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Ce document est riche d’informations sur les récents succès et insuccès des assureurs de personnes au Québec.

Notre tableau donne un aperçu de l’évolution des parts de marché entre 2014 et 2015. Il regroupe les primes directes souscrites en assurance vie, en assurance accidents et maladie ainsi qu’en rentes, et ce, dans les secteurs individuel et collectif.

Nous avons demandé à deux experts d’interpréter ces données. Sylvain Gagné a été vice-président régional chez Empire Vie et directeur général associé chez l’agent général BBA Groupe Financier. Robert Landry a été vice-président exécutif chez AXA Canada. Tous deux sont consultants.

L’année Manuvie

Avec une progression de 14,6 % des parts de marché, tous produits confondus, en 2015, Manuvie affiche la meilleure performance des grands acteurs de l’industrie. Le géant canadien a-t-il absorbé l’acquisition des activités canadiennes de Standard Life ?

«L’année 2015 a été celle de Manuvie. En cours d’année, la compagnie a fait une percée significative en assurance collective, qui était une des forces de Standard Life. De plus, ses parts de marché en assurance individuelle ont bondi de 60 points de base. C’est beaucoup !» observe Robert Landry.

Toutefois, on n’aurait encore rien vu. «Manuvie commence à se mettre en mouvement et n’a pas atteint sa vitesse de croisière», affirme Robert Landry. Ainsi, même si Manuvie n’a pas repris l’ensemble des parts de marché de Standard Life au Québec, qui s’établissaient à 2,43 % en 2014, l’assureur a fait un pas important en ce sens, en ajoutant 1,22 % cette année.

Aux yeux de l’ancien dirigeant d’AXA Canada, la qualité de la direction est l’une des grandes forces de cet assureur. «Le calibre et la profondeur de son équipe de direction sont réellement impressionnants», dit-il.

Au coude-à-coude

Au cours des dernières années, iA Groupe financier (appelée anciennement Industrielle Alliance) et ses filiales ont gagné des parts de marché au Québec et se rapprochent du sommet. L’assureur dirigé par Yvon Charest se prépare-t-il à dépasser DSF, dont les parts – qui sont passées de 18,45 % à 17,70 % – déclinent depuis 2011 ?

«La croissance d’iA s’explique en bonne partie par de nombreuses acquisitions de réseaux de distribution. Par contre, DSF investit beaucoup d’argent et de ressources en informatique», indique Sylvain Gagné.

«Desjardins veut accompagner les consommateurs qui sont sur Internet et est en train de rassembler ses forces. Desjardins ne s’affaiblit pas. Peu à peu, elle se renforce. Les prochaines années pourraient nous surprendre», ajoute-t-il.

SSQ et La Capitale progressent

Figurant au cinquième rang des plus importants assureurs de personnes au Québec, SSQ Groupe financier a enregistré une forte hausse de 6 % de ses parts de marché par rapport à 2014.

L’explication, comme pour Manuvie, réside dans l’intégration réussie d’une importante acquisition : celle des activités d’assurance vie de AXA Canada en 2012, pour 300 M$.

«Comme pour toute transaction majeure, l’intégration d’AXA Canada a exigé du temps. On commence à en voir les fruits. De plus, l’équipe de direction de SSQ est l’une des meilleures de l’industrie. Ses dirigeants avancent de façon structurée. Ils étendent méthodiquement leurs réseaux de distribution au Québec et au Canada», explique Sylvain Gagné.

Septième acteur au chapitre des parts de marché, La Capitale affiche une hausse de 7,3 % par rapport à 2014. «C’est dans les rentes individuelles que La Capitale a fait une percée en 2015. Cependant, depuis cinq ou six ans, La Capitale affiche une des plus fortes croissances de l’industrie. Le leadership et le développement de produits font la différence. Steven Ross [président et chef de l’exploitation] est un développeur, et ça paraît», dit Robert Landry.

Dans les petits pots

Les acteurs de niche, Humania, UV Mutuelle et L’Excellence, maintiennent leurs positions.

«La stabilité des parts de marché est parfois un choix stratégique. UV Mutuelle ne vend pas ses produits à perte et n’achète pas de parts de marché. Humania a la réputation de bien contrôler les coûts», signale Sylvain Gagné.

Pour leur part, Empire et ivari enregistrent des baisses de parts de marché depuis quelques années.

En 2010, Empire et ivari (qui s’appelait alors Transamerica) détenaient respectivement des parts de marché de 2,08 % et 1,86 %. Cinq ans plus tard, en 2015, leurs parts se situent respectivement à 1,76 % et à 1,35 %.

Que pourraient faire ces assureurs ? «Empire et ivari pourraient peut-être renforcer leurs réseaux de distribution et mieux préciser leurs positionnements auprès des consommateurs et des distributeurs», indique Sylvain Gagné.

Par contre, Robert Landry soutient qu’«aucun assureur ne peut se permettre d’augmenter ses parts de marché avec une tarification plus agressive que la moyenne».

Des géants à surveiller

Troisième acteur de l’industrie, Sun Life a perdu du terrain en 2015 avec une baisse de 8 % des parts de marché par rapport à 2014.

De son côté, le colosse Great-West Lifeco a fait du surplace. Les trois assureurs qui évoluent dans son orbite, à savoir Great-West, Canada-Vie et London Life, représentaient à eux trois 11,82 % de parts de marché en 2015, comparativement à 11,87 % en 2014 et à 13,37 % en 2010.

«Les résultats de certains grands acteurs de l’industrie peuvent ne pas être éclatants. Par contre, c’est le résultat de choix réfléchis d’assureurs qui sont des sociétés multinationales. À un moment donné, ces compagnies priorisent une région de la planète, comme l’Indonésie. L’année suivante, elles peuvent faire une acquisition surprise au Canada», explique Sylvain Gagné.

«S’il y a des assureurs ou des distributeurs sur le marché, ces multinationales peuvent réagir très rapidement grâce à la profondeur de leurs ressources financières», souligne le consultant.

Voilà pourquoi, ajoute-t-il, il faut toujours avoir à l’oeil les grands acteurs de l’industrie, même quand ils semblent assoupis.