Retraite : lucidité et planification comme mots d'ordre
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Finance et Investissement (FI): De quelle manière l’augmentation de l’espérance de vie et la persistance des bas taux d’intérêt influencent-elles votre travail de planification de la retraite auprès de vos clients ?

Hélène Gagné (HG): La question des taux d’intérêt est un élément qui change la donne de façon incroyable et les gens ont dû évoluer par rapport à l’investissement. Aujourd’hui, même une fois à la retraite, ils sont condamnés à avoir un portefeuille équilibré parce que les taux d’intérêt sont trop bas. Au début des années 1990, lorsqu’une personne prenant sa retraite disposait d’un actif d’un million de dollars (M$) dans son portefeuille, elle pouvait détenir un portefeuille défensif composé de dépôts à terme ou d’obligations générant un taux d’intérêt de 10 %, ce qui lui procurait un revenu annuel de 100 000 $. En 2015, outre le fait que le million ne vaut plus la même chose, ce capital va générer seulement 20 000 $ par année.

De même, les gens occupaient auparavant leur emploi à plein temps le vendredi et le lundi matin, ils devenaient retraités. Maintenant, que ce soit pour faire une transition au plan financier ou rendre la démarche plus facile au niveau psychologique, ils prévoient pour la plupart une période de transition vers la retraite. Les gens réduisent graduellement le nombre de jours passés au travail et continuent pendant cette période de générer un certain revenu. Cette stratégie leur permet à la fois de ne pas avoir à puiser tout de suite dans leurs économies et de s’approprier toutes ces heures qui deviennent disponibles afin de se construire un nouveau rythme de vie.

Il faut également dire que de moins en moins de gens ont accès à un régime de retraite, car non seulement le nombre d’employeurs offrant un tel régime est-il en baisse, mais je constate que le nombre de personnes qui sont contractuelles, travailleurs autonomes ou qui se lancent en affaires est en hausse. Retarder le moment de la retraite, occuper un emploi d’appoint au moment de la retraite, ou dédier une partie de l’actif disponible à l’achat d’un produit tel qu’une rente sont autant de stratégies plus régulièrement considérées au cours des récentes années par les clients pour éviter d’épuiser leur actif trop rapidement.

Depuis quelques années, je constate aussi un accroissement du nombre de clients plus âgés. Ils ont de 72 à 75 ans et sont en bonne santé. Comme leur espérance de vie ne les amène plus à 80 ou 82 ans, mais à un âge beaucoup plus avancé, il s’agit de clients pour lesquels il faut actualiser nos projections et le cas échéant, réviser les politiques de placement, de manière à s’assurer qu’ils aient suffisamment d’argent pour le reste de leurs jours. Cette augmentation de l’espérance de vie introduit aussi d’autres formes de besoins, par exemple en ce qui a trait au volet de planification successorale.

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(FI): À quel âge est-il pertinent d’amorcer une discussion sur la planification de la retraite avec son client ?

(HG): La norme, c’est lorsque notre client se trouve environ à une dizaine d’années de la retraite, car cette question commence à occuper son esprit. En général, il s’agit d’une période où normalement, les enfants commencent à représenter un fardeau financier moins important, où les revenus liés à la carrière commencent à être plus élevés, et où les gens commencent à prendre le dessus sur les dettes, incluant l’hypothèque. La beauté d’effectuer une planification lorsque l’on se trouve environ à dix ans de la retraite de notre client, c’est que l’on peut vérifier annuellement nos hypothèses et actualiser les cibles d’épargne afin que la progression de capital nous amène vers les résultats espérés.

Je reçois souvent de nouveaux clients qui sont âgés dans la soixantaine ou même dans la cinquantaine et leur dénominateur commun est leur préoccupation à l’égard de la retraite. La plupart du temps, ils ne me rencontrent pas parce qu’ils sont insatisfaits du conseiller avec lequel ils font affaire, mais parce qu’ils trouvent chez moi une expertise propre aux stratégies de décaissement qu’ils ne retrouvent pas avec leur conseiller actuel.

De même, j’accueille aussi les enfants ou même les petits enfants de nos clients, c’est-à-dire des personnes qui sont âgées dans la trentaine ou la quarantaine. Certains d’entre eux ont de bons revenus et veulent réaliser différents projets. Je les incite alors à accumuler en vue de leur retraite, que ce soit par l’entremise du REER, du CELI, ou d’un autre véhicule, car c’est une situation qui peut s’avérer intéressante au niveau fiscal.

Lire la suite pour connaître la plus grande erreure commise par les conseillers et par les clients en matière de planification de la retraite
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Finance et Investissement (FI): En quoi la planification de la retraite se distingue-t-elle chez la femme par rapport à celle qui est faite chez l’homme ?

Hélène Gagné (HG): Des statistiques récentes disent qu’il y a 1 813 centenaires au Québec, et que la longévité et l’espérance de vie élevée, ça se conjugue la plupart du temps au féminin (NDLR : selon l’Institut de la statistique du Québec, on retrouve 1635 femmes centenaires contre 178 hommes en 2014. En 2009, il y avait 1278 centenaires). La réalité c’est aussi que les femmes sont souvent moins longtemps sur le marché du travail parce qu’elles s’en retirent pour élever leurs enfants ou devenir un aidant naturel. Force est de reconnaître aussi qu’on observe encore souvent un écart de salaire entre les hommes et les femmes. En conséquence, la prestation de retraite de la Régie des rentes du Québec (RRQ) est moins élevée et les montants que les femmes ont pu cotiser dans leur REER ou dans un fonds de retraite d’employeur sont aussi moins grands. Ce sont des éléments qui font en sorte que les enjeux financiers sont donc souvent plus grands pour les femmes.

Il n’y a pas 36 façons d’aborder ce défi avec nos clientes et la solution se trouve dans la planification. Il y a toute la question propre à la gestion du portefeuille, mais il faut dès le départ sensibiliser la personne à être lucide face à sa situation et l’inciter à faire un budget afin de voir comment circule son argent. L’exercice permettra aussi d’établir des objectifs d’épargne, alors il faut ensuite sensibiliser notre cliente à l’importance de respecter ces objectifs d’épargne.

(FI): Dans votre plus récent ouvrage (1), vous soulignez que l’assurance est souvent sous-utilisée.

(HG): Détenir un portefeuille d’assurance est une stratégie destinée notamment à prévenir un épuisant rapide des épargnes en cas de problèmes de santé. Les clients sont toutefois nombreux à trouver que l’assurance est un produit qui coûte cher. Par exemple, lorsque l’on parle d’assurance de soins de longue durée à nos clients qui sont âgés dans la quarantaine, ceux-ci se croient immortels et imaginent qu’il ne leur arrivera jamais rien. Mais lorsqu’ils arrivent dans la soixantaine et commencent à avoir des petits problèmes de santé « avec certaines pièces qui ne sont plus sous la garantie », la question de l’assurance devient rapidement une préoccupation. C’est toutefois à ce moment que les primes s’avèrent habituellement plus élevées. En même temps, puisque les assureurs se réservent le privilège d’augmenter les primes à peu près au cinq ans, je peux jusqu’à un certain point comprendre la réticence de ces clients et l’assurance demeure sous-utilisée. Néanmoins, lorsqu’un client fait l’achat de produits d’assurance, il est important pour le conseiller de faire évoluer ce portefeuille d’assurance à mesure que la situation du client évolue.

(FI): Quelle est la plus grande erreur commise par les conseillers en matière de planification de la retraite ?

(HG): C’est certainement de sous-estimer le risque de longévité de leurs clients. Si l’on gère un portefeuille dans la perspective que notre client va vivre 15 autres années, par rapport à une espérance de vie supplémentaire de 30 années, ça change la donne complètement.

(FI): Quelle est la plus grande erreur commise par les clients en matière de planification de la retraite ?

(HG): Ne pas épargner suffisamment. Les marchés feront ce qu’ils voudront, s’il n’y a pas d’épargne au point de départ, il n’y a pas de rendement à espérer. Le dilemme tient souvent entre un investissement de 3000$ dans un REER ou l’achat d’une semaine dans un tout inclus. On ne sait bien sûr jamais ce que l’avenir nous réserve, mais les statistiques tendent à démontrer qu’il y a pas mal plus de gens qui vont décéder à un âge avancé plutôt qu’à 60 ans.

1- Votre retraite crie au secours, 2e édition Hélène Gagné, Éditions Transcontinental, 2015.