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Pourtant, il touche toutes les organisations et individus qui œuvrent dans le domaine des valeurs mobilières au sens large et qui, pour plusieurs, sombrent lentement dans la paranoïa et l’interprétation outrancièrement restrictive.

D’abord, qu’est-ce que le Règlement 81-105? Il s’agit du règlement encadrant les pratiques commerciales des organismes de placement collectif (les OPC). En d’autres mots, ce que nous appelons communément les compagnies (ou maisons) de fonds.

Le règlement 81-105 a vu le jour pour mettre fin à la peu glorieuse époque où il n’existait pas de balise claire sur ce que pouvait faire, ou non, un OPC en matière de commercialisation, particulière en ce qui a trait aux avantages, cadeaux ou autres pratiques du genre.

L’absence de ce règlement a rendu possible, à une certaine époque, l’octroi de cadeaux, de voyages ou d’autres avantages qui, aujourd’hui, nous rendraient proprement mal à l’aise. Comme quoi les mœurs ont changés! Ce qui, à l’époque, était la signification du succès et, pour plusieurs, la base d’une « bonne » relation d’affaires serait aujourd’hui considéré comme étant déplacé et problématique en matière de conflit d’intérêts.

Bref, c’est pour mettre fin à une époque d’excès que fut adopté le règlement 81-105.

Dès lors, les OPC ne pouvaient plus offrir la lune à des inscrits, qu’ils soient courtiers ou représentants. Tout cadeau, toute invitation ou toute participation financière à une activité d’un inscrit était encadrée pour éviter les excès, pour éviter de gonfler l’existence de conflits d’intérêts.

C’est à partir de ce moment que les OPC ne pouvaient plus offrir des ordinateurs ou encore des voyages tous frais payés à des inscrits. Désormais, le règlement stipulait que « les avantages et les activités ne sont ni assez importants ni assez fréquents pour amener une personne raisonnable à se demander s’ils peuvent exercer une influence indue sur les conseils donnés par le représentant à ses clients ».

Le gros bon sens quoi.

Le règlement 81-105 venait aussi encadrer la participation des OPC aux activités de formations offertes par les courtiers. Exit les riches congrès tous frais payés. Désormais, seules certaines dépenses étaient admissibles et à l’intérieur de certaines balises.

Encore ici, le gros bon sens.

Pendant des années, nous avons vécu dans ce monde où la raisonnabilité et le bon sens devaient primer, encadré par des principes et des règles claires connus de tous.

Et puis est arrivé ce qui arrive malheureusement trop souvent : certains ont abusé.

Je ne souhaite pas revenir sur des cas précis, sinon pour dire qu’à l’époque moderne, croire qu’il était correct et légal d’offrir un iPad neuf ou une loge pour le Grand Prix de Montréal à un ou des représentants relevait du délire. Pourtant, certains OPC l’ont fait… et se sont fait pincer.

S’en sont suivi deux choses inévitables quand ce genre d’abus se produisent et sont découverts :

  • L’inquisition
  • La paranoïa et l’autocensure

Nous avons donc vu certains régulateurs augmenter les contrôles de manière importante afin de débusquer les autres contrevenants, s’il s’en trouvait.

Si ce réflexe de nos régulateurs est tout à fait naturel, il faut souligner que, chez certains, la vigilance a laissé sa place au zèle. Soyons tout de même heureux que ce zèle ne se soit pas manifesté de ce côté-ci de la rivière des Outaouais même si ce qui se passe au-delà a des impacts réels sur notre quotidien ici.

Cet impact prend la forme d’une certaine paranoïa et pratique d’autocensure où des OPC délaissent la règle de raisonnabilité et le cadre bien connu (et éprouvé) du règlement 81-105 pour le remplacer par des pratiques restrictives qui déstabilisent l’équilibre atteint auparavant.

Il n’a jamais été aussi ardu et compliqué d’organiser une activité de formation sous forme de colloque ou de congrès en obtenant une participation financière d’OPC. Même en respectant la lettre et le fonds du règlement 81-105, il semble y avoir une telle crainte d’être pris en défaut que plusieurs OPC ajoutent des couches de vérifications ou des exigences déraisonnables.

Quand certains OPC ne peuvent plus offrir que des stylos de quelques dollars parce que leur département de conformité est passé par là, on peut se dire que l’époque est un peu chiche.

Ceci dit, je ne suis pas en train de pleurer sur le sort des conseillers qui ne seront plus invités à un match des Canadiens ou à l’une des meilleures tables en ville.

Ma réflexion est plutôt de me demander si le système n’est pas brisé. S’il ne faudrait pas revisiter certains éléments du règlement 81-105 portant sur les avantages et les activités de formation pour affirmer où devraient être les balises en 2019, ce qui est acceptable et ce qui ne l’est pas plutôt que de laisser la peur et l’extrême prudence guider les actions.

Ma réflexion est plutôt de me demander que, si les OPC cessent de participer aux activités de formations des courtiers, il faudra bien trouver une autre façon de financer ces activités car nous aurons tous besoin de formation pendant toute notre carrière.

Ma réflexion est plutôt d’affirmer que, si les OPC doivent vraiment cesser de donner des cadeaux et de participer aux activités de formation des courtiers, la moindre des choses serait que ces économies réalisées par les OPC se traduisent par une baisse conséquente des ratios de frais de gestion et non par une augmentation de leurs marges bénéficiaires.

Et, pendant qu’on y est, à quand la mise en place d’un système réellement équivalent de gestion des avantages et participations à des activités de formation pour les assureurs envers les agents généraux et les conseillers?

On jase là…