«Étant donné la baisse du prix du pétrole, le niveau de compétitivité des entreprises en Amérique du Nord s’est accru. Ces facteurs devraient contribuer à la renaissance manufacturière des États-Unis», prévoit François Bourdon, chef des solutions de placements de Fiera Capital.

Le cas de la Chine témoigne bien du pessimisme qui règne à l’égard des pays émergents.

«La décélération est marquée et rapide en Chine. La situation n’est pas très rose, mais le gouvernement a les moyens d’intervenir grâce à une politique monétaire plus expansionniste», affirme André Marsan, fondateur de Sigma Alpha, qui est maintenant une division à part entière de Gestion Cristallin.

Plusieurs pays développés, comme le Japon dans les années 1970, ont déjà vécu cela, ajoute-t-il.

«Les pays contigus à la Chine, comme le Japon et la Corée du Sud, pratiquent la dévaluation concurrentielle (competitive devaluation).» Ces trois pays se font concurrence en tentant d’affaiblir leur monnaie afin de stimuler leurs exportations. Cette guerre des devises devrait se poursuivre en 2015, croit André Marsan.

Pour sa part, André R. Chabot, président et chef des placements de Gestion de portefeuille Triasima, apprécie peu la Chine actuellement.

«Le secteur immobilier éprouve des problèmes et la bulle semble se dégonfler là-bas. L’état de santé du système financier est peu clair ; il y a un manque de transparence et on se pose plusieurs questions», remarque-t-il.

Le gestionnaire n’apprécie guère plus les pays d’Amérique latine, puisqu’ils sont aux prises avec des problèmes de productivité, de croissance économique et de contrôle des coûts, auxquels s’ajoutent des taux d’intérêt généralement plus élevés qu’il y a quatre ou cinq ans.

«Si ces facteurs macroéconomiques s’améliorent, on pourrait retourner dans cette partie du monde en seconde moitié de 2015», note-t-il.

Quelques perles rares

Chez Triasima, l’intérêt pour les titres des pays émergents est avant tout le résultat d’une analyse fondamentale, quantitative et d’indicateurs plus techniques (analyse de tendance).

«Même si on est présentement sous-pondérés dans le secteur des actions mondiales, cela ne veut pas dire que certains titres de pays émergents ne se démarquent pas», dit André R. Chabot.

Parmi eux, il souligne YY inc. (Nasdaq, YY), un réseau social chinois qui offre un service de jeu en ligne. Et c’est connu, les Chinois aiment le jeu.

Triasima s’intéresse également au titre du géant automobile indien Tata Motors (NY, TTM), dont la croissance est notamment liée à l’émergence d’une classe moyenne en Inde. L’entreprise compte sur un réseau de vente établi dans une vingtaine de pays, principalement d’Asie, d’Europe et d’Afrique.

Enfin, le titre de Telekomunikasi Indonesia (NY, TLK), l’acteur majeur des télécommunications en Indonésie, affiche aussi une belle croissance, note André R. Chabot.

Selon François Bourdon, le seul pays qui pourrait se distinguer de la masse serait le Mexique, puisqu’il bénéficierait par la bande de la bonne santé économique des États-Unis.

De 2003 à 2013, les deux devises qui se sont le plus dépréciées par rapport à un panier de devises diversifiées (Europe, Japon, Brésil, Canada, Australie, etc.) sont le peso mexicain et le dollar américain, note-t-il. Ces deux monnaies ont subi une dévaluation relative de 15 %, ce qui a engendré un transfert des activités de fabrication automobile vers les États-Unis et le Mexique.

«Il y a présentement une augmentation de la production automobile au Mexique. C’est un exemple de secteur qui créera des retombées bénéfiques pour l’économie du pays», explique François Bourdon.

Pour profiter de cette dynamique, Fiera Capital a une position longue sur le peso mexicain et détient des obligations gouvernementales de cinq ans.

«Avec une inflation relativement stable, un coupon autour de 5 % et une devise qui s’apprécie, cela devient intéressant», croit le chef des solutions de placements de Fiera.

«Même si un ou deux pays émergents performent bien l’année prochaine, on ne croit pas qu’il faille consacrer beaucoup de temps à ce marché, poursuit-il.

«On aime mieux regarder du côté de l’Europe, puisque les prévisions sont déjà très mauvaises. Si un renversement devait survenir, il risque beaucoup plus de se produire en Europe», affirme François Bourdon.