Revue semestrielle : quatre erreurs à éviter

Lorsqu’il s’agit de faire une revue de son portefeuille, une politique de laisser-faire est invariablement moins dommageable qu’une surveillance trop poussée. Les investisseurs qui vérifient la valeur de leur portefeuille quotidiennement peuvent se retrouver à se critiquer lors des périodes baissières ou à se féliciter un peu trop lorsque leurs gains sont juteux.

Pire encore, surveiller trop fréquemment leur portefeuille peut mener les investisseurs à modifier son positionnement et ses avoirs plus qu’il ne le faudrait. Ils peuvent être enclins à ajuster leurs combinaisons d’actions/obligations/liquidités en fonction d’événements macroéconomiques à court terme, par exemple, ou faire leurs adieux à un fonds juste après une courte période de sous-classement. Avoir un objectif à long terme est habituellement plus utile. Pour la plupart des investisseurs, un examen trimestriel, semestriel ou même annuel de leur portefeuille est amplement suffisant.  

Voici quatre erreurs supplémentaires à éviter, en plus de celle d’une vérification trop fréquente.

Erreur no 1 : Se complaire dans l’opulence

Si vous détenez une importante participation en actions et que votre client n’a pas vérifié la valeur de son portefeuille depuis un certain temps, il y a tout à parier qu’il aura une agréable surprise lorsqu’il verra son solde. Bien que les actions aient subi quelques remous au cours du dernier mois et que les obligations sensibles aux taux d’intérêt aient obtenu des résultats encore pires, ces dernières années ont été extraordinairement calmes pour les investisseurs dans les actions comme les obligations. Mais avec les soldes de portefeuille élevés surgissent les éventuelles erreurs de comportement. Les accumulateurs peuvent penser qu’ils pourraient freiner leurs cotisations d’épargne; quant aux retraités, ils peuvent croire qu’ils retireront en toute impunité des montants plus élevés. En fait, toutefois, des évaluations boursières plus élevées signifient qu’ils devraient augmenter leurs cotisations d’épargne et réduire leurs dépenses. Après tout, la future croissance du portefeuille proviendra davantage des contributions de l’investisseur que de l’appréciation des marchés.

Le calme plat pour les actions et les obligations peut aussi inciter les investisseurs à prendre plus de risques avec leurs portefeuilles. La volatilité du marché boursier au Canada et aux États-Unis, mesurée par l’écart-type sur trois ans, a été assez basse. Et bien que l’Indice composé S&P/TSX ait généré un revenu annualisé très convenable de 12,2 % sur la période de trois ans qui s’est terminée le 31 mai, les rendements aux États-Unis et sur les marchés internationaux ont été encore plus impressionnants. Non seulement il est alors tentant de garder les gagnants — et de laisser les participations en actions croître indéfiniment — mais les investisseurs peuvent aussi être enclins à établir de nouvelles positions dans des secteurs boursiers en surchauffe ou à risque plus élevé, gonflant donc la volatilité potentielle de leurs portefeuilles à un moment inopportun. Sur la courte liste des types de placement auxquels il faut réfléchir à deux fois avant de les ajouter aussi tard dans le cycle, il y a les actions et fonds de PME axés sur la croissance. Dans l’espace des obligations, les investisseurs qui ne savent trop s’ils doivent augmenter leur participation aux obligations à rendement élevé devraient se demander si les maigres rendements actuels sont suffisants pour rémunérer les risques de cette catégorie d’actifs.

Erreur no 2 : Sous-estimer les acteurs défensifs

Dans la même veine, des rendements très solides émanant d’actifs à risque élevé tendent à saper l’argumentation en faveur des composantes défensives des portefeuilles, qu’il s’agisse d’actions ou d’obligations. Il est facile d’oublier la chute boursière de 2008, lorsque tant de ces acteurs défensifs ont fait plus que mériter l’argent qu’ils ont gagné. Les obligations de qualité élevée, avec leurs maigres rendements et leurs revenus à un seul chiffre sur cinq ans, illustrent par excellence la futilité de certains types de placements. Il est facile de négliger les avantages qu’ils procurent lorsque les marchés vont très mal. De nombreux fonds d’actions à l’esprit défensif comme le Fonds d’actions canadiennes Sionna et le Fonds de valeur des marchés émergents Brandes, par exemple, ont aussi généralement déçu durant la reprise, mais résisteraient probablement bien à un choc boursier.

Erreur no 3 : Se perdre dans la jungle

Le Gestionnaire de portefeuille de Morningstar.ca est une ressource formidable pour vérifier un portefeuille, mais il est facile de se laisser déconcerter ou dépasser par les quantités d’informations en circulation. On peut se retrouver coincé à comparer le rendement d’un avoir depuis le début de l’année avec celui d’un autre, par exemple, ou passer un temps fou à chercher la raison pour laquelle la pondération en liquidités du portefeuille est passée de 4 à 7 %. Les choses peuvent devenir encore plus compliquées si le client a des portefeuilles multiples sauvegardés sur le site — un pour son REER, un pour le CELI de son conjoint, et ainsi de suite. Avant qu’il ne s’aperçoive, quelques heures auront passé, et il n’aura guère fait de progrès dans la revue de son portefeuille.

Pour vous aider à éviter ce piège, commencez la revue de votre portefeuille en posant la question de base : « Suis-je sur la bonne voie ? » Si vous avez de multiples portefeuilles sauvegardés sur le site, la fonction « Combiner » (sous l’onglet « Créer » dans le gestionnaire de portefeuille) peut vous aider à les combiner en un seul portefeuille que vous pouvez utiliser pour assurer une surveillance continue. (Si vous l’avez fait, vous pouvez aussi garder vos sous-portefeuilles et les examiner séparément.) Armé de ces informations sur le solde total et les taux d’épargnes et de retrait, votre client pourrait alors avoir recours à une calculatrice de revenu de retraite comme celle du gouvernement du Canada pour voir si la valeur actuelle de son portefeuille vous donne une bonne chance d’atteindre ses objectifs financiers. S’il a fait fausse route sur ce front, les petites modifications apportées à son portefeuille ne le  feront peut-être pas avancer d’un cran; il lui faudra peut-être ajuster son taux d’épargne (ou son taux de retrait, s’il est retraité) pour améliorer la viabilité de son plan.

Lorsqu’on examine son portefeuille, il est très utile d’en avoir une vue d’ensemble. L’outil Rapport d’anatomie du portefeuille du service Privilège de Morningstar vous fournit de nombreux détails sur le positionnement de votre portefeuille, mais le déterminant le plus important de ce rendement sera la répartition d’actifs de la totalité de votre portefeuille, représentée par un graphique circulaire dans le coin supérieur gauche de l’écran du rapport Anatomie de portefeuille. Comparez vos pondérations actuelles avec celles de vos cibles pour vérifier si votre portefeuille tient la route. Prenez aussi en note les principaux secteurs ou les types de mises dont vous ne voulez pas.

Erreur no 4 : Négliger les abris fiscaux au moment de faire des changements

S’il advenait que votre client ait besoin de modifier légèrement son portefeuille — et de nos jours, de nombreux investisseurs trouveront probablement que leurs portefeuilles sont surpondérés dans les actions par rapport à leurs cibles — gardez-vous bien de le laisser déclencher en chemin des conséquences fiscales involontaires. Cela est particulièrement important ces jours-ci, car de nombreux investisseurs ont réalisé des gains substantiels sur leurs avoirs en actions; vendre des positions qui ont généré de gros rendements dans leurs comptes imposables est de nature à déclencher des gains en capitaux. Cela signifie que si votre client a besoin de réduire l’importance d’une certaine catégorie d’actifs, secteur ou style de placement dans votre portefeuille, il ferait mieux de diminuer certaines positions dans son compte à imposition différée (REER/FERR, fonds de pension d’un employeur) ou dans son compte d’épargne libre d’impôt (CELI). Avec ce type de compte, il n’y a pas de conséquences fiscales lorsqu’on réduit la valeur de ses avoirs les plus performants.

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