«La banque prend plus de place», dit un représentant de BMO Nesbitt Burns.En moyenne, les firmes obtiennent encore une note enviable de 9,5 sur 10 en ce qui concerne la liberté de choisir les meilleurs produits pour les clients. Cependant, bien qu’ils ne soient pas légion, ils sont plus nombreux cette année à souligner une certaine baisse de leur liberté d’action.

«Avant, je leur donnais 10 sur 10 pour [l’indépendance], mais depuis un an, la firme s’immisce. On nous empêche d’acheter des produits intéressants pour les clients. Il commence à y avoir des failles dans la structure, et la liberté n’est plus entière», dit un conseiller sondé de la Financière Banque Nationale (FBN).

Voilà qui surprend Denis Gauthier, premier vice-président et directeur national de la FBN : «Il n’y a aucune restriction de la part de la firme. Au contraire, nous considérons que tous les produits doivent avoir leur place».

Chez BMO Nesbitt Burns, où un conseiller dit que depuis deux ans, on exerce plus de pression pour qu’il vende des produits maison, on avance une explication. «Il y a plus de promotion de la part de Nesbitt pour les fonds négociés en Bourse, qui sont un de leurs produits vedettes. Sans qu’il y ait de pression pour en offrir, c’est plus visible qu’avant», dit Sylvain Brisebois, premier vice-président et directeur régional de BMO Nesbitt Burns.

Il n’empêche qu’en modifiant sa grille de rémunération au profit des services élargis de planification financière, BMO, à l’instar de bien d’autres firmes, encourage aussi les recommandations de clients vers la banque.

Participer à la croissance

Le même phénomène semble se produire chez ScotiaMcLeod, où un conseiller note qu’auparavant, les représentants étaient engagés pour leurs talents d’entrepreneur. Ce ne serait plus le cas maintenant. «La banque veut s’approprier la clientèle, que le client fasse partie de la grande famille de Scotia et qu’on lui propose des cartes de crédit, etc. On ne respecte pas le travail du courtier. On engage des conseillers à salaire qui vont gérer les petits comptes», dit-il. Au moment de mettre sous presse, il n’a pas été possible d’obtenir les commentaires d’un dirigeant de ScotiaMcLeod.

Stéphan Bourbonnais, premier vice-président et directeur régional pour l’Est-du-Canada chez Gestion de patrimoine TD, ne cache pas que la firme de courtage doit participer à l’effort de croissance interne de la banque. En échange, elle aussi profite des recommandations de clients provenant des succursales bancaires.

«Les recommandations font partie intégrante de notre stratégie de croissance. La stratégie de TD en matière de gestion de patrimoine est de croître à l’interne. La banque de détail a environ de 22 à 23 % de parts de marché au Canada et la gestion de patrimoine ne représente que 8,5 % des parts de marché. La stratégie est donc de recommander des clients commerciaux ou de détail à la gestion de patrimoine pour doubler le chiffre d’affaires de ce service.»

Le coût de la liberté

Pour Richard Legault, président d’Industrielle Alliance Valeurs mobilières (IAVM), l’indépendance dépend du modèle d’affaires choisi par le conseiller. «C’est là-dessus qu’IAVM se distingue. Nous avons un modèle indépendant, où les conseillers peuvent choisir librement les produits qu’ils offrent, mais s’ils se servent sur des ressources de la firme, ils doivent payer», dit-il.

En revanche, les conseillers d’IAVM reçoivent une rémunération brute variant de 74 à 78 % en moyenne, de leurs ventes brutes, selon leur catégorie. Dans le reste de l’industrie, cette part varie plutôt de 39 à 48 % en moyenne.

La liberté a donc un prix ! Et ce n’est pas pour tout le monde, ajoute Richard Legault. «Cela réussit aux conseillers de type entrepreneur et qui aiment opérer leur pratique comme une business. Ils veulent un plus grand contrôle de leurs dépenses et des produits qu’ils offrent. Ils ont aussi une certaine autonomie pour faire leur marketing. Certains veulent dépenser un peu plus, d’autres moins. On n’est plus logé ni nourri, mais on bénéficie d’une plus grande autonomie.»