Une femme noire dans un bureau.
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Les femmes sont de mieux en mieux positionnées sur le plan financier. L’écart salarial avec les hommes se réduit. Elles se tournent plus volontiers vers l’entrepreneuriat, sont de plus en plus scolarisées et se décident à fonder une famille plus tardivement, souligne Desjardins, qui a compilé plusieurs études récentes pour dresser un portrait de la situation des investisseuses canadiennes à l’occasion de la Journée internationale des femmes, le 8 mars.

Les femmes s’intéressent de plus en plus à leur argent, constate Desjardins, s’appuyant sur une étude d’Investment Planning Counsel selon laquelle près de 70 % des femmes accordent une haute priorité à leurs finances comparativement à 59 % chez les hommes.

À l’avenir, elles auront des besoins grandissants en services de gestion de patrimoine et de planification financière, souligne Desjardins, puisqu’à un moment de leur vie, 9 Canadiennes sur 10 seront appelées à assumer seules la responsabilité de leur bien-être financier personnel.

« L’industrie financière doit prendre acte que cette tendance est là pour rester. Les femmes contrôleront de plus en plus de richesse. Les institutions qui ne s’adapteront pas risquent de perdre au change », assure Caroline Marion, notaire, fiscaliste et planificatrice financière chez Desjardins Gestion de patrimoine.

Les objectifs à long terme plutôt que le rendement

Selon Desjardins, dans la gestion de leurs investissements, les Canadiennes priorisent la sécurité plutôt que la prospérité. Elles veulent avoir une planification qui reflète leurs valeurs et manifestent une nette préférence pour les placements qui répondent aux critères environnementaux, sociétaux et de gouvernance (ESG). Elles visent des résultats prévisibles plutôt que la performance.

Les femmes accordent aussi une grande importance à la sécurité financière de leurs proches. Cette réalité nourrit un mythe selon lequel les femmes obtiennent des rendements inférieurs aux hommes parce qu’elles sont plus prudentes qu’eux en matière de placement.

Certaines études démontrent au contraire que les femmes obtiennent souvent un rendement supérieur à celui des hommes, car elles ont tendance à garder leurs placements plus longtemps, les hommes étant susceptibles de vendre plus fréquemment leur position, notamment en période de volatilité.

« Les objectifs des femmes sont différents de ceux des hommes. Elles veulent comprendre à quoi serviront leurs placements plutôt que suivre à la virgule près leurs rendements trimestriels. Elles veulent savoir s’ils leur permettront de réaliser leurs objectifs, comme avoir assez d’argent pour prendre leur retraite ou faire face à des dépenses imprévues », note Sophie Sylvain, planificatrice financière chez Desjardins Gestion de patrimoine.

L’appétit des femmes pour les placements ESG est un autre facteur susceptible de faire fructifier avantageusement leurs placements, puisque les placements ESG ont tendance à surperformer, souligne Sophie Sylvain.

« Les connaissances des femmes en matière financière augmentant, elles en veulent plus pour leur argent en termes de conseils. Elles sont d’ailleurs de plus en plus sensibles à certains éléments, comme l’impact des frais de gestion sur les rendements de leurs investissements », mentionne la conseillère.

L’impact de la situation familiale

La situation familiale, en particulier dans le cadre d’une union de fait, reste souvent l’angle mort dans la planification financière des femmes. Or, ce manque de connaissance peut s’avérer lourd d’impacts sur leur situation financière, constate Caroline Marion.

« Près de 40 % de couples vivent en union fait. C’est majeur au niveau des conséquences tant fiscales que légales. Certaines décisions, par exemple choisir qui est propriétaire de la maison ou qui contribue au régime enregistré d’épargne études des enfants (REEE), peuvent avoir un impact considérable », relève la notaire. Comme la richesse sera de plus en plus entre les mains des femmes, des stratégies de fractionnement du revenu sont à considérer, notamment si la femme gagne un plus haut revenu dans le couple, suggère-t-elle.

Puisque plusieurs crédits d’impôts et mesures sont basés sur le revenu familial, il n’est pas rare, lors d’une deuxième union, que les sommes en jeu viennent affecter la dynamique financière du couple, surtout s’il y a un écart important entre les revenus des deux conjoints, ajoute la fiscaliste. « À court terme, on risque de perdre des crédits au niveau des frais de garde ou de voir l’allocation canadienne pour enfants diminuer, par exemple. C’est tout l’écosystème financier du couple qui peut être perturbé. »

Le contrat de vie commune, souvent négligé, est un outil indispensable pour assurer la sécurité financière des deux conjoints, rappelle la fiscaliste.

Dans ce contexte, pour bien servir la clientèle féminine, il est plus que jamais nécessaire pour les conseillers de se mettre à leur écoute afin de comprendre ce qui motive leurs décisions et de saisir leurs préoccupations, souligne Sophie Sylvain, plutôt que de présumer qu’il y a un ordre immuable dans lequel il faut aborder les choses.

Quelques faits

  • De 2000 à 2016, l’écart salarial entre les sexes a diminué de 24 %, passant de 23,9 % à 18,2 %, selon le Conference Board du Canada. En 2019, au Québec, le revenu moyen total des femmes (39 800$) était 23,8 % plus faible que celui des hommes (52 200$).
  • La richesse contrôlée par les Canadiennes atteindra 42 % en 2028, soit 3, 2 milliards de dollars(G$), comparativement à 35 % en 2016 (1,4 G$), principalement en raison des sommes transmises en héritage (900 G$) entre 2016 et 2026, selon Investment Planning Counsel.
  • 46 % des Canadiennes souhaitent investir dans les placements socialement responsables, selon Desjardins.
  • Moins de la moitié des Québécois (48%) ont préparé un testament et 39 % ont préparé un mandat de protection (Sondage Crop L’Actualité).
  • Les femmes seules représentaient 53,7 % des ménages d’une seule personne selon le recensement de 2016.