considère en effet que les conseillers auront avantage à se spécialiser pour offrir une expertise plus marquée aux clients. « Ils devront également chercher à s’affilier avec des conseillers et des compagnies spécialisés dans d’autres domaines pour diversifier leur expertise. »

Martin Savard prédit que l’offre de produits garantis devrait diminuer à l’avenir en raison des normes assumées par les assureurs en matière de liquidités. « On s’attend à ce que des assureurs songent à éliminer certains produits. Ils pourraient alors augmenter les primes ou démarrer de nouveaux produits. Ils pourraient alors augmenter les primes ou démarrer de nouveaux produits avec des primes non garanties. »

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